Oubli ou pardon ?
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Re: Oubli ou pardon ?
l'absence de rancoeur chez l'offensé, de culpabilité chez l'offenseur ...l'oubli, disais-je . C'est effacé .
Autrement, ce n'est pas le pardon, c'est la volonté de continuer malgré le trauma impossible à digérer . La décision de ne pas se venger . Celle de prendre quand même une éventuelle main tendue .
Autrement, ce n'est pas le pardon, c'est la volonté de continuer malgré le trauma impossible à digérer . La décision de ne pas se venger . Celle de prendre quand même une éventuelle main tendue .
JO- Seigneur de la Métaphysique
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Re: Oubli ou pardon ?
JO et Tenzin, je vous rejoins tout à fait dans ce que vous écrivez . Il y a des drames trop horribles qu'on ne peut oublier et qui vous traumatiseront toute la vie . Et puis tous les autres que l'oubli finit par couvrir, et c'est tant mieux .Sinon, on serait malheureux "comme des pierres"! L'oubli joue un rôle important . Et il y a aussi l'amour qui intervient . On pardonne à l'enfant ingrat; quant à l'oublier...
gaston21- Seigneur de la Métaphysique
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Re: Oubli ou pardon ?
L'oubli cependant est difficile à effectuer (cela ne se décrète pas, à moins de croire en la toute puissance de la conscience) cependant pardonner peut-être ! Si l'offenseur n'est plus en face, et qu'intérieurement, on sait que le mal que l'on a subi n'est qu'une affaire de circonstances (dans un autre lieu, dans un autre temps, il n'aurait pas eu lieu)! A supposer même que l'on soit irréprochable concernant nos actes (car si on a essuyé un préjudice, on peut supposer aussi qu'on l'a mérité sans l'avoir pour autant prémédité ou voulu), le mal qui nous a frappé doit être pris avec du recul ! je ne sais si certaines personnes peuvent faire le mal par plaisir de faire le mal ! Il s'agit souvent d'ignorance, de lâcheté, de jeu insouciant, de conditionnement, etc. Un tortionnaire entièrement coupable reste un idéal, comme d'ailleurs la victime entièrement innocente ! On fait le mal souvent par accident, on fait le bien parfois par obligation intérieure mais pour que le pardon prenne vraiment sens, il faudrait poser un être qui, en toute connaissance de cause, fasse le mal par pur plaisir (au-delà de sa souffrance car faire le mal par souffrance peut être excusable ou en tout cas compréhensible) et auquel on puisse accorder un pardon désintéressé ! Par exemple, en reprenant "Eichmann à Jérusalem : rapport sur la banalité du mal" de Arendt, le réquisitoire du procureur Gideon Hausner, parlant au nom des victimes, ne pouvait demander le pardon ! Eichmann représentait à ce moment-là, en 1962, le fléau nazi devenu corps visible et cible toute désignée ! Et on sait que le Mossad n'a pu mettre la main sur Joseph Mengele et qu'une telle prise devenait une victoire sur la barbarie nazie ! Pardonner devant le bourreau pour les proches des victimes devait être impossible, oublier encore moins ! Comment oublier ? Comment même pardonner en voyant le symbole du nazisme ? Par contre pardonner une fois sorti de la cour de justice, en sachant qu'Eichmann n'était qu'un homme, et qu'il aurait pu faire différemment s'il n'avait pas été membre des S.S. ou s'il n'avait tout simplement pas vécu sous le troisième Reich, effectivement ! Car nous ne sommes jamais que des hommes, faillibles, et si nous commettons le mal, c'est par concours de circonstances, sans le voir le plus souvent ! Telle est d'ailleurs la conclusion de Arendt qui pardonne (étant pourtant partie prenante dans la catastrophe de la Shoah) mais qui n'oublie pas (et ne peut oublier), et qui admet qu'il fallait qu'Eichmann soit pendu ! Eichmann avait-il vraiment le mal en lui ? Si c'est le cas, le pardon qu'on a pu lui accorder fut réellement grand, au-delà des limites de l'humain ! S'il n'avait pas le mal en lui, ce pardon devient naturel, presque trop facile ! Pour que le pardon fasse vraiment sens, soit purement désintéressé, il faudrait trouver le mal à l'état pur, sans circonstances atténuantes, sans scrupules ! Dans "Titus Andronicus" de Shakespeare, Aaron revendique ses crimes, les assume et voudrait les reproduire encore et encore si on lui laissait la vie sauve ! Une figure littéraire digne de recevoir le pardon !
Alcibiade- Affranchi des Paradoxes
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Re: Oubli ou pardon ?
rationaliste pascalien mais accessible à l'humain, trop humain . Eichman est devenu l'emblême du mal, comme il en a été l'instrument . Il faudrait pouvoir, toujours, dissocier l'homme de son acte, ne pas tolérer l'acte et laisser aller l'homme .
JO- Seigneur de la Métaphysique
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Re: Oubli ou pardon ?
Comment dissocier l'homme de son acte?
Ling- Seigneur de la Métaphysique
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Re: Oubli ou pardon ?
Peut etre en différenciant ce qui est de l'ordre de sa responsabilité personnelle directe... et ce qui est de l'ordre de sa responsabilité indirecte ...circonstances , milieu, manipulation, endoctrinement. maladie mentale, etc
_athéesouhaits- Seigneur de la Métaphysique
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Re: Oubli ou pardon ?
comme on en dissocie l'enfant , en bon éducateur . L'être humain est faillible : selon l'environnement , l'éducation, le milieu, il est amené à commettre des fautes, des erreurs. Placés dans les mêmes paramètres, qui sait ce que celui qui le juge aurait fait ? Il faut donc punir la faute - le coupable aussi, forcément - mais considérer que tout coupable est amendable . Pas facile et d'ailleurs pas toujours vrai , mais ça évite au juge la haine inutile et mal fondée .
JO- Seigneur de la Métaphysique
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Re: Oubli ou pardon ?
JO a écrit:rationaliste pascalien mais accessible à l'humain, trop humain . Eichman est devenu l'emblême du mal, comme il en a été l'instrument . Il faudrait pouvoir, toujours, dissocier l'homme de son acte, ne pas tolérer l'acte et laisser aller l'homme .
Ben voyons !
- Code:
Adolf Eichmann (Solingen 19 mars 1906 – Jérusalem 31 mai 1962) est un criminel de guerre nazi, haut fonctionnaire du Troisième Reich, officier SS Obersturmbannführer (comparable à lieutenant-colonel dans l'armée) et membre du parti nazi. Nommé pendant la guerre à la tête du RSHA Referat IV B4, qui s'occupe des « affaires juives et de l'évacuation », il est responsable de la logistique de la « solution finale » (Endlösung). Il organise notamment l'identification des victimes de l'extermination raciale prônée par le NSDAP et leur déportation vers les camps de concentration et d'extermination.
Ayant réussi à échapper à la justice après la capitulation allemande, et notamment au procès de Nuremberg, retrouvé, puis capturé par des agents du Mossad en mai 1960 à Buenos Aires en Argentine, où il vivait depuis 10 ans, caché sous le nom de Riccardo Klement, Eichmann est exfiltré en Israël où il sera condamné à mort et exécuté à l'issue d'un retentissant procès tenu à partir d'avril 1961 à Jérusalem.
Pauvre petit monsieur Eichmann, vas savoir le pauvre, avec un peu plus de compassion pour lui il aurait probablement pu encore faire de grandes choses....
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Re: Oubli ou pardon ?
voir ci-dessus : il faut tout lire !
je répépète :
je répépète :
comme on en dissocie l'enfant , en bon éducateur . L'être humain est faillible : selon l'environnement , l'éducation, le milieu, il est amené à commettre des fautes, des erreurs. Placés dans les mêmes paramètres, qui sait ce que celui qui le juge aurait fait ? Il faut donc punir la faute - le coupable aussi, forcément - mais considérer que tout coupable est amendable . Pas facile et d'ailleurs pas toujours vrai , mais ça évite au juge la haine inutile et mal fondée .
JO- Seigneur de la Métaphysique
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Re: Oubli ou pardon ?
Un enfant apprend la vie, apprend à ce comporter en société, il est donc normal que son acte soit séparé de lui. Mais un adulte lui possède tout cela: il est responsable de ces actes, il doit en assumer la responsabilité.
Un juge qui hait n'est plus un juge.
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Ling- Seigneur de la Métaphysique
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Re: Oubli ou pardon ?
En effet il faut tout lireJO a écrit:voir ci-dessus : il faut tout lire !
je répépète :comme on en dissocie l'enfant , en bon éducateur . L'être humain est faillible : selon l'environnement , l'éducation, le milieu, il est amené à commettre des fautes, des erreurs. Placés dans les mêmes paramètres, qui sait ce que celui qui le juge aurait fait ? Il faut donc punir la faute - le coupable aussi, forcément - mais considérer que tout coupable est amendable . Pas facile et d'ailleurs pas toujours vrai , mais ça évite au juge la haine inutile et mal fondée .
SourceEichman est devenu l'emblême du mal, comme il en a été l'instrument . Il faudrait pouvoir, toujours, dissocier l'homme de son acte, ne pas tolérer l'acte et laisser aller l'homme .
Cela constituait un message unique et l'explication (qui ne tient pas debout d'ailleurs, le problème n'ayant pas grand chose à voir avec la haine ou non haine d'un type dont le rôle est de juger AVEC d'autres...), pour venir, dût être demandée...
Cela dit à mes yeux :
1) l'exemple n'est pas anodin,
2) "laisser aller l'homme" ne l'est pas non plus...
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Re: Oubli ou pardon ?
Mengele, Eichmann, des monstres, sans problème .La condamnation exemplaire, oui, sans hésiter . La méritaient-ils ? Je m'interroge. Ils étaient les fruits d'un système épouvantable, programmés, conditionnés, et sans doute déjà poussés par des dispositions génétiques morbides. Je ne crois pas du tout qu'ils aient pu se livrer à des choses aussi horribles en disposant de leur libre-arbitre. Par contre, leur condamnation était nécessaire à titre d'exemple pour la société..., pour constituer dans les cerveaux ces fameux fichiers de crainte de la sanction si on ne reste pas dans les clous. C'est le système de conditionnement utilisé depuis toujours par les religions, les houris pour moi et athéesouhaits ou les diables cornus !
Libre-arbitre ? La blague ! Dites-moi pourquoi mon frère, militaire de carrière est d'extrême-droite, et moi, cheminot, gauche-gauche...Bien sûr qu'on peut encore basculer, mais là, il faudra de très gros dossiers contradictoires pour faire pencher la balance; pour moi le coup de foudre pour une jeune et jolie militante UMP, mais...ne rêve pas, Gaston ! Que pourrait-elle tirer d'un vieillard libidineux ? La source est tarie...
Libre-arbitre ? La blague ! Dites-moi pourquoi mon frère, militaire de carrière est d'extrême-droite, et moi, cheminot, gauche-gauche...Bien sûr qu'on peut encore basculer, mais là, il faudra de très gros dossiers contradictoires pour faire pencher la balance; pour moi le coup de foudre pour une jeune et jolie militante UMP, mais...ne rêve pas, Gaston ! Que pourrait-elle tirer d'un vieillard libidineux ? La source est tarie...
gaston21- Seigneur de la Métaphysique
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Re: Oubli ou pardon ?
vingeinceu!!!
JO- Seigneur de la Métaphysique
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Re: Oubli ou pardon ?
je ne parle pas d'Eichman là...Stirica a écrit:Un enfant apprend la vie, apprend à ce comporter en société, il est donc normal que son acte soit séparé de lui. Mais un adulte lui possède tout cela: il est responsable de ces actes, il doit en assumer la responsabilité.
Un juge qui hait n'est plus un juge.
Il existe bien en justice le concept de circonstances atténuantes...
des meurtriers ont eut des peines bien allégées en considération des circonstances dans lesquelles ils ont été commis...
Eichman n'a aucune circonstance atténuante c'est clair!
_athéesouhaits- Seigneur de la Métaphysique
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Re: Oubli ou pardon ?
Evidemment, il ne peut s'agir que d'une dissociation purement théorique (je reprends la différence entre les actes et la volonté) : car, dans les faits justement, il est impossible ou surhumain de séparer l'homme de l'ensemble de ses actes. Oui, d'ordinaire, classiquement, l'homme est l'ensemble de ses actes et doit assumer, même les conséquences les plus impévisibles et les plus aléatoires de ses actes.
Dans l'absolu, on a toujours le choix, et rétrospectivement, on aurait toujours pu agir différemment. Le réel n'est pourtant jamais aussi simple, et loin de rechercher à fuir nos responsabilités ou à disculper un coupable, il faut certainement comprendre l'origine du mal.
Qu'Eichmann soit coupable, c'est un fait ! Qu'Eichmann doive être châtié, c'est une obligation politique (j'ajouterais morale, même ! Pour que la morale fasse toujours sens) ! Qu'on doive le considérer comme un monstre qui ne mérite aucun pardon est autre chose !
L'acuité du propos de Arendt fait en effet frémir : le mal est banal, le mal n'est pas à exclure de nos propres potentialités, on aurait pu faire de même (n'oublions pas qu'Eichmann n'était pas un antisémite forçené, il avait de la famille juive, une petite amie juive, il a manifesté son horreur devant le traitement qu'il a pu observé dans les camps mais par contre les ordres relevaient pour lui du devoir sacré : un bureaucrate zélé dont le seul regret fut de n'avoir pas pu s'élever au dessus du grade de lieutenant-colonel SS) de sorte qu'il y a une relativité du pouvoir de l'individu dans un système qui le dépasse ! Quelqu'un parlait ci-dessus de la vengeance et combien il est naturel (puisqu'on a souffert en tant que victime ou proche des victimes) de vouloir considérer son tortionnaire comme un monstre et de vouloir se venger et lui faire payer ses actes : on lui prête dès lors des actes signés, et comme il s'agit d'actes innommables, il ne peut être humain et donc digne de pardon ! Car on ne pardonne qu'aux hommes, non aux monstres ! Mais surtout retirer à un homme (reconnu coupable et tortionnaire) son humanité, c'est se mettre à l'abri soi-même : s'il s'agit d'un monstre, je ne suis pas concerné car je n'aurais pas fait cela !
Du coup, le problème du mal est évacué, il n'est pas humain, ne me concerne pas or le mal est pourtant bien perpétré par l'homme, il ne relève pas de la fatalité ou du hasard. Le plus renversant dans le procès Eichmann, c'est que la figure du mal revêt une normalité indécente : un homme qui reprend ses fiches, qui écoute le procureur avec déférence, se cache derrière des verres teintés tout en s'exprimant dans un langage neutre, institutionnalisé, etc. On aurait bien voulu qu'Eichmann ne nous ressemble pas, mais l'inquiétude s'insinue lorsqu'on s'aperçoit qu'il s'agit d'un simple fonctionnaire médiocre et commun, arriviste certes et procédurier. Lorsqu'Himmler, lors de la débâcle finale, met fin à la Solution finale ; Eichmann reste fidèle aux ordres premiers du Reich et continue les déportations. Une telle attitude peut nous sembler suspecte vus les enjeux cosmiques qui se déroulent lors de ce procès à Jérusalem : comment est-ce possible que ce soit lui qui ait pu faciliter ainsi la machinerie de destruction ? L'exemple de Eichmann est peut-être trop polémique, mais en évoquant la notion de pardon, on se dit que la problème se pose toujours lorsqu'on a affaire à des crimes non seulement de sang, mais de dimension interplanétaire qui attentent à l'essence même de l'homme.
La notion de pardon prend tout son sens lorsque le mal commis relève de l'impensé et surtout lorsque le mal nous touche, raison pour laquelle Arendt et Lévinas ont si bien parlé du pardon.
Dans l'absolu, on a toujours le choix, et rétrospectivement, on aurait toujours pu agir différemment. Le réel n'est pourtant jamais aussi simple, et loin de rechercher à fuir nos responsabilités ou à disculper un coupable, il faut certainement comprendre l'origine du mal.
Qu'Eichmann soit coupable, c'est un fait ! Qu'Eichmann doive être châtié, c'est une obligation politique (j'ajouterais morale, même ! Pour que la morale fasse toujours sens) ! Qu'on doive le considérer comme un monstre qui ne mérite aucun pardon est autre chose !
L'acuité du propos de Arendt fait en effet frémir : le mal est banal, le mal n'est pas à exclure de nos propres potentialités, on aurait pu faire de même (n'oublions pas qu'Eichmann n'était pas un antisémite forçené, il avait de la famille juive, une petite amie juive, il a manifesté son horreur devant le traitement qu'il a pu observé dans les camps mais par contre les ordres relevaient pour lui du devoir sacré : un bureaucrate zélé dont le seul regret fut de n'avoir pas pu s'élever au dessus du grade de lieutenant-colonel SS) de sorte qu'il y a une relativité du pouvoir de l'individu dans un système qui le dépasse ! Quelqu'un parlait ci-dessus de la vengeance et combien il est naturel (puisqu'on a souffert en tant que victime ou proche des victimes) de vouloir considérer son tortionnaire comme un monstre et de vouloir se venger et lui faire payer ses actes : on lui prête dès lors des actes signés, et comme il s'agit d'actes innommables, il ne peut être humain et donc digne de pardon ! Car on ne pardonne qu'aux hommes, non aux monstres ! Mais surtout retirer à un homme (reconnu coupable et tortionnaire) son humanité, c'est se mettre à l'abri soi-même : s'il s'agit d'un monstre, je ne suis pas concerné car je n'aurais pas fait cela !
Du coup, le problème du mal est évacué, il n'est pas humain, ne me concerne pas or le mal est pourtant bien perpétré par l'homme, il ne relève pas de la fatalité ou du hasard. Le plus renversant dans le procès Eichmann, c'est que la figure du mal revêt une normalité indécente : un homme qui reprend ses fiches, qui écoute le procureur avec déférence, se cache derrière des verres teintés tout en s'exprimant dans un langage neutre, institutionnalisé, etc. On aurait bien voulu qu'Eichmann ne nous ressemble pas, mais l'inquiétude s'insinue lorsqu'on s'aperçoit qu'il s'agit d'un simple fonctionnaire médiocre et commun, arriviste certes et procédurier. Lorsqu'Himmler, lors de la débâcle finale, met fin à la Solution finale ; Eichmann reste fidèle aux ordres premiers du Reich et continue les déportations. Une telle attitude peut nous sembler suspecte vus les enjeux cosmiques qui se déroulent lors de ce procès à Jérusalem : comment est-ce possible que ce soit lui qui ait pu faciliter ainsi la machinerie de destruction ? L'exemple de Eichmann est peut-être trop polémique, mais en évoquant la notion de pardon, on se dit que la problème se pose toujours lorsqu'on a affaire à des crimes non seulement de sang, mais de dimension interplanétaire qui attentent à l'essence même de l'homme.
La notion de pardon prend tout son sens lorsque le mal commis relève de l'impensé et surtout lorsque le mal nous touche, raison pour laquelle Arendt et Lévinas ont si bien parlé du pardon.
Alcibiade- Affranchi des Paradoxes
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Re: Oubli ou pardon ?
J'aime ce que tu dis et j'y adhère pleinement .Le mal ideologique peut entrainer un homme doux , qui aime les enfants et la musique , à torturer les "ennemis" de ses propres convictions . Une fois l'"ennemi" classé dans la catégorie : "nuisance à éliminer" , le reste va de soi .
JO- Seigneur de la Métaphysique
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Re: Oubli ou pardon ?
athéesouhaits a écrit:je ne parle pas d'Eichman là...Stirica a écrit:Un enfant apprend la vie, apprend à ce comporter en société, il est donc normal que son acte soit séparé de lui. Mais un adulte lui possède tout cela: il est responsable de ces actes, il doit en assumer la responsabilité.
Un juge qui hait n'est plus un juge.
Il existe bien en justice le concept de circonstances atténuantes...
des meurtriers ont eut des peines bien allégées en considération des circonstances dans lesquelles ils ont été commis...
Eichman n'a aucune circonstance atténuante c'est clair!
Là nous changeons de perspective. initialement nous parlions d'oubli et de pardon individuel mais l'étendre à l'ensemble de la société est intéressant car il peut y avoir divergence.
Un crime peut avoir, comme vous le soulignez, des circonstances atténuantes mais pour la famille de la victime, ce facteur ne peut exister. Les deux points de vue peuvent se rejoindre mais ils peuvent également diverger complètement.
Ling- Seigneur de la Métaphysique
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Re: Oubli ou pardon ?
ça dépend
imaginons une mère qui se fait frapper par son mari parce qu'elle est intervenue alors que le père brutalisait un de leurs enfant...en arrive a tuer son mari qui est un récidiviste notoire...
la famille de la victime peut très bien comprendre que c'etait un salaud et accorder les circonstances atténuantes a la meurtrière.
imaginons une mère qui se fait frapper par son mari parce qu'elle est intervenue alors que le père brutalisait un de leurs enfant...en arrive a tuer son mari qui est un récidiviste notoire...
la famille de la victime peut très bien comprendre que c'etait un salaud et accorder les circonstances atténuantes a la meurtrière.
_athéesouhaits- Seigneur de la Métaphysique
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Re: Oubli ou pardon ?
Tu soulignes à juste titre que le coupable a réagi à des circonstances qu'il n'a pas pu supporter et l'ont poussé à faire mal, à son tour . Il faut remonter au coupable initial : on y trouve souvent "l'inqualifiable agression" du faux ange de justice qui incite au mal . Le serpent de la genèse n'est pas mort!
JO- Seigneur de la Métaphysique
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Re: Oubli ou pardon ?
Comprendre est-il pardonner?
Ling- Seigneur de la Métaphysique
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Re: Oubli ou pardon ?
comprendre n'est pas pardonner .Stirica a écrit:Comprendre est-il pardonner?
comprendre est la première phase indispensable par laquelle il faut passer ,avant d'éventuellement pardonner?Non?
_athéesouhaits- Seigneur de la Métaphysique
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Re: Oubli ou pardon ?
Je n'ai pas de réponse athéesouhaits, je me pose des questions.
Ling- Seigneur de la Métaphysique
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Re: Oubli ou pardon ?
si, Athésouhaits : comprendre est le premier pas . Mais on ne peut pas tout comprendre .
JO- Seigneur de la Métaphysique
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Re: Oubli ou pardon ?
Je repense souvent au mot de Marc Bloch, historien de l'école des Annales, dans "Apologie pour l'histoire ou le métier d'historien" : "comprendre n'est pas juger".
On doit comprendre, cela est nécessaire, les motivations d'un agent historique car l'histoire fait sens et n'est pas une trame événementielle où se succèdent des faits simplement reliés par l'axe arbitraire de la chronologie. L'histoire est "un secteur d'intersubjectivité" disait Paul Ricoeur dans "Histoire et vérité" où des acteurs posent des valeurs dont ils ne sont d'ailleurs pas toujours les maîtres.
Ce qui ne signifie pas autre chose que l'on se doit de débusquer le sens conscient ou inconscient (même si cela reste problématique de penser interpréter un sens qui se dérobe à la conscience des acteurs) des actes humains.
Les motivations d'un meurtrier doivent être étudiées, les raisons de son acte élucidées et si cela est une nécessité dans l'ordre pénal, cela relève du devoir dans l'ordre philosophique : ne pas vouloir comprendre un acte reviendrait à évacuer le problème du sens et à considérer que les actes humains répondent à un pur mécanisme. Mais que l'on veuille comprendre les actes et les obsessions d'un tyran assoiffé de sang comme Phalaris ou Archélaos, d'un libertin impénitent comme ce cher marquis de Sade, d'un grand seigneur en sorcellerie et en turpitudes diverses comme Gilles de Rais, d'un assassin d'enfant comme Patrick Henry, etc. ne constitue jamais une plaidoirie, ni d'ailleurs un réquisitoire ; il le faut non pour pardonner, mais pour rétablir le sens après un acte qui le brise.
Le pardon est par contre un acte gratuit (non un devoir de la raison qui recherche les raisons) qui n'appartient qu'à la victime et qui se doit d'être accordé à titre grâcieux, il me semble, et plus le préjudice est grave, plus le pardon est difficile à donner. En même temps, plus le préjudice est grave, plus le pardon (s'il parvient à être accordé) est grand et élève l'âme humaine. Les parents du petit Philippe Bertrand ont fait savoir qu'ils ne réclamaient pas la peine capitale pour Patrick Henry, qu'ils ne réclamaient pas "le prix du sang". En soi, ont-ils pardonné ? Je ne sais pas ! Par contre, la souffrance certainement profonde n'a pas engendré ce désir de vengeance pourtant compréhensible ! Ils réclamaient justice (rationalité donc de la peine eu égard au délit) mais aussi et surtout compréhension des motivations de Patrick Henry.
On doit comprendre, cela est nécessaire, les motivations d'un agent historique car l'histoire fait sens et n'est pas une trame événementielle où se succèdent des faits simplement reliés par l'axe arbitraire de la chronologie. L'histoire est "un secteur d'intersubjectivité" disait Paul Ricoeur dans "Histoire et vérité" où des acteurs posent des valeurs dont ils ne sont d'ailleurs pas toujours les maîtres.
Ce qui ne signifie pas autre chose que l'on se doit de débusquer le sens conscient ou inconscient (même si cela reste problématique de penser interpréter un sens qui se dérobe à la conscience des acteurs) des actes humains.
Les motivations d'un meurtrier doivent être étudiées, les raisons de son acte élucidées et si cela est une nécessité dans l'ordre pénal, cela relève du devoir dans l'ordre philosophique : ne pas vouloir comprendre un acte reviendrait à évacuer le problème du sens et à considérer que les actes humains répondent à un pur mécanisme. Mais que l'on veuille comprendre les actes et les obsessions d'un tyran assoiffé de sang comme Phalaris ou Archélaos, d'un libertin impénitent comme ce cher marquis de Sade, d'un grand seigneur en sorcellerie et en turpitudes diverses comme Gilles de Rais, d'un assassin d'enfant comme Patrick Henry, etc. ne constitue jamais une plaidoirie, ni d'ailleurs un réquisitoire ; il le faut non pour pardonner, mais pour rétablir le sens après un acte qui le brise.
Le pardon est par contre un acte gratuit (non un devoir de la raison qui recherche les raisons) qui n'appartient qu'à la victime et qui se doit d'être accordé à titre grâcieux, il me semble, et plus le préjudice est grave, plus le pardon est difficile à donner. En même temps, plus le préjudice est grave, plus le pardon (s'il parvient à être accordé) est grand et élève l'âme humaine. Les parents du petit Philippe Bertrand ont fait savoir qu'ils ne réclamaient pas la peine capitale pour Patrick Henry, qu'ils ne réclamaient pas "le prix du sang". En soi, ont-ils pardonné ? Je ne sais pas ! Par contre, la souffrance certainement profonde n'a pas engendré ce désir de vengeance pourtant compréhensible ! Ils réclamaient justice (rationalité donc de la peine eu égard au délit) mais aussi et surtout compréhension des motivations de Patrick Henry.
Alcibiade- Affranchi des Paradoxes
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Re: Oubli ou pardon ?
c'est super
je fais une phrase
et Alcibiade fait le boulot de développement..
merci Al cibiade..
je fais une phrase
et Alcibiade fait le boulot de développement..
merci Al cibiade..
_athéesouhaits- Seigneur de la Métaphysique
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Date d'inscription : 22/03/2008
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