Restreindre sa volonté futur au nom de sa volonté présente ?

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Message par Invité Mar 16 Sep 2008 - 1:21

Bonjour,

je poste ici ce message qui est une suite à une question apparue incidemment dans un autre fil de discussion [l'Alzheimer "violeur" dans General Libre].

Il s'agit du questionnement philosophique suivant :

- Si je suis déterminé dans le présent à aimer/détester certaines choses, suis-je fondé (et dans ce cas, au nom de quoi ?) à établir dès à présent des contraintes qui perdureront jusque dans le futur pour rechercher/éviter les choses en question, Y COMPRIS DANS LE CAS OU JE SAIS QUE DANS LE FUTUR, MON GOUT POUR CES CHOSES AURA RADICALEMENT CHANGE ?

Exemple :

- Actuellement, je déteste les poireaux, et si je devais être hospitalisé en longue durée, à supposer que cela soit faisable, j'exigerais de ne jamais manger de poireaux (on va admettre que c'est faisable, ok ?).

- Mais, si ma maladie était une maladie de longue durée consistant en un amour immodéré, irrationnel, et contraire à mes habitudes, pour les poireaux, ne serait-il pas plus sage, au fond, d'anticiper sur ce changement de ma nature et demander à ce que, dans ce cas, on me serve tout le temps des poireaux ?

C'est un problème très particulier mais néanmoins très vaste.

A priori, on peut estimer que, non, je n'ai pas à exiger pour mon futur des choses différentes de ce que j'estime bon dans mon présent, sans quoi cela veut dire que j'avalise par avance toutes les aliéniations dans lesquelles je peux tomber.

Voyons le autrement.

Si je sais que je vais devenir aveugle dans un an (par exemple, j'ai une maladie qui me fait perdre progressivement la vue, et j'en connais la vitesse de propagation), y a-t-il plus de sens à garder les livres de ma bibliothèque ou à se recréer une bibliothèque de livres en Braille ?

Apparemment qu'il faut revendre ses livres et acheter du Braille.

Le principe qu'on fait agir en cette circonstance est : << Si tu sais qu'une situation X doit se présenter de manière stable à l'avenir, agis dans le présent d'après l'avenir que tu sais inéluctable >>.

Mais, supposons que je doive devenir aveugle dans un an, mais que je sache que je retrouve la vue dans deux ans (on pourrait imaginer un mal qui aurait cet effet). Dans ce cas, il ne serait pas judicieux de revendre ma bibliothèque.

Pas nécessaire pour autant d'invoquer un deuxième principe qui contrebalance le premier, c'est toujours le même principe qui est à l'oeuvre [appelons-le << Principe temporel >>] :

- Si je dois redevenir voyant un an après être devenu aveugle, je dois raisonner dans le futur de cécité d'après la norme du futur encore postérieur où je suis de nouveau voyant. Donc, pour le présent, c'est le futur le plus postérieur, qui est aussi le plus stable, qui détermine mon action morale.

Il semble donc que le Principe Temporel suffit à donner une assise solide à l'action dont je dois me prévaloir en prévision de l'avenir. Si cela est ainsi, alors je serais fondé, dès à présent, à considérer comme mienne toutes les lubies que je n'ai pas actuellement, mais que j'aurai une fois aliéné mental, si dans l'avenir je dois devenir aliéné mental A LA SEULE CONDITION QUE CETTE ALIENATION SOIT IRREVERSIBLE.

Cela découle de ce qu'on a établi antérieurement. Pour le revoir autrement, si l'aliénation est irréversible, ces choses que je ne goûte pas présentement, j'en serai alors fada, donc, je dois considérer que ma volonté sera de les aimer alors, et que cette volonté sera sans diminution de ma personnalité, mais du seul fait d'un << changement >>.

En revanche, dans le cas où l'aliénation n'est pas irréversible, ma volonté devrait être considérée comme étant diminuée, puisque, sitôt revenu à mon état antérieur, je ne goûterai plus ces choses aimées du fait de la maladie.

Cependant, le principe n'est valable que pour les actions à long terme, comme de vendre sa bibliothèque... Pour celui qui va être aveugle pendant un an et un an seulement, acheter quelques livres en Braille qu'il revendra est une action logique, et, en ce sens, si l'on adresse les actes qui sont A COURT TERME, il nous faut un Principe différent.

Voilà.

Si cette réflexion vous inspire quelque chose, écrivez ici. Etes-vous d'accord ou en désaccord ? Les réflexions que je priserai le plus sont celles qui prendront un tour philosophique : d'esprit ouvert, traquant les implicites, et raisonnant de manière hypothético-déductive.

A bientôt !

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Message par Geveil Mar 23 Sep 2008 - 8:32

Oh là, làààààà !!!!

Pourrais-tu synthétiser ?

Ta question n'est-elle pas là pour "remettre en question" le conseil des sages, " apprendre à vivre dans le présent" ?
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Message par Wooden Ali Mar 23 Sep 2008 - 9:12

Bonjour à tous,,
Un livre traite de ce problème : "Stumbling on Happiness" de Daniel Gilbert. Livre très brillant et profond qui a été traduit récemment en français : "Et si le bonheur vous tombait dessus"* chez Robert Laffont.
Cet universitaire américain démontre avec force expériences que:
Nous sommes incapables d'imaginer et de préparer l'avenir en ne subissant pas une forte influence de ce que nous sommes et ressentons au présent.
Ce que nous imaginons du futur est fait d'éléments dont la plupart sont futiles en oubliant ceux de réelle importance.
Nous sommes dans l'incapacité de savoir ce qui nous fera plaisir et nous intéressera dans le futur.
On est plus que jamais dans l'aphorisme :" la prédiction est une science bien difficile surtout quand elle concerne le futur !"
La conclusion n'est pas très optimiste car, selon l'auteur, notre quête du bonheur est vouée intrinsèquement à être décevante à cause de notre impuissance à prévoir qui nous serons réellement dans le futur. Notre seule consolation étant de savoir pourquoi !
* J'espère que la traduction du livre est meilleure que celle du titre qui devrait être pour être plus exacte : "Trébucher sur le bonheur"

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