Sagesse du pluvian
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Scribe
Venez à moi, mes souvenirs
De jadis, des vieilles années :
Comme un herbier de fleurs fanées
Qui en poussière vont finir.
Venez, ciels d’une lointaine île
Où je déambulais, pieds nus :
Ah, que sera-t-il advenu
De vos gens à l’âme subtile ?
Où sont les bras vaillants qui portent
Les barques vers le creux des flots ?
Où sont leurs jeux, où sont leurs mots,
Leur langue serait-elle morte ?
Rien ne revient, tout fait semblant ;
Ce texte se parle à lui-même
(Comme font souvent les poèmes),
Ou bien, il parle au papier blanc.
Brèves de toile
Plusieurs de mes sonnets sont des histoires brèves,
Des portraits esquissés, des propos de saison.
Ma mémoire, envahie par ma vie et mes rêves,
Chaque jour se sature, et déborde à foison.
Personnages venant de tous les horizons,
Dans ce théâtre obscur, vous surgissez sans trêve,
Assis à la taverne, allongés sur la grève,
Ou sagement marchant vers la vieille maison.
Comme une fresque ornant les parois d’une tombe,
Mes mots disent vos traits qui jamais ne succombent
À l’oubli, certes non, telle est votre valeur !
Mais ce goût de narrer à certains jours s’apaise ;
Je me mets en repos, sans que rien ne me pèse,
Pas même le jardin où se fane une fleur.
Auprès d'un puits
Qui sait ce qu'a pu ressentir
Le renard face à la sirène ?
Lui, n'aimant point la forme humaine,
Eut-il donc envie de partir ?
« Rien de mal, lui a dit le vent,
Ne vient de cette forme étrange » .
C'était différent d'un serpent,
Ça ressemblait bien à un ange.
Le destin peut faire un détour
Lorsqu'il veut enchanter ce monde :
Et la mythologie abonde
En énigmatiques amours.
Marionnettes oniriques
Je dors, je rêve : et ainsi je crois voir
Quelques pantins jouant des tragédies,
Quelques épées, quelques lances brandies,
Quelques vieux rois luttant pour le pouvoir.
Un noir criquet les rappelle au devoir ;
Un gris pluvian modère leur folie.
De leurs actions cette nuit est remplie,
Quel jeu dément, quel étrange savoir !
Comme au Guignol où je riais aux larmes
Quand le héros bâtonnait le gendarme,
Je dors, je rêve et me divertis fort.
Bien que riant, mon coeur est un peu sombre :
Il reconnaît ici son propre sort,
Lui, pauvre acteur d'un grand théâtre d'ombres.
Ponce Pilate
Au fils du charpentier, puis-je tourner le dos ?
Je voulais oublier cet homme un peu trop brave ;
Il ne daigne pourtant me laisser en repos,
Pauvres mains, c'est en vain que toujours je vous lave.
Dans mes rêves, j'entends que résonnent ses mots
Qui dévalent en moi comme une rouge lave.
Seul dans l'ombre et le deuil, j'ai toujours le coeur gros ;
La chambre se remplit de démons sans entraves.
Je mettrai sac au dos, j'irai par les chemins,
J'aurai pour me nourrir les rebuts des humains,
Les déchets qu'ils voudront m'accorder en pâture.
Dans l'Empire Romain, marchant à l'aventure,
Je serai menacé de finir sur le bois ;
Mais toute vie sur terre est un chemin de croix.
Avec mes vieux livres
Le rimeur est heureux s’il parvient à songer
Au brillant firmament, à l’éternelle cime
Et à les faire voir en des vers qu’on estime ;
Mais au vaste lexique, il lui faudra plonger.
Les mots ne sont point là pour se faire allonger,
Assemblages entre eux sont avec ou sans rime ;
Ils ne sont point du bois que retouche une lime
Et pour les raccourcir, on ne peut les ronger
Poètes du passé, que ce soit rime ou prose,
Ce que les amateurs de ce siècle composent
Ne prétend nullement vos lauriers mériter ;
Une fois accompli l’exercice de style,
Pour finir, tu diras, ô plume malhabile,
Merci à Du Bellay, qui se laisse imiter.
Paléographe
Au bas d'un parchemin, je lis ton nom : Marie,
Les lettrines y sont rehaussées d'un or fin.
Le scribe fut payé par le Seigneur Dauphin,
Homme d'érudition et de chevalerie.
L'écrit parle d'un ange, et non de diablerie :
Et d'amour, qui peut plus que la soif et la faim,
Mais qui aux coeurs jaloux peut prendre triste fin,
Ou bien par inconstance, ou par friponnerie.
Marie, j'aime ces vers où tu ne fais affront
À nul homme sur terre, où ta plume fait front
Au destin menaçant, au malheur et aux drames.
Tu contemples le ciel, d'étoiles ruisselant :
C'est un spectacle fait pour raffermir ton âme,
Jusqu'au matin, chargé de nuages sanglants.
Ubuesque
Gidouille en quenouille tombant
(Sans que ta force soit flétrie),
Jarry, dans son horlogerie,
Fit ton mouvement titubant ;
D'un morceau de lard de poitrine
Il a pris soin de se munir
Pour te graisser, folle machine
Pouvant les instants retenir,
Machine à transformer les rêves !
Gidouille, apporte mes habits,
Car c'est la fin de la nuit brève,
Le retour au monde engourdi.
Drôle de zèbre
Le zèbre se prend-il pour un cheval barbare ?
Ou croit-il que son oncle était un vieux bison ?
Je pense qu’il est fier des innombrables barres
Qui traversent sa robe, ainsi qu’un fier blason.
Mais ne sont-elles point des cordes de guitare,
Et dans un pareil cas, faut-il un diapason ?
Le zèbre en s’accordant produit un son bizarre,
De garder le silence il aurait bien raison.
Le zèbre est-il un âne ? Un cheval des ténèbres ?
Son arrière-grand-père est-il un tigre-loup ?
A-t-il des dominos en guise de vertèbres ?
Lecteurs, dessinez-moi un zèbre, voulez-vous ?
Soit blanc rayé de noir (c’est conforme à l’usage),
Soit noir rayé de blanc, du fait d’un déphasage.
Sur le trône
Le père Dupanloup, vêtu en majesté
Des habits que jadis porta l’apôtre Pierre,
Prend garde de ne rien laisser traîner par terre
Et que son suspensoir reste bien ajusté.
Sur son trône, il savoure un repos mérité,
Sachant qu’il s’est livré, sous la clarté lunaire,
À des ébats, dit-on, plutôt spectaculaires,
Au gré de son désir toujours ressuscité.
Ô Félix, à bon droit la chronique te vante :
Les nonnes du palais, qui sont plus de cinquante,
Ne disent que du bien de tes pouvoirs divins.
Mais tu rends à présent tes devoirs à l’Église ;
Et, selon l’habitude en ta jeunesse prise,
Tu vides le calice empli du meilleur vin.
Boissons mystiques
Ne buvons pas les étoiles,
C’est un breuvage trop lourd,
Ni le grand soleil que voile
Une brume sans amour.
Buvons des trucs fantastiques,
Buvons du rire et des pleurs,
Du cidre mélancolique
Et du beaujolais en fleur,
Buvons des boissons mystiques.
Ne buvons pas notre extase
Ni nos rêves capiteux ;
Ne buvons ni les topazes,
Ni les rubis nébuleux :
Buvons des trucs magnétiques
Produisant de la lueur
Qui peut rendre magnifique
Notre ordinaire pâleur,
Buvons des boissons mystiques.
Ah ! Ne buvons point l’aurore
Les coteaux ni les vallons,
Ni la lune qui décore
Le rebord de l’horizon ;
Mais buvons, sous les portiques,
Une exotique liqueur,
Buvons des potions magiques,
Nous mettant la joie au coeur,
Buvons des boissons mystiques.
Lisières
Un jour, mais ce n'est rien qu'une somme d'instants ;
L'occasion de franchir plusieurs petits espaces
Qui l'un de l'autre sont parfois fort peu distants :
Aisément, dans ce cas, de l'un à l'autre on passe.
Tel est mon passe-temps, jamais je ne m'en lasse,
Pas plus que les pommiers ne sont las des printemps,
Pas plus que l'Océan ne reste à marée basse :
De la répétition, je ne suis mécontent.
Si tu crains que tout ça ne soit incontrôlé,
C'est vrai, mais n'y vois point de quoi t'en affoler :;
Verse un autre godet, belle cabaretière,
Adresse ton sourire aux buveurs rassemblés
Qui de cet univers aux confins bariolés
Ont découvert, surtout, la rive et la frontière.
Courtisan rimeur
Le poète à la reine adresse des mots doux
Que vient de lui dicter sa muse pateline ;
Tel un pluvian chantant sur la verte colline,
Ou tel, au fond des bois, un ténébreux hibou.
La reine aime les chats, les rhapsodes, les fous ;
Et ce jour-là, de plus, elle est d’humeur badine :
Tournant vers le rimeur son visage d’ondine,
Elle dit à mi-voix : Vous êtes charmant, vous.
Au vieux roi ne restait qu’une modeste flamme ;
Point de quoi réchauffer une exigeante dame,
Un monarque parfois se trouve démuni.
Ce barde courtisan montra bien du courage :
Dans le royal plumard il produisit l’orage,
Redonnant à la reine un morceau d’infini.
Célébration nostalgique
Buvons à la santé des passions endormies,
Aux charmantes erreurs que commit Cupidon,
Aux tendres amitiés qui sont à l’abandon ;
Buvons à notre ardeur, de sagesse ennemie.
D’Éros et de Bacchus la jumelle alchimie
Peut nous faire oublier jusqu’à nos propres noms ;
Ils veulent notre bien, ne leur disons pas non,
Sans boire et sans aimer, le jour n’est qu’infamie.
Venu le temps des fruits, ne reste-t-il des fleurs ?
Auprès de la taverne, admirons leurs couleurs,
Qu’aujourd’hui, sans raison, devienne un jour de fête.
Où s’en ira notre âme au jour de son trépas,
Vous et moi, chers buveurs, nous ne le savons pas,
Au temps même où le corps à défaillir s’apprête.
Dans les montagnes
Un ermite en habit noir,
Un que presque rien ne stresse,
S’abandonne à la caresse
De la brise, vers le soir.
Il ne dit nulle prière,
Son refuge est comme un trou
Tapissé d’un duvet doux,
Ou peut-être de bruyère.
Parfois, quand il est couché,
Il relit les Pages Roses
(C’est un truc qui le repose
Et qu’il trouve assez branché).
Il se fait de bons menus,
Il cuisine sans paresse,
Préparant avec adresse
Des apéros méconnus.
Puis, quand il lui faudra clore
Cet épisode amusant,
Il partira, se grisant
Du renouveau de la flore.
René voit des lucioles
René Char, dans la nuit, voit des lueurs qui volent :
C’est le temps de l’année où brillent les lucioles.
Tel, sur un fond de vase, un vaisseau naufragé,
Il laisse reposer son esprit ravagé.
Il se souvient pourtant d’un étonnant tumulte,
Comparable à celui que font les catapultes
En lançant des rochers sur les châteaux des dieux
Sans même fracturer l’un de leurs rêves bleus.
Que faire ? Aller flâner dans le trèfle obscurci,
Laissant, pour quelque temps, à d’autres le souci
De gérer proprement cette vie évasive,
Traversant une époque un peu morte, un peu vive.
Terre de légendes
Tout au long des vieux quais chemine Piaf-Tonnerre.
Les touristes nombreux vont par petits troupeaux,
S’arrêtant à midi pour manger de l’agneau ;
Les quais vont exhibant le luxe et la misère.
L’oiseau ne vole point, il marche, solitaire,
Il admire le ciel et son reflet dans l’eau ;
Un vénérable banc, dans l’ombre d’un bouleau,
Geneviève debout sur son long pont de pierre,
Et le fleuve chargé de l’écume des jours.
Piaf-Tonnerre, en passant, embrasse la bergère,
(Du haut de sa colonne, on voit les alentours !),
Puis il va, poursuivant son errance légère,
À la Ville Lumière aimant faire la cour,
Comme en usait jadis, aux mêmes lieux, son père.
Village sans prétention
J'aime les vieux trottoirs, les rues mélancoliques,
Les murs dont la grisaille accentue la pâleur,
Le chemin de halage à présent sans haleurs,
Le musée où s'entasse un monceau de reliques.
J'aime, lorsque l'été m'accable de chaleur,
Aller me rafraîchir dans notre basilique ;
J'aime aussi découvrir des recoins bucoliques
Où l'on entend grogner des retraités râleurs.
Lecteur, c'est mon village ; à tous je le préfère
Car il a conservé sa charmante atmosphère,
Qui jamais ne fait voir rien de dur, ni d'amer.
D'autres préféreront les hameaux qui s'étirent
Au long d'une vallée ou d'une vaste mer ;
Mais moi, c'est ce morceau de plaine qui m'attire.
Armoiries quenaldiennes
En haut du bouclier, on lit : Raymond, satrape.
La pointe est de sinople, incomparable émail ;
On n’y voit point la plume, outil de son travail,
Mais un oiseau d’azur et, de sable, deux grappes.
On aurait pu y mettre, au naturel, Priape ;
Le sang de la sirène et son coeur de corail ;
Le fils du charpentier dans l’éclat d’un vitrail
Ou Félix Dupanloup dans sa papale cape ;
Mais rien de tout cela dans l’écu que forgea
L’armurier du Collège, en un temps où déjà
Était passé de mode un trop foisonnant thème.
Tu aurais pu, buvant le vin de ton tonneau,
Tracer sur cet écu, ô mon seigneur Queneau,
Dix puissance quatorze admirables poèmes.
Chevalier inexistant
Son blason est d'azur à deux vaches placides.
Il n'exista jamais, ce noble Chevalier,
Aux lois de l'existence il n'a su se plier,
Ni aux plages d'ennui, ni aux amours torrides.
Il ne connut la soif aux campagnes arides,
Ni les maris jaloux croisés dans l'escalier,
Ni d'un doux serviteur les propos familiers ;
L'on ouvre son armure et l'on voit qu'elle est vide.
Calvino, cependant, à grands coups de pinceau
Fait vivre devant nous l'étrange jouvenceau ;
Fable pour notre temps, récit mélancolique.
Il ne va nulle part, ce redresseur de torts,
Mais en plus des bovins, son écu métallique
Arbore, lumineux, deux candélabres d'or.
Re: Sagesse du pluvian
Elles ont aussi les cornes d'or, c'est pas comme la vache qui rit qui n'est que de gueule et d'argent!!
pierre_b- Maître du Relatif et de l'Absolu
- Nombre de messages : 1214
Localisation : nord du lot
Identité métaphysique : c'est à dire?
Humeur : c'est suivant
Date d'inscription : 09/07/2014
Re: Sagesse du pluvian
Voir
http://heraldie.blogspot.fr/2013/05/la-guerre-des-vaches.html
« La guerre des vaches ».
Re: Sagesse du pluvian
la mise en abyme de la première désespère assurément la seconde...
pierre_b- Maître du Relatif et de l'Absolu
- Nombre de messages : 1214
Localisation : nord du lot
Identité métaphysique : c'est à dire?
Humeur : c'est suivant
Date d'inscription : 09/07/2014
Armes de la muse
La muse a pour blason la très simple peinture
D'une femme qui tient la Lune (un croissant fin)
Sous le regard d'un monstre (ou serait-ce un dauphin ?)
Et qu'accompagne aussi un centaure immature.
Nulle écharpe d'argent ne tient lieu de ceinture
À sa robe flottant dans la brise, sans fin,
Nul archange n'est là, nul troll, nul séraphin,
Ils s'en sont tous allés vers d'autres aventures,
Le troll veut acheter du camembert normand,
L'archange doit sauver la Belle au bois dormant,
Le séraphin flâner sur les bords de la Seine.
Parle-nous maintenant de tes enchantements :
Es-tu la fée des vers ou celle du roman ?
-- Moi ? Je suis, chers buveurs, la muse clunisienne.
Re: Sagesse du pluvian
Cluny c'étaitles clefs et les épées
pierre_b- Maître du Relatif et de l'Absolu
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Humeur : c'est suivant
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