Sagesse du pluvian
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Ladysan
Cochonfucius
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L'ange et le blé
image de l'auteur
L’ange vagabondant de surprise en surprise
Voit le blé dont certains tirent le corps de Dieu ;
Cent mille tiges d’or ondulent sous les cieux,
Mille petits moineaux y dansent à leur guise;
Ange, combien pour toi de choses non apprises !
Toi qui étais toujours resté dans ton milieu,
Des prodiges nouveaux se montrent à tes yeux,
La noirceur des raisins, la rougeur des cerises.
Toujours un peu perdu, ton lent chemin tu suis,
Encombré, qui plus est, d’un bout de pain bien cuit,
(À table,ce matin, tu étais de service).
Ange, ne va donc pas te faire du souci :
Tu n’as pas aujourd’hui d’emploi du temps précis,
Laisse, autour de ton corps, passer le temps qui glisse.
Bicoq de sable
image de l'auteur
Le coq à double face a rêvé de la mer
Et des pâles étoiles,
Des nuages de feu qui planent dans l’éther
Et des anges sans voiles.
Un chant surgit alors de son torse gonflé
Comme une cornemuse,
Il déclame des mots que n’a jamais soufflés
Aucune voix de muse.
Une poule attentive, au lieu de se cacher,
Entend cette romance ,
Le coq, par sa présence, est quelque peu touché,
Alors, il recommence.
Deux chiens d'argent
image de l'auteur
Les chiens d’argent, portant leur regard vers la nue,
Savourent les parfums par avril soulevés.
Leur ventre est bien rempli, leurs désirs abreuvés,
D’hiver est oubliée la vieillesse chenue.
Dans le sous-bois désert, nulle proie n’est venue,
Et les oiseaux n’ont point commencé à couver ;
Biche et cerf, très bientôt, iront se retrouver,
Ils vont, pour leur plaisir, goûter l’herbe menue.
Les chiens l’ont bien compris, leur maître est bon pasteur,
Aimant s’aventurer, le soir, sur les hauteurs,
Ou rêver, dans la nuit, seul, tout auprès des ondes.
D’une main secourable il saura soutenir
Cet univers tout neuf, ce globe en devenir,
Mais qui se montre prêt pour être un joli monde.
Hermine et poulpe
image de l'auteur
Le poulpe croit voir un miroir
Dans cette lune aux couleurs d'Anne ;
Il la prend pour signe d'espoir.
-- Ô poulpe, astronome profane,
Pour la lune as-tu de l'amour ?
Je crains qu'il ne soit sans retour.
-- Qui donc s'en vient me sermonner ?
-- C'est le crabe, c'est ton dîner.
Lune et Bouddha
image de l'auteur
Un pur éclat baignant le grand fleuve et ses rives,
Le Bouddha, séparé de tous ses êtres chers,
Reste assis dans la nuit, oublieux de sa chair,
Sans que nul biographe à ce propos n’écrive.
Nul parchemin jauni, nulle image d’archives,
Juste un arbre chantant dans le courant de l’air,
Juste la vieille lune et son visage clair ;
Juste, auprès de cette onde, une image pensive.
Puis, quelques fleurs offrant leur parfum, par bouffées,
Puis des sombres crapauds la clameur étouffée,
Et de plus, des odeurs et des bruits inconnus.
Le Bouddha donne alors cette leçon exquise :
-- Âme que la routine a peut-être conquise,
Profite de l’instant pour te remettre à nu.
Animaux du jardin
image de l'auteur
Les bêtes du jardin, sans craindre l’anathème,
Se moquent de l’archange et des doux séraphins,
Leur faisant avaler de grands verres de vin
Afin de les pousser à dire des blasphèmes.
Aucun arbre chez moi ne donne des olives,
Et le sol est bien dur pour s’y mettre à genoux ;
Chaque soir, on entend la plainte du hibou,
Procurant à chacun une frayeur bien vive.
Mais au matin, le jour est brillant, et si beau
Qu’on le dirait fertile, et chargé de promesses ;
Alors, les animaux vont entendre la messe
Dans la chapelle au sol parsemé de rameaux.
Archange-lion
image de l'auteur
Sans trop rugir, ni faire de scandale,
L’archange-lion s’en vient planer là-bas,
Semblant porter un monde entre ses bras,
Toujours serein et d’une humeur égale.
Son coeur ne craint aucune issue fatale ;
La saison change, et ne l’affecte pas,
N’ayant souci de sommeil, ni repas,
Tout imprégné de rigueur monacale.
Ne réclamant caresse ni baiser,
Ne laissant pas son âme s’embraser,
Il ne lui faut qu’un peu de poésie.
Il est passé près de nous ce matin,
Ne disant rien sur nos futurs destins,
Car il les laisse à notre fantaisie.
Planète des renards
image de l'auteur
J’ai rêvé que j’errais au Pays des Renards,
Pas du tout rassuré, car j’étais un lézard ;
Ne sachant si, pour eux, ma chair était impure,
Je courus me cacher au milieu des ordures.
J’hésitais à m’enfuir en suivant les égouts
(Pour lesquels, sachez-le, je n’éprouve aucun goût),
Et je finis par suivre un sentier séculaire
Dont la pierre tiédie ne pouvait me déplaire.
Les renards de ce lieu se nourrissaient de choux,
Ne dévorant pas plus un lézard qu’un hibou ;
J’ai, quand on me l’a dit, repris mon assurance,
Et suivi mon chemin pour retourner en France.
Coq-loup d'azur
image de l'auteur
Ne sachant si sa vie est victoire ou défaite,
Le vieux coq-loup d’azur se fait une raison ;
Tout un sombre dimanche, il reste en sa maison,
Profitant des bienfaits d’une douce retraite.
Évoquant rarement sa carrière imparfaite,
Il voit dans son jardin se suivre les saisons ;
Sa course qui s’en vient à sa terminaison
Traversera bientôt de nouveaux jours de fête.
Il est bon de ne plus se soumettre au labeur,
D’errer par les chemins, de cultiver des fleurs ;
À chaque temps convient sa juste part d’ouvrage.
Plus défilent les jours, plus je trouve à mon goût
D’être, à son domicile, un très ancien coq-loup,
Ayant quitté Paris pour de lointains parages.
Nef de Garonne
image de l'auteur
En Garonne est la nef de la mysticité
Dont l'équipage est fait de trolls presque invisibles ;
Ils chantent en chemin leur dieu ressuscité,
Ou d'autres grands héros qu'on trouve dans leur Bible.
La Garonne au printemps est un peu rafraîchie
Par la brise qui vient du ciel éblouissant,
Et la trollesque nef, vaillamment s’élançant,
Propage leur chanson, ainsi qu'une élégie.
Aux rives de Garonne est un très ancien cloître,
Moines en leurs jardins s'abreuvent de bon vin ;
Les trois trolls, vus de loin, leur paraissent divins,
Dans la douce clarté qui commence à décroître.
Nef du lac
image de l'auteur
La nef du lac se glisse entre soleil et lune,
Entre le soleil d’or et la lune d’argent.
Elle navigue bien, le lac est indulgent
Où danse, quelquefois, une algue verte ou brune.
La saison printanière est la plus opportune
Pour capter le reflet des beaux poissons nageant
D’un bord à l’autre bord de ce monde changeant,
Quand les fleurs des pommiers se fanent, une à une.
Poissons, léger troupeau qui n’a pas de berger,
Qu’il est plaisant de voir vos mouvements légers
Dans les eaux du grand lac ombragé de collines !
Poissons, tels des oiseaux qui n’ont pas de chanson,
Vous donnez à cette onde un fugitif frisson ;
Vous semblez écouter la parole divine.
Bouddha-monstre
image de l'auteur
Le Bouddha-monstre accepte un verre aux jours de fête,
Ouvrant une bouteille et trinquant avec moi ;
Notre humeur s'améliore, et nous savons pourquoi,
Chacun sait deviner ce que l'autre souhaite.
Non pas autant que lui, mais je prends des couleurs,
Mais lui, c'est amusant, il est rouge cerise ;
Abandonnant soudain ce monde sans surprise,
Nous méditons parmi les cerisiers en fleurs.
Une chanson nous vient, bien étrangement née
Sous le regard discret des arbres ébahis
Qui croient qu'elle est issue d'un étrange pays ;
Au jardin lui répond une grive étonnée.
Cadran des bicoqs
image de l'auteur
Passent les instants invisibles,
Au loin s’endorment les oiseaux,
Reviennent des instants nouveaux,
Que la nature est insensible !
Les bicoqs, de leur chant terrible,
Éveillent la terre et les eaux ;
À l’horizon passe un vaisseau,
Ce jour, la mer est bien paisible.
La mer, c’est la vie et la mort,
C’est un destin dans chaque port,
Ce sont des coeurs à marée basse;
Chantez donc, bicoqs inconstants,
Ne retenez pas les instants :
Qu’est-il donc, le temps, s’il ne passe ?
L'oiseau Janus
image de l'auteur
L'oiseau Janus s'envole, et se rit des tempêtes,
Il en a grand plaisir en son doux coeur qui bat,
Quand le ciel est très haut, et l'océan très bas,
L'oiseau Janus est fait pour, toujours, tenir tête.
D'autres jours, quand le flot est doux comme une femme,
Il laisse gravement les nuages passer,
Au souffle d'une brise heureusement bercés ;
Poséidon se calme et modère ses lames.
Quand les jours sont ainsi, quand flâne au long des grèves
Une nymphe vêtue de charmantes couleurs,
L'oiseau veut devenir un serpent tentateur,
Offrant une sardine à cette nouvelle Ève.
Le troll des lyres
image de l'auteur
Troll des lyres, tu fais ici le bel esprit,
Cela, c’est un talent que j’aimerais apprendre ;
Tant de subtilités que j’aimerais comprendre,
Tant d’aspects du réel que je n’ai pas compris !
Au moins, ne traite pas mon cas par le mépris,
J’aime dire des vers à qui veut les entendre,
Et j’aime surtout ceux, comme on peut s’y attendre,
Des rimeurs du passé, dont je suis fort épris.
Et sans cet aliment, comment pourrais-je vivre,
Sans ce nectar divin que je trouve en mes livres,
Sans l’immortel Ronsard, pour ne nommer que lui ?
Donne-moi des leçons, si tu veux, troll des lyres,
Conte des fabliaux qui me feront bien rire ;
Ensuite, on ne rit plus, dans l’éternelle nuit.
Sagesse triple
image de l'auteur
Le Bouddha de jadis est de souvenirs plein,
Il les tient bien en ordre, et jamais ne s'en plaint ;
Ces reflets vagabonds qui dans son coeur gravitent
Lui donnent, au contraire, un plaisir sans limite.
Le Bouddha du futur, écoutant les ténèbres,
N'entend ni chant joyeux, ni complainte funèbre ;
Il n'y trouve ni l'oeil d'un perfide ennemi,
Ni celui d'un démon qui de rage frémit.
Le Bouddha du présent n'éprouve nul effroi,
Il parle avec douceur, et plaisante avec moi :
Parfois c'est un Bouddha, mais parfois, c'est un ange
Qui répète les mots de ce poème étrange.
Paysage en trois couleurs
image de l'auteur
Au ciel, je vois passer la licorne charmante,
Je ne me lasse point d’icelle regarder ;
De sa bonne santé, mon coeur la complimente,
Croyant qu’elle pourra dans le ciel me guider;
Les animaux de sable ont bravé la tourmente,
Je les vois défiler en un trot saccadé ;
Ils ne redoutent pas la bourrasque inclémente,
Ni leur sort de ce jour, qui semble un jeu de dés.
En inframonde sont des maisons fort petites,
Leurs habitants, prudents, bien rarement les quittent,
Par crainte qu’un sorcier ne prenne leur portrait.
La Pentecôte vient, et ses langues de flammes
Qui des trois univers vont mélanger les âmes,
Il sera temps de boire un petit vin bien frais.
Un ange double
image de l'auteur
Cet ange vient des lieux dont les chimères viennent,
On ne sait s’il accède à la réalité ;
Il se tient dans les airs, où les sylphes se tiennent,
Je l’ai vu, l’autre jour, en train de méditer.
Inspire-moi des vers, toi qui dans l’éther voles,
Traduis-moi les propos de ce bel oiseau blanc ;
Ou trace sur les cieux, de ton bras bénévole,
Un mot pour rassurer mon pauvre coeur tremblant.
Tu peux même chanter une chanson débile,
Que les fous comme moi, j’en suis sûr, aimeront ;
Je la retranscrirai d’un pinceau malhabile
Pour amuser les rois, les ducs et les barons.
Octopode au corps de sable
image de l'auteur
Ce grand monstre de sable est superbe, à mes yeux ;
Il parcourt, bien souvent, ces modestes parages,
Invisible la nuit, grâce à son noir pelage,
Faisant régner la paix sur la terre et les cieux.
Je suis presque surpris de le voir en ces lieux :
Il est évanescent, c'est peut-être un mirage,
C'est une métaphore évoquant le courage,
C'est un représentant de la grâce de Dieu.
Les gens de mon pays ne le connaissent guère,
Car, sur de tels sujets, ils ont d'autres repères,
Il n'est rien à leurs yeux, pour parler franchement.
Je le sais, je suis vieux, mes rêves sont fragiles,
Mon corps, qui se souvient que sa chair est d'argile,
Ne peut point rajeunir, si ce n'est en dormant.
Gardienne du sanctuaire
image de l'auteur
Une gardienne, en sentinelle,
Hante ce temple dévasté ;
Surveillant l'amphore éternelle
Venant d'une autre immensité.
Des jardins sont perdues les bornes,
lls peuvent sembler infinis ;
Leurs arbres sont bien gris et mornes,
Porteurs d'un feuillage jauni.
Veille toujours, vestale nue,
Tremblante sous le bel azur ;
Ton coeur s'envole dans les nues
Pour rencontrer les anges purs.
Buisson de sinople
image de l'auteur
Ce buisson de sinople au désert peut survivre ;
La sève est pourtant rare au creux de ses vaisseaux.
Dans la nuit, on entend les démons se poursuivre,
Jamais, à cette plante, ils ne donnent l’assaut.
Loin du val qui fleurit et que l’averse enivre,
Cet arbuste a choisi le sable pour berceau.
L’herboriste Linné le raconte en un livre
Où quelques rois du monde ont apposé leur sceau.
Le vent sec lui conserve une belle jeunesse,
Il voit venir le soir sans crainte ni tristesse ;
Il pense que pour lui, le ciel fut indulgent.
Il aime savourer le parfum de la brise.
Il est bien accroché, par sa racine grise,
Aux profondeurs du sol, à l’espace, et au temps.
Combat sans armes
image de l'auteur
L’arme de la vestale est le désarmement,
C’est son armure aussi, ce sont ses armoiries ;
Mais l’arme du démon n'est que bouffonnerie,
Qui, le jour du combat, s’exerce vainement.
L’arme de la vestale est le respect des morts,
Mais l’arme du démon, c’est le goût du naufrage,
Cest le torrent qui veut fracasser le barrage ;
Cette arme à son porteur réserve un triste sort.
L’arme de la vestale est le goût de l’espoir,
Mais l’arme du démon n’est qu’un flacon d’absinthe
Dont il tire souvent des joyeusetés feintes,
Puis se soumet, bien ivre, à l’approche du soir.
.
Dernière édition par Cochonfucius le Dim 24 Avr 2016 - 16:53, édité 1 fois
Nef des plumitifs
image de l'auteur
La nef des plumitifs navigue sur mer belle,
Je les vois, tout le jour, tracer des textes brefs ;
Aucun d’eux ne commande, aucun d’eux n’est leur chef,
Car s’ils en avaient un, tous deviendraient rebelles.
Entre eux ne survient point l’ombre d’une querelle :
Ni sur telle façon de gouverner la nef,
Ni sur les aliments, ni sur d’autres griefs,
Car ils sont, l’un à l’autre, infiniment fidèles.
Ils grimpent sur les mâts, sans craindre le vertige,
Disant que chaque plume est la robuste tige
Qui peut porter sans fin le poids d’un homme fort ;
Puis ils ont, pour leur tâche, un respect véritable,
Si vous en voyez un qui n’est plus à sa table,
Ses braves compagnons vous diront qu’il est mort.
Un chef pensif
image de l'auteur
Ce chef, dans son jardin, rumine une pensée
Qui, du moins le croit-il, jadis lui fut lancée ;
Il l’a presque perdue, la retrouve pourtant,
Toute neuve, soudain, comme un fruit de l’instant.
Quelle est donc sa valeur, une page au hasard,
Un texte un peu obscur, peu digne d’un regard,
Mais il n’y pourra rien, il se tient sous le charme
D’un mot qui fait briller dans son oeil une larme.
Chef de gueules
image de l'auteur
Ce chef de coq ne quitte pas des yeux
Un octopode à grimaçante bouche ;
Si, entre eux deux, commençait l’escarmouche,
Quel fier combat sous la face des cieux !
Chacun des deux, entraîné de son mieux,
Attend, figé, que l’ennemi le touche
Pour répliquer, en un geste farouche ;
Depuis trois jours, ils occupent ces lieux.
Ils vont rester pendant trois jours encore,
Tremblant la nuit, rosis par les aurores,
Peut-être bien pendant quatre ou cinq jours ;
Si l’un des deux la victoire s’assure,
Il quittera sa condition obscure
Et deviendra grand évêque de Cour.
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