Sagesse du pluvian
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Le vin vieux
Ce breuvage nous rend splendides,
Il dissout nos songes morbides ;
Buveur, souviens-toi que le vin
Vient d’un sacrifice divin.
C’est narré dans les Écritures ;
À la fin de son aventure,
Le corps du Fils devient le pain,
Et son sang, le vin des copains.
Puis il eut d’invisibles ailes
Pour voler vers les cieux changeants ;
Un chroniqueur nous le rappelle.
Buvez donc ce vin, braves gens,
Il vous mène au pays des rêves ;
Ainsi vos souffrances s’achèvent.
Planète Banale
Nous n’avons nulle mine d’or,
Nulle flore phénoménale ;
Sur notre Planète Banale,
Chacun de nos désirs s’endort.
C’est très calme, au point que c’est mort,
Même dans la saison vernale ;
Pris d’une langueur infernale,
L’esprit décourage le corps.
Les libidos sont abolies ;
Au fond du calice est la lie,
Peu nous en importe le goût.
La planète en l’espace roule,
Les châteaux de cartes s’écroulent ;
Il faut avancer, jusqu’au bout.
Dragon subtil
Le cosmos en pièges abonde,
Je sais en démêler les fils ;
Car je suis le Dragon Subtil
De ces lieux et de l’inframonde.
Je parle et des voix me répondent
Qui m’avertissent des périls ;
Mes ennemis, nobles ou vils,
Iront dans la fosse profonde.
Je suis fort, ce n’est pas étrange,
Car j’ai des ailes, comme un ange ;
Je vaux mieux que tous mes pareils.
Si ma propre cause je plaide,
C’est que j’en reçus le conseil ;
Une muse vint à mon aide.
Oiseau du souvenir
Auprès d’une oiselle-déesse
Vécut cet oiseau langoureux ;
Échangeant des mots amoureux,
Ils ont vécu dans la paresse.
Ce fut leur commune sagesse,
D’être avec peu de chose heureux ;
Car, de presque rien désireux,
Ils évitaient toute détresse.
De belles plumes revêtus,
Ils s’efforçaient à la vertu ;
Ce fut une tâche légère.
Le Destin n’est pas sans merci,
Qui n’offre pas que des soucis,
Mais aussi des joies passagères.
Mer Noire
Notre nef, c’est notre héritage,
C’est notre petit univers ;
Car nous sommes des gens de mer,
Gens de vagues et de nuages.
Nous sommes un bel équipage,
Avec une santé de fer ;
Sans craindre le Ciel ni l’Enfer
Nous déployons notre courage.
Rien de plus beau que ce vaisseau
Quand du monde il part à l’assaut ;
Les sirènes sont sous le charme.
Les marins savent que, pour eux,
Le flot n’est pas trop rigoureux ;
Ce n’est pas une mer de larmes.
Ma plume
Ma plume de céphalophore
Ne sait trop ce qu’elle produit ;
Un dieu fantasque la conduit
De catachrèse en métaphore.
De lourds fantasmes s’élaborent
Aussi bien le jour que la nuit ;
De l’amusement, de l’ennui,
Des souvenirs, que sais-je encore !
Tout cela ne va pas bien loin ;
Ces mots ne comblent nul besoin,
C’est un inoffensif délire.
Tout cela n’est pas d’un grand poids ;
Qu’importe ! À ta santé je bois,
Toi qui viens ici pour me lire.
Roi sans soif
Cette dynastie va s’éteindre,
Car le fil en sera tranché ;
Un noir destin viendra faucher
Ce royal corps, je peux le craindre.
Aucune soif ne peut m’atteindre,
Au vin je ne veux plus toucher ;
Les flacons resteront bouchés,
Personne n’osera s’en plaindre.
Toute grandeur est abolie ;
Ce ne fut que noblesse vaine,
Insondable mélancolie.
Mes héritiers sont dans la peine,
Ils râleront, ça leur ressemble ;
Les gens s’en moquent, dans l’ensemble.
Fontaine tiède
Cette ville est presque endormie,
Sauf quatre pigeons langoureux ;
La fontaine est leur grande amie,
Dont le bruit leur est savoureux.
Le temps s’est mis à l’accalmie,
L’air est doux dans les coins ombreux ;
Ici nul tort, nulle infamie,
C’est assez simple d’être heureux.
Chante ton chant, fontaine tiède,
Ta rengaine qui nous obsède ;
J’écoute et je n’écoute pas.
Je vois, à travers mes paupières,
Le rouge soleil du trépas ;
Mon coeur est froid comme une pierre.
Arbre muet
Le plus taciturne, c’est moi,
Car des taiseux je suis le maître ;
Je ne fais pas semblant de l’être,
Car de cet art je suis le roi.
C’est un grand art, et je le dois
À mes vénérables ancêtres ;
Respecté du chêne et du hêtre,
Je les aide à se tenir droits.
Ma dryade est à mon service
Et ne m’entraîne point au vice ;
Mais son regard est plein d’amour.
Qu’importe comment on me nomme,
Qu’importent les propos des hommes,
Moi qui suis muet, je suis sourd.
Saint Tartempion
Je chemine d’un coeur léger,
Nulle peur ne trouble mon âme ;
Le démon peut cracher des flammes,
Je sais comment m’en protéger.
J’aime marcher, j’aime songer
Aux yeux d’une lointaine Dame ;
J’aime le rire, et non les drames,
Et j’aime aussi boire et manger.
La vie est faite pour qu’on aime,
J’ai lu cela dans un poème ;
J’y repense en me promenant.
J’avance au gré de mes envies,
Qui rarement sont assouvies ;
Je vais me taire, maintenant.
Grand Lac
Au long de la rive déserte,
La nef se hâte avec lenteur ;
Et nous n’avons pour spectateurs
Que deux ou trois grenouilles vertes.
La nef progresse en pure perte,
Au gré d’un bien faible moteur ;
Cet inutile caboteur
N’est plus très vif, ni très alerte.
Qu’importe ce vagabondage,
En vain s’useront les cordages ;
Les marins dormiront bientôt.
Qu’importe la nef en délire ?
Pour le meilleur et pour le pire,
Nous resterons sur ce bateau.
Vents contraires
Les vents sont changeants, quelquefois,
Entre eux surgit la zizanie ;
L’atmosphère a d’étranges lois,
Fort instable est son harmonie.
L’un veut le chaud, l’autre le froid,
Car leurs forces sont désunies ;
Ils font un peu n’importe quoi,
La logique en semble bannie.
Aucun vent ne suit nos désirs,
Mais seulement son bon plaisir ;
Ils s’expriment sans retenue.
Aimons la pluie et le beau temps,
Aimons les forces inconnues ;
Que vive ce monde flottant !
Blancheur du cygne
Je suis un messager de gloire,
Je suis le contraire d’un porc ;
Je suis le Cygne au noble corps,
Sans une seule tache noire.
Merlin le dit en son grimoire,
Je suis des oiseaux le plus fort ;
Ma voix ressemble au son du cor,
Mon pouvoir n’est pas illusoire.
Prends garde à ne pas m’offenser,
Car ce serait être insensé ;
Réfrène ton âme démente.
Noble est mon coeur, noble est mon sang ;
Je suis au rang des plus puissants,
Même, une reine est mon amante.
Rat qui médite
J’exerce mon entendement
À l’heure où les ombres s’allongent ;
J’ai des aliments, que je ronge,
Je passe le temps plaisamment.
Dans un souvenir je me plonge,
Lequel me fait l’effet d’un songe ;
C’est du plaisir, c’est du tourment,
C’est intense, et c’est désarmant.
Je veux me connaître moi-même ;
Les résultats sont imprécis,
Pourquoi pas, la vie est ainsi.
Je jongle avec de vieux problèmes,
J’hésite, je suis indécis ;
Je mélange les théorèmes.
Planète des moines
Ici vivent des cénobites
Venus d’autres mondes lointains ;
À l’heure où le soleil s’éteint,
Se déroulent d’augustes rites.
J’entends les psaumes qu’ils récitent,
Je crois bien que c’est du latin ;
J’entends les cloches du matin
Qui à bien vivre nous invitent.
Un peu de pain, quelques poissons,
Un choix d’excellentes boissons,
Impeccable est le réfectoire.
Quelques tonneaux dans le cellier,
Puis des bouteilles, par milliers ;
Non, ce n’est pas la mer à boire.
Chien subtil
J’aime la pluie et le soleil,
J’aime le sable et la rivière ;
Nous ne buvons jamais de bière,
Ni moi-même, ni mes pareils.
Mon maître aime le vin vermeil
Qu’offre la belle tavernière ;
Il le dit porteur de lumière
Et facilitateur d’éveil.
Je trouve ça dans l’eau, pourtant,
Ce rayonnement éclatant
Grâce auquel je suis un génie.
Mais ce n’est là qu’un sentiment ;
Tu m’absoudras bien gentiment
Pour cette mégalomanie.
Minolion perdu
Dans un dédale je me traîne,
Que je ne peux apprivoiser ;
Dans ces couloirs entrecroisés,
Ma pauvre âme n’est point sereine.
J’aurais dû rester dans la plaine,
À sagement me reposer ;
Aphrodite m’a proposé
Cette épreuve ; qu’elle est vilaine !
Je m’égare dans des détours
En ces ténébreux alentours,
Bien loin du Pays des Merveilles.
Reverrai-je le bleu du ciel ?
Non, personne sur moi ne veille
En ces instants sacrificiels.
Sirène solitaire
Je suis la sirène seulette,
Je me nourris d’air et de sel ;
J’observe les oiseaux du ciel
Et l’océan qui les reflète.
Je bavarde avec une mouette,
J’écoute chanter un pétrel ;
Je l’appelle « beau ménestrel »,
Ensuite je reste muette.
Dans peu de temps viendra le soir
Et par la suite il fera noir ;
J’irai dans une grotte ombreuse.
Les vaisseaux rentreront au port ;
Pour de vénales amoureuses
Les marins quitteront le bord.
Fructification miraculeuse
Ce plaisant fruit nous fait envie,
Mais ne soyons pas obstinés ;
Car, s’il ne nous est pas donné,
Dionysos ailleurs nous convie.
Une fringale inassouvie,
Nous n’en serons guère peinés ;
Comme le disent nos aînés,
Il faut faire avec, c’est la vie.
Cueillons d’autres fruits, par milliers,
De ceux qui nous sont familiers ;
Notre pitance accoutumée.
Rien ne sert d’être fort gourmands ;
Nous résisterons sobrement
À la tentation parfumée.
Porte vers l’été
Porte admirable, en vérité,
S’ouvrant vers le monde d’Alice ;
Au ciel un blanc nuage glisse,
Qui jamais ne peut s’arrêter.
Nul chagrin ne doit subsister
Dans cet univers sans malice ;
Suave est le vin du calice,
Quel bonheur de le déguster !
On fait la fête, on se régale,
Notre pitance est sans égale ;
Ce sont les dieux qui l’ont voulu.
Notre été sera sans histoires,
Car nos ennuis sont révolus ;
Adieu donc, sombre purgatoire.
Trinité modeste
trinity
Nous sommes trois dieux nonchalants,
L’univers nous remarque à peine ;
Nous semons des paroles vaines,
Ce n’est rien de désopilant.
Nous n’avons créé nul Adam,
Désertique est notre domaine ;
Aucune Vierge Souveraine,
Aucun Charpentier Transcendant.
Rien pour nous ne compte beaucoup
Sinon de boire quelques coups
Au bar, en face de l’église ;
C’est là que tu peux nous trouver,
Parmi des humains dépravés ;
Nous avons soif, qu’on se le dise !
Objet magique
Voici la corne fructifère,
Généreuse, été comme hiver ;
Elle abonde en trésors divers,
C’est excellent pour tes affaires.
Tu auras ce que tu préfères,
L’objet te donne le feu vert ;
Parle en prose ou bien parle en vers,
Car ce détail nous indiffère.
Jamais tu ne seras bredouille ;
Plus chanceux que les orpailleurs,
Tu as du luxe, et du meilleur.
J’en connais qui le sous-sol fouillent,
Celui d’ici ou bien d’ailleurs ;
Laissons creuser ces niquedouilles.
Silence d’une fleur
Ma candeur est inégalée,
Moi qui suis la fleur sans souci ;
Comme il en fut toujours ainsi,
Chacun le sait dans la vallée.
Jamais je ne suis affolée,
Tout est pour moi net et précis ;
L’oiseau le sait, l’insecte aussi,
Qui me chantent à la volée.
Qu’ai-je à faire de ma beauté ?
Je suis la fleur de chasteté,
Telle une vestale en son temple.
Qu’ai-je à faire de ma vertu ?
L’été vient, le printemps s’est tu,
Mon silence est à son exemple.
Papillon nostalgique
Je fus heureux dans mon enfance,
Je suis un peu vieux, maintenant ;
Sans que cela soit surprenant,
Je suis à présent sans défense.
Ma vie n’est qu’une impermanence,
Du jour de son commencement ;
Mon corps se défait, doucement,
Dans une aimable nonchalance.
Moi qui jamais ne fus très fort,
Mon présent s’appelle inconfort ;
J’accepte ça,comme un vieux sage.
Rien ne me fut jamais acquis ;
J’ai pris, comme n’importe qui,
Deux ou trois plaisirs au passage.
Poisson sobre
fish
Je suis buveur d’eau, par nature,
Elle qui me rend pur et beau ;
Je n’imite pas le corbeau
Qui dévore les grappes mûres.
J’avale un bouillon de culture,
J’y trouve tout ce qu’il me faut ;
De l’authentique, rien de faux,
La plus excellente pâture.
Je ne suis pas un ruminant
Et moins encore un abstinent ;
Je ne consomme rien d’étrange.
L’eau, dans son retour éternel,
Comble tous mes besoins charnels ;
Tu me vois plus heureux qu’un ange.
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