Sagesse du pluvian
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Oiseau de proie
« De nobles ancêtres me viennent
D’inimitables qualités ;
Mon renom, je l’ai mérité,
Et la grandeur qui est la mienne.
Sache que mes pareils détiennent
Sur les tiens, la priorité ;
Cette évidente vérité,
Il convient que tu la retiennes ».
Ainsi parlait un prédateur
Imitant les prédicateurs ;
Je l’écoutais sans lui répondre.
Un coq lui dit alors « Crois-moi,
Des oiseaux plus futés que toi,
Mes poulettes peuvent en pondre. »
Petit dieu sans nom
Je suis sans gloire et sans fortune,
J’affronte mille adversités ;
Moi, l’anonyme, le raté,
Le gibier de fosse commune…
Nulle prêtresse, blonde ou brune,
Ne m’honore de ses bontés ;
Pour mes nuits je ne puis compter
Que sur les faveurs de la lune.
Braves mortels, oubliez-moi,
À d’autres donnez vote foi ;
À ceux sur lesquels on s’appuie.
Moi qui suis le Dieu du Souci,
Je n’ai plus rien à faire ici ;
Il est donc temps que je m’enfuie.
Cette fleur s’éveille
De plus en plus courtes les nuits,
L’hiver est mort, nul ne le pleure ;
Chacun se lève de bonne heure,
Un nouvel espoir nous conduit.
Cette fleur me parle sans bruit,
Elle découvre sa demeure ;
Les pierres qui jamais ne meurent
Lui racontent le temps qui fuit.
Lumineuses sont ses pensées,
Optimistes et fort sensées ;
Elle savoure ses plaisirs.
Son langage est fait de silence,
C’est un chemin vers l’excellence ;
Car c’est la langue du désir.
Village qui flotte
Loin de leur rivage natal,
Ils suivent leur route incertaine ;
Aucun d’entre eux n’est capitaine,
Ce manque n’est pas capital.
La nef de pierre et de métal
Vogue vers des terres lointaines ;
Or, les sirènes, par centaines,
Saluent ce monstre occidental.
La vie à bord n’a rien d’épique,
Même dans l’air chaud des tropiques ;
Nul n’y fait de rêves dorés.
Comme sur une caravelle,
Des pavillons sont arborés,
Symboles d’une ère nouvelle.
Olifant d’azur
Cor en deuil, sa peine est profonde,
À l’entendre mon coeur se fend ;
Lui qui jadis fut triomphant,
Il se meurt, le chagrin l’inonde.
Dans ce vallon, l’orage gronde,
Nous tremblons, comme des enfants ;
Plus personne ne se défend
Contre nos assaillants immondes.
Je frissonne, tel un pantin
Entre les mains d’un plaisantin ;
C’est la fin de mon épopée.
Je ne suis plus un combattant,
Car ma vigueur s’est estompée ;
J’étais rempli d’espoir, pourtant.
Source magique
Ici débute un flot modeste,
Plus vif au printemps qu’en été ;
D’une amphore il est projeté,
Ce courant frais, rapide et leste.
On dit que la Dame Céleste
Ce vrai prodige a concocté ;
C’est ce que l’on m’a rapporté
Chez le tavernier, Maître Alceste.
Cette eau, qui ne sert presque à rien,
De l’entendre me fait du bien ;
C’est comme des murmures d’anges.
Bien-être que j’aime éprouver,
C’est mon âme qui boit et mange
Dans un paradis retrouvé.
Licorne obscure
Sobres sont les plaisirs
De la licorne sage ;
Car ses rares désirs
Ne sont que de passage.
Discrets sont ses loisirs
Qu’abritent les ombrages ;
Elle sait en choisir
Qui personne n’outragent.
Des maîtres chevronnés
Sur elle ont raisonné ;
Ils ne sont plus que poudre…
Ils n’ont plus de souci
Ni plus rien à résoudre ;
C’est vrai pour elle aussi.
Comte à plumes
Ce seigneur vint de l’autre rive,
Un vent du Ponant le portait ;
Sa douce oiselle l’escortait,
Très sage et nullement craintive.
Même sans humeur combative,
La vie, sans crainte, il affrontait ;
L’argent jamais il ne comptait,
Le laissant fuir comme une eau vive.
N’ayant nul désir de grandeur,
Ce bel oiseau se laissait vivre,
Armé d’humour et de candeur.
Aujourd’hui, voilà qu’il nous livre
Quelques pensées sans profondeur ;
C’est ce qu’il fait quand il est ivre.
Sire poisson volant
Poisson survolant la rivière,
Guettant le retour de l’été ;
Il sait planer, il sait sauter,
Il a d’excellentes manières.
Son âme est clairvoyante et fière,
Il sait du monde les beautés ;
Il est par le vent transporté,
Comme un panache de poussière.
Il règne sur un grand empire,
Des grands monarques il s’inspire ;
Il parle avec tous les oiseaux.
Les rois de la terre l’envient,
Des reines sont par lui ravies ;
Dans les flots sera son tombeau.
Entrée clandestine
Portail d’un improbable lieu,
Peut-être d’un sombre inframonde ;
Ou la Jérusalem seconde
Qui se dresse au plus haut des cieux.
Je cherche, j’ouvre bien mes yeux,
J’agrandis mes pupilles rondes ;
Dans ma perplexité profonde,
J’attends la réponse de Dieu.
Un message très imprécis
Figure dans un vieux récit ;
Ce qui était obscur le reste.
Tant pis, je me laisse porter,
Avec ou sans divinité,
Vers l’ombre infernale ou céleste.
Emplumé nocturne
Lorsque la lune est pleine,
Tu me vois, tu souris ;
Je traque les souris,
Leur âme est dans la peine.
Leur défaite est certaine,
Leurs espoirs sont taris ;
Car plus d’une a péri,
Tant pis pour ces vilaines.
La vie n’est pas un jeu ;
Tu t’en doutais un peu,
Toi qui es philosophe.
Ce n’est pas un roman,
Ça n’en a pas l’étoffe ;
On avance en ramant.
Sagesse du palmier
Je suis vieux, mais je reste vert,
Car je suis un être inlassable ;
J’aime la lumière et le sable,
J’habite au pays sans hiver.
Ici n’est nul serpent pervers,
Rien que des lézards respectables ;
Les vents ne sont pas redoutables,
Ni les castors, ni les piverts.
Moi qui n’ai guère de mérite,
Je vis ma vie en sybarite ;
Les humains sont mes protecteurs.
Pour eux sont mes fruits salutaires,
Dont je les ai faits légataires ;
Mangez, aimables prédateurs.
Planète Polyèdre
Un astre comme on n’en voit pas,
Sauf quelquefois dans un mirage ;
Son air est couleur de cirage,
Air qui ne se respire pas.
Fait à la règle et au compas,
Ce corps me semble un découpage ;
C’est un vaisseau sans équipage,
Un spectre porteur de trépas.
Planète sans rien pour séduire,
Il ne pourra rien s’y produire ;
Elle navigue sans raison.
Jadis, l’auteur de plusieurs crimes
En fit un antre illégitime ;
Il a mal choisi sa maison.
Fantôme d’un dragon
Sur moi la vie n’a plus de prise,
Car mon corps s’est évaporé ;
Tu vois mon feu décoloré,
Tu vois tomber des cendres grises.
Je me dissipe dans la brise,
Moi que l’absence a dévoré ;
Rien ne sert de le déplorer,
Rien ne sert que tu l’analyses.
Où sont mes sentiments d’amour,
Où sont les plaisirs de l’alcôve ?
Tout baigne dans un brouillard mauve.
Où est ma langue de velours,
Où est partie mon âme pure ?
Dieu répond, en paroles dures.
Saint Jacques le Mince
Il n’a cure des apparences,
Il accepte les coups du sort ;
Ce saint ménage ses efforts
Tout en ayant de l’endurance.
Vaine est du démon l’assurance,
Il admet qu’il est dans son tort ;
Il se débat, il griffe, il mord,
Il est vaincu par la souffrance.
Jacques l’invite en sa maison,
Du vin nouveau c’est la saison ;
Leurs deux soifs seront assouvies.
Ensemble ils boivent, dans la nuit ;
Ils ont une forte eau-de-vie
De mirabelle, un très bon fruit.
Auprès d’un autre arbre
Dans l’ombre des rameaux
Croissent les jeunes pousses ;
Viennent les brises douces,
Voici le renouveau.
Un faune dit trois mots
À la dryade rousses ;
Ces deux-là, sur la mousse,
Grignotent un morceau.
L’elfe dans la prairie
S’agite, saute et crie ;
Il rêve d’un tournoi.
Une coupe à ses lèvres,
Du miel sur tous ses doigts,
Il danse avec le lièvre.
Diable qui vit en ermite
Un démon solitaire
Veut agir saintement ;
Dois-je penser qu’il ment,
Ou qu’il dit vrai ? Mystère.
Il dit qu’il est sincère,
Il en est désarmant ;
Oui, mais, pour le moment,
Ça reste un adversaire.
Il adopte un pourceau
Qu’il prénomme Marceau ;
Un cochon bien vulgaire.
Quand j’entends discuter
Ces deux petits futés,
Je ne les comprends guère.
Navire au loin
Un pavillon qui se déploie,
Vieux marins, par le soleil cuits ;
Nef, comme un gibier qui s’enfuit,
En mer sont des vaisseaux de proie.
À bord, douze filles de joie,
Diablesses dont le regard luit ;
Le capitaine veut, pour lui,
Du rhum où le tourment se noie.
Pour équiper ce bâtiment
Il s’est endetté gravement
Envers ses quelques amoureuses.
Il ne franchira plus leur seuil,
De crainte d’un mauvais accueil ;
Son âme en est bien malheureuse.
Jour et nuit
Un clair soleil se lève,
C’est le début du jour ;
Le scribe dans sa tour
Transcrit les mots d’un rêve.
L’astre suit son parcours,
Sans pauses, même brèves ;
Il chemine sans trêve,
En allant au plus court.
Survolant son empire,
Il passe, il nous inspire,
Sans donner de leçons.
Puis l’ombre se propage,
Nous tournons une page ;
Nous nous assoupissons.
Carali voit un éléphant
Ce pachyderme fait la fête,
Il est hilare, il est faraud ;
Il s’enivre un peu, mais pas trop,
Lui qui se prend pour un poète.
Tu vois, c’est une brave bête,
Un compagnon frais et dispos ;
Dans le labeur, dans le repos,
Il ne se prend pas trop la tête.
À la sombre métaphysique
Il préfère un peu de musique ;
Il vibre à des airs langoureux.
Nous admirons son indolence,
Son sens de l’ordre rigoureux
Et son aptitude au silence.
Poisson Croquemitaine
Je suis plus fort qu’une Armée Rouge,
Plus fort qu’un empereur chinois ;
L’océan tourne autour de moi,
Il m’accompagne quand je bouge.
Mon père fut un fort carouge,
À son trépas je devins roi ;
Je promulgue de justes lois,
S’appliquant même dans les bouges.
Mes ennemis sont pourchassés
Par des requins que j’ai dressés ;
Nul ne se risque à les combattre.
Quand la Mort viendra m’emporter,
Ils sauront me réconforter ;
Je quitterai ces eaux saumâtres.
Manuel de métaphysique
Prose que j’avais ignorée,
J’y passe quelques bons moments ;
Je lis, mais sans acharnement,
Cette oeuvre fort bien inspirée.
Je m’en amuse sacrément,
Plusieurs fables y sont narrées ;
L’auteur, contre vents et marées,
Livre son âme franchement.
Dans ce long recueil de pensées
Se trouvent des phrases sensées ;
Mais d’autres s’en vont de travers.
Cet auteur, qui n’a rien de mièvre,
Est un créateur d’univers ;
En la matière il est orfèvre.
Je plane
Loin des noires fumées,
Je glisse au long du jour ;
Mon âme est affamée
De gloire, et puis d’amour.
Ma danse accoutumée
M’entraîne en mille tours ;
Même des noirs vautours
Ma présence est aimée.
Vive la liberté !
L’espace illimité,
C’est ma seule maîtresse.
Je suis fier, je suis fort,
Le vent qui me caresse
Adoucira ma mort.
Calice de flammes
Es-tu rassasié,
Roi cruel, roi de gloire ?
Que désire-t-il boire,
Ton imposant gosier ?
Le peuple extasié
Te prie dans la nuit noire ;
Ils font de toi mémoire,
Allumant des brasiers.
L’ermite a des pensées
Pour sa vie délaissée ;
Tu es son seul espoir.
Quelques démons farouches
Lancent des regards louches ;
Il brandit un miroir.
Au bocage
Voici l’oiseau du bocage,
Qui toujours fait bande à part ;
Ses souvenirs sont épars,
Jamais il ne les partage.
Il parle un obscur langage,
Un dialecte léonard ;
Il n’est d’ailleurs pas bavard,
Ça lui donne l’air d’un sage.
Quant à ses amours, ma foi,
Cela change tous les mois ;
Ce sont vaines amourettes.
Il n’a guère de soucis ;
De ce qu’il fit jusqu’ici,
Nulle chose il ne regrette.
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