Le corps et la conscience.
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Le corps et la conscience.
Vous aurez certainement de quoi m'aider dans cette réflexion...
Ai-je un corps ou suis-je mon corps ?
Si je parviens à répondre à la question, il aura bien fallu que j’aille chercher la réponse en moi, c'est-à-dire dans l’antre qui contient ma conscience. Je ne peux concevoir que cette conscience, ou cette raison, soit une entité extérieure que je vais saisir dans mon environnement pour m’en servir. Ma conscience est incarnée. Ma réflexion est inséparable de mon corps, elle y est enracinée comme dans une terre. Mon corps est par conséquent un support, une enveloppe mais il est aussi un « filtre » par lequel toutes les expériences viennent à mon cerveau. Si je peux penser à mon corps, c’est bien parce que je le ressens, je le perçois, j’en reçois également une image. Par contre, il est évident que cette image évolue avec le temps et l’accumulation des expériences. Ce corps n’est pas figé et la conscience que j’en ai fluctue.
Si ces changements surviennent, c’est également que je ne suis pas seulement ce corps, comme une pierre est une pierre, mais que je dispose d’une capacité consciente à « m’extraire » de ce corps pour l’identifier. Ma conscience est par conséquent indépendante de ce corps, elle ne lui est pas seulement inhérente, elle n’est pas intrinsèquement englobée, elle a un pouvoir d’auto réflexion. Elle reçoit les informations reçues par le corps, elle les analyse mais elle a en plus la capacité à conscientiser ce processus. J’ai conscience de ma conscience. Ma conscience n’est pas qu’un récepteur comme peut l’être un ordinateur en état de marche, elle a également le pouvoir d’observer l’expérience et l’expérimentateur… D’avoir conscience de lui, indépendamment du corps. Dans cette situation là, le corps n’est plus le support de l’identité mais l’objet étudié qui permet à la conscience de prendre forme. Je ne suis pas mon corps, j’ai un corps qui me sert d’objet d’expérience afin d’offrir à ma conscience un piédestal.
Ca n’est pas pour autant que ce corps est méprisable et doive être considéré comme un fardeau dont il faut que la conscience se libère. Ca serait absurde, comme une lobotomie sensorielle. A quoi me servirait-il d’analyser ma conscience auto réflexive s’il n’y a aucune expérience à laquelle je puisse me référer ?
Il n'y a pas de conscience sans corps.
"Corps et conscience font un". Pour Spinoza, l'esprit et le corps ne constituent qu'une seule et même substance, une imbrication constante entre le champ d’expérience de la pensée (l'esprit) et le champ sensoriel (le corps).
Pour des philosophes matérialistes comme Diderot ou Nietzsche, la conscience est une simple extension de l'organisme. Les neurologues aujourd'hui déterminent ce que je pense et ce que je ressens qu’en fonction de notre corps. Il semblerait par conséquent que je ne sois qu'un corps qui « raisonne ».
Ma conscience pense "je suis", mais sans pouvoir se passer du récepteur corporel. On pourrait donc valider la phrase et dire "je suis un corps".
Pour Descartes, la conscience, bien qu'étroitement unie au corps, est radicalement distincte de lui. « Je ne suis pas mon corps. »
"La conscience est abstraite". Lorsque je pense "je suis", ma conscience se saisit elle-même comme conscience, en faisant abstraction de mon corps. La conscience du corps n’est qu’une option secondaire. Le corps n'est donc qu'un des objets parmi d'autres qui peuvent occuper la conscience. Descartes est intransigeant et ne veut pas être assimilé à un corps qui souffre et qui lui échappe…
Lorsque je pense, je n'ai pas conscience de mon corps et je n’en ai même pas besoin. Ma conscience et mon corps sont donc distincts et pour Descartes on doit dire "j'ai un corps". Le dualisme cartésien se sert du dualisme chrétien. Il n’y a qu’à lire Schopenhauer pour juger des dégâts…Mesdames, cachez-vous, ne tourmentez pas les consciences supérieures des mâles… Beurk…
Bon, la conscience est donc incarnée, la conscience et le corps ne font qu'un. Je m’en tiens à cette idée.
Il serait illusoire d'imaginer que la conscience puisse être abstraite, totalement coupée du corps. La psychanalyse essaie bien d’ailleurs de réconcilier la conscience et le corps, le moi (ou le surmoi) et l'inconscient, afin de permettre à l'individu de vivre dans la plénitude. Il n’y a aucun « ennemi » en soi, il n’y a que des entités ignorées, par éducation, conditionnement ou traumatismes.
Le zazen travaille également dans cette voie. La maîtrise du corps favorise le développement de la conscience. Il n’est pas question de s’extraire du corps mais de l’éprouver pleinement, en totale conscience, avec amour et cette expérimentation génère un état de conscience sublimé.
On peut s’interroger maintenant sur les états de conscience modifiée déclenchés par des situations particulières.
Les NDE ou d’autres situations moins extrêmes.
Ai-je un corps ou suis-je mon corps ?
Si je parviens à répondre à la question, il aura bien fallu que j’aille chercher la réponse en moi, c'est-à-dire dans l’antre qui contient ma conscience. Je ne peux concevoir que cette conscience, ou cette raison, soit une entité extérieure que je vais saisir dans mon environnement pour m’en servir. Ma conscience est incarnée. Ma réflexion est inséparable de mon corps, elle y est enracinée comme dans une terre. Mon corps est par conséquent un support, une enveloppe mais il est aussi un « filtre » par lequel toutes les expériences viennent à mon cerveau. Si je peux penser à mon corps, c’est bien parce que je le ressens, je le perçois, j’en reçois également une image. Par contre, il est évident que cette image évolue avec le temps et l’accumulation des expériences. Ce corps n’est pas figé et la conscience que j’en ai fluctue.
Si ces changements surviennent, c’est également que je ne suis pas seulement ce corps, comme une pierre est une pierre, mais que je dispose d’une capacité consciente à « m’extraire » de ce corps pour l’identifier. Ma conscience est par conséquent indépendante de ce corps, elle ne lui est pas seulement inhérente, elle n’est pas intrinsèquement englobée, elle a un pouvoir d’auto réflexion. Elle reçoit les informations reçues par le corps, elle les analyse mais elle a en plus la capacité à conscientiser ce processus. J’ai conscience de ma conscience. Ma conscience n’est pas qu’un récepteur comme peut l’être un ordinateur en état de marche, elle a également le pouvoir d’observer l’expérience et l’expérimentateur… D’avoir conscience de lui, indépendamment du corps. Dans cette situation là, le corps n’est plus le support de l’identité mais l’objet étudié qui permet à la conscience de prendre forme. Je ne suis pas mon corps, j’ai un corps qui me sert d’objet d’expérience afin d’offrir à ma conscience un piédestal.
Ca n’est pas pour autant que ce corps est méprisable et doive être considéré comme un fardeau dont il faut que la conscience se libère. Ca serait absurde, comme une lobotomie sensorielle. A quoi me servirait-il d’analyser ma conscience auto réflexive s’il n’y a aucune expérience à laquelle je puisse me référer ?
Il n'y a pas de conscience sans corps.
"Corps et conscience font un". Pour Spinoza, l'esprit et le corps ne constituent qu'une seule et même substance, une imbrication constante entre le champ d’expérience de la pensée (l'esprit) et le champ sensoriel (le corps).
Pour des philosophes matérialistes comme Diderot ou Nietzsche, la conscience est une simple extension de l'organisme. Les neurologues aujourd'hui déterminent ce que je pense et ce que je ressens qu’en fonction de notre corps. Il semblerait par conséquent que je ne sois qu'un corps qui « raisonne ».
Ma conscience pense "je suis", mais sans pouvoir se passer du récepteur corporel. On pourrait donc valider la phrase et dire "je suis un corps".
Pour Descartes, la conscience, bien qu'étroitement unie au corps, est radicalement distincte de lui. « Je ne suis pas mon corps. »
"La conscience est abstraite". Lorsque je pense "je suis", ma conscience se saisit elle-même comme conscience, en faisant abstraction de mon corps. La conscience du corps n’est qu’une option secondaire. Le corps n'est donc qu'un des objets parmi d'autres qui peuvent occuper la conscience. Descartes est intransigeant et ne veut pas être assimilé à un corps qui souffre et qui lui échappe…
Lorsque je pense, je n'ai pas conscience de mon corps et je n’en ai même pas besoin. Ma conscience et mon corps sont donc distincts et pour Descartes on doit dire "j'ai un corps". Le dualisme cartésien se sert du dualisme chrétien. Il n’y a qu’à lire Schopenhauer pour juger des dégâts…Mesdames, cachez-vous, ne tourmentez pas les consciences supérieures des mâles… Beurk…
Bon, la conscience est donc incarnée, la conscience et le corps ne font qu'un. Je m’en tiens à cette idée.
Il serait illusoire d'imaginer que la conscience puisse être abstraite, totalement coupée du corps. La psychanalyse essaie bien d’ailleurs de réconcilier la conscience et le corps, le moi (ou le surmoi) et l'inconscient, afin de permettre à l'individu de vivre dans la plénitude. Il n’y a aucun « ennemi » en soi, il n’y a que des entités ignorées, par éducation, conditionnement ou traumatismes.
Le zazen travaille également dans cette voie. La maîtrise du corps favorise le développement de la conscience. Il n’est pas question de s’extraire du corps mais de l’éprouver pleinement, en totale conscience, avec amour et cette expérimentation génère un état de conscience sublimé.
On peut s’interroger maintenant sur les états de conscience modifiée déclenchés par des situations particulières.
Les NDE ou d’autres situations moins extrêmes.
Thierry- Maître du Temps
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Date d'inscription : 03/06/2009
Re: Le corps et la conscience.
Voilà un élément de réflexion:
lorsque deux particules élémentaires s'unissent pour former un nouvel élément, il y a jouissance ( pure hypothèse, à prendre ou à laisser, mais si le psychisme n'existait pas d'emblée dans la matière, comme pourrait-on expliquer que le psychisme apparaisse à partir d'une certaine complexité des structures DITES vivantes ??? )
Le nouvel élément est plus que la simple réunion des particules qui le composent. Il possède une sorte de mémoire de la jouissance éprouvée lors de l'union, cette mémoire est une vibration qui éloigne et rapproche périodiquement les composants. Cette vibration est aussi à l'origine d'une sensation élémentaire.
Tel est le début de la conscience.
Dans un organisme complexe, comme l'homme, ce qui fait la vie, ce sont aussi des unions et des séparations, à savoir, lorsque par exemple la rétine est touchée par un photon, il y a une sorte d'union entre le photon et les batonnets, puis, un courant électrique se propage le long du nerf optique, et au bout, il y a une sorte d'union entre ce courant et un ou plusieurs neurones, qui eux mêmes poussent des dentrites et lorsque deux dentrites se rencontrent, ça forme un synapse, etc..C'est à cette rencontre entre deux synapses que naît la sensation lumineuse.
Le cerveau est strucuré de telle sorte que des variations dans l'ensemble des sensations provoquent un état de conscience. ( Voir mon post ICI
De cette approche résulte que la conscience est toujours conscience de quelque chose, et qu'il y a toujours un changement quelque part, que ce soit dans le corps ou à l'extérieur.
De ce fait, la conscience ne peut être conscience d'elle même.
Pourtant, on parle bien de la conscience de soi !
Certes, mais il n'y aurait pas conscience de soi, s'il n'y avait pas tous ces mouvements dans le corps et en particulier dans le cerveau. La conscience de soi n'est alors rien d'autre que la conscience de sa mémoire.
Mais attention, la conscience n'EST PAS la mémoire, la conscience est ce qui se passe lorsque ça bouge à l'intérieur ou à l'extérieur.
Si la conscience n'est pas la mémoire c'est qu'elle est hors du temps. C'est une notion très difficile à avaler, aussi abstraite que la théorie de la relativité, et pourtant, c'est comme ça.
Pour essayer de faire comprendre ce concept, je reprends l'exemple du photon. Entre le moment où il sort d'une source lumineuse et atteint la rétine, ensuite le moment où une impulsion circule dans le nerf optique et l'impression lumineuse qui en résulte, il s'est passé du temps; donc, l'impression lumineuse N'EST JAMAIS ce qui se passe en réalité, au moment où elle se produit. Ce qui lui a donné naissance est déjà passé. C'est en ce sens que je dis que la vie, et en particulier la conscience, sont toujours au présent.
Mais alors, qu'est-ce que le corps?
Le corps est une mémoire, et le souvenir ce qui apparaît quand on explore cette mémoire.
Mais qui est-ce " on"? En effet, c'est une entité qui s'est introduite subrepticement. C'est pourquoi je préfère dire " le souvenir " est ce qui apparaît lors de certains mouvements de la mémoire.
lorsque deux particules élémentaires s'unissent pour former un nouvel élément, il y a jouissance ( pure hypothèse, à prendre ou à laisser, mais si le psychisme n'existait pas d'emblée dans la matière, comme pourrait-on expliquer que le psychisme apparaisse à partir d'une certaine complexité des structures DITES vivantes ??? )
Le nouvel élément est plus que la simple réunion des particules qui le composent. Il possède une sorte de mémoire de la jouissance éprouvée lors de l'union, cette mémoire est une vibration qui éloigne et rapproche périodiquement les composants. Cette vibration est aussi à l'origine d'une sensation élémentaire.
Tel est le début de la conscience.
Dans un organisme complexe, comme l'homme, ce qui fait la vie, ce sont aussi des unions et des séparations, à savoir, lorsque par exemple la rétine est touchée par un photon, il y a une sorte d'union entre le photon et les batonnets, puis, un courant électrique se propage le long du nerf optique, et au bout, il y a une sorte d'union entre ce courant et un ou plusieurs neurones, qui eux mêmes poussent des dentrites et lorsque deux dentrites se rencontrent, ça forme un synapse, etc..C'est à cette rencontre entre deux synapses que naît la sensation lumineuse.
- Spoiler:
- C'est très approximatif sur le plan scientifique, mais l'idée est qu'il y a sensation lorsqu'il y a rencontre.
Le cerveau est strucuré de telle sorte que des variations dans l'ensemble des sensations provoquent un état de conscience. ( Voir mon post ICI
De cette approche résulte que la conscience est toujours conscience de quelque chose, et qu'il y a toujours un changement quelque part, que ce soit dans le corps ou à l'extérieur.
De ce fait, la conscience ne peut être conscience d'elle même.
Pourtant, on parle bien de la conscience de soi !
Certes, mais il n'y aurait pas conscience de soi, s'il n'y avait pas tous ces mouvements dans le corps et en particulier dans le cerveau. La conscience de soi n'est alors rien d'autre que la conscience de sa mémoire.
Mais attention, la conscience n'EST PAS la mémoire, la conscience est ce qui se passe lorsque ça bouge à l'intérieur ou à l'extérieur.
Si la conscience n'est pas la mémoire c'est qu'elle est hors du temps. C'est une notion très difficile à avaler, aussi abstraite que la théorie de la relativité, et pourtant, c'est comme ça.
Pour essayer de faire comprendre ce concept, je reprends l'exemple du photon. Entre le moment où il sort d'une source lumineuse et atteint la rétine, ensuite le moment où une impulsion circule dans le nerf optique et l'impression lumineuse qui en résulte, il s'est passé du temps; donc, l'impression lumineuse N'EST JAMAIS ce qui se passe en réalité, au moment où elle se produit. Ce qui lui a donné naissance est déjà passé. C'est en ce sens que je dis que la vie, et en particulier la conscience, sont toujours au présent.
Mais alors, qu'est-ce que le corps?
Le corps est une mémoire, et le souvenir ce qui apparaît quand on explore cette mémoire.
Mais qui est-ce " on"? En effet, c'est une entité qui s'est introduite subrepticement. C'est pourquoi je préfère dire " le souvenir " est ce qui apparaît lors de certains mouvements de la mémoire.
Geveil- Akafer
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Date d'inscription : 18/05/2008
Re: Le corps et la conscience.
nous avons sans doute plusieurs corps, qui s'interpénètrent comme l'eau, l'air, imprègnent une éponge. (Je le répète, c'est une théorie, mais que je trouve très cohérente). Ce qu'est notre conscience, je n'en sais rien. Mais elle serait dans les niveaux plus subtils. Notre corps le plus lourd serait le physique, puis l'énergétique qui le structure, puis l'émotionnel qui anime l'énergie, puis la pensée qui essaie de "dompter" l'émotionnel....
Donc si le corps "astral" (= énergétique+émotionnel+pensée) quitte la corps physique, il peut encore être le siège de cette fameuse conscience. Cela ne résout pas le problème, sauf que cela explique les NDE et les bilocations.
Donc si le corps "astral" (= énergétique+émotionnel+pensée) quitte la corps physique, il peut encore être le siège de cette fameuse conscience. Cela ne résout pas le problème, sauf que cela explique les NDE et les bilocations.
Invité- Invité
Re: Le corps et la conscience.
notre corps se souvient, à notre insu , et pourtant, cette mémoire est inconsciente, quoiqu'inscrite dans le corps matériel: une sensation la réveille. C'est vrai: le mouvement réveille la conscience de soi . Ce corps est moi. Je ne l'ai pas, je l'imprègne, comme décrit Leela . Ma mémoire est donc moi, même si je n'ai pas conscience de moi .
JO- Seigneur de la Métaphysique
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Date d'inscription : 23/08/2009
Re: Le corps et la conscience.
Bon, ça fait dix fois que je relis ton post Gereve...Je suis largué...Mais j'y arriverai :)
Thierry- Maître du Temps
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Date d'inscription : 03/06/2009
Re: Le corps et la conscience.
leela a écrit:nous avons sans doute plusieurs corps, qui s'interpénètrent comme l'eau, l'air, imprègnent une éponge. (Je le répète, c'est une théorie, mais que je trouve très cohérente). Ce qu'est notre conscience, je n'en sais rien. Mais elle serait dans les niveaux plus subtils. Notre corps le plus lourd serait le physique, puis l'énergétique qui le structure, puis l'émotionnel qui anime l'énergie, puis la pensée qui essaie de "dompter" l'émotionnel....
Donc si le corps "astral" (= énergétique+émotionnel+pensée) quitte la corps physique, il peut encore être le siège de cette fameuse conscience. Cela ne résout pas le problème, sauf que cela explique les NDE et les bilocations.
J'avais lu un développement semblable je crois dans "la source noire" de Van Eersel, ça me plaît beaucoup comme vision. Gurdjieff aussi "découpait" le corps, faudrait que je replonge là-dedans. Je suis un peu aux alouettes en ce moment, du mal à me recentrer...Décompression, on va dire, je suis en vacances ! :)Demain ski, après ça ira mieux. pour votre participation, je vais tenter de comprendre tout ça.
Thierry- Maître du Temps
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Date d'inscription : 03/06/2009
Re: Le corps et la conscience.
oui, Thierry, cette façon de "diviser" le corps est assez fréquente, quoique les "divisions" diffèrent. C'est comme les couleurs de l'arc en ciel, tu eux dire qu'il y en a 6, 7 ou 1000....
L'ouvrage le plus fantastique sur le sujet, parmi ceux que j'ai lus, est "la cosmogonie des roses croix" de Max Heindel. A déguster lentement... Il parle de l'évolution de la conscience, depuis une conscience collective "l'esprit de groupe" vers une conscience individuelle... C'est une brique, passionnante. C'est une "théorie", mais très, très intéressante.
L'ouvrage le plus fantastique sur le sujet, parmi ceux que j'ai lus, est "la cosmogonie des roses croix" de Max Heindel. A déguster lentement... Il parle de l'évolution de la conscience, depuis une conscience collective "l'esprit de groupe" vers une conscience individuelle... C'est une brique, passionnante. C'est une "théorie", mais très, très intéressante.
Invité- Invité
Re: Le corps et la conscience.
Merci Leela mais si c'est une "brique "théorique" il vaut mieux que je m'abstienne pour l'instant...Mais je note, je note :)
Mais les "roses croix", c'est pas le nom d'un groupe religieux ou un truc dans le genre ? J'ai déjà entendu ça quelque part.
Mais les "roses croix", c'est pas le nom d'un groupe religieux ou un truc dans le genre ? J'ai déjà entendu ça quelque part.
Thierry- Maître du Temps
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Date d'inscription : 03/06/2009
Re: Le corps et la conscience.
Gereve, bravo pour ton point de vue, très proche du mien. Je crois qu' il est illusoire de vouloir séparer le corps et la conscience. Ils sont pour moi substantiellement liés , la conscience imprégnant la moindre parcelle de matière . Comment la conscience prend-elle conscience
d' elle-même?A partir d' un certain niveau d' organisation . On a refusé la conscience à nos amis les bêtes pendant des millénaires ; on n' en doute plus maintenant . Jusqu' à quel niveau animal pouvons-nous descendre avant de perdre cette " conscience de conscience "?
d' elle-même?A partir d' un certain niveau d' organisation . On a refusé la conscience à nos amis les bêtes pendant des millénaires ; on n' en doute plus maintenant . Jusqu' à quel niveau animal pouvons-nous descendre avant de perdre cette " conscience de conscience "?
bernard1933- Aka Tpat
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Date d'inscription : 23/03/2008
Re: Le corps et la conscience.
religieux, non, disons que c'est un "mouvement philosophique" ou qui "initie aux lois de la vie". Il y avait les anciens R+C, et de nouvelles branches (AMORC, Max Heindel) qui ont repris la tradition. J'ai suivi les "Max Heindel" (très différents de "AMORC") pendant quelques années. Ils n'ont pas les caractéristiques d'une secte (pas de pression, pas question d'argent...) j'y ai rencontré des gens vraiment rayonnants, cultivés, ouverts. Finalement, la seule chose que j'en ai retenu, c'est cette "cosmogonie": je n'ai jusque maintenant pas trouvé d'autre hypothèse plus plausible pour expliquer notre évolution, la nature de nos émotions, pensées, etc. C'est une "brique", mais pas théorique du tout. La lecture est très accessible, mais quand je disais qu'il fallait la lire lentement, c'est parce que chaque paragraphe doit être "médité" pour comprendre: on observe autour de soi pour trouver des exemples qui confirment ou infirment la thèse, puis on revient au livre... Si on le dévore comme un roman, on ne le comprends pas. Il faut y avancer pas à pas, revenir en arrière, c'est très très dense mais parfaitement clair.Thierry a écrit:
Mais les "roses croix", c'est pas le nom d'un groupe religieux ou un truc dans le genre ? J'ai déjà entendu ça quelque part.
Si tu veux, j'en ai fait un résumé que je peux t'envoyer. C'est un petit livre, qui a été considéré comme bonne une introduction à cette théorie.
Invité- Invité
Re: Le corps et la conscience.
Même expérience que Leela , chez les Max Heindel, aussi, assez différents des "Amorc" .
Des choses très concrètes, à expérimenter, constater . Et puis les extrapolations moins faciles à "digérer". Cosmogonie compliquée , théorie des "races" dégénérées ...là, j'ai décroché . ça a beau être théorique ...
Des choses très concrètes, à expérimenter, constater . Et puis les extrapolations moins faciles à "digérer". Cosmogonie compliquée , théorie des "races" dégénérées ...là, j'ai décroché . ça a beau être théorique ...
JO- Seigneur de la Métaphysique
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Date d'inscription : 23/08/2009
Re: Le corps et la conscience.
A mon avis, Jo, tu l'as lue trop vite. Il faut, comme tu l'évoques, "digérer" chaque morceau de chapitre par l'observation et l'expérience avant d'aller plus loin. Mais c'est tellement passionnant qu'on a tendance à brûler les étapes, alors cela devient incompréhensible, notamment par ce qu'il a élaboré un vocabulaire spécial, nécessaire pour des notions "spéciales"
Invité- Invité
Re: Le corps et la conscience.
J'ai suivi l'enseignement pendant un an , avant de renoncer .Comme dans l'anthroposophie, des résultats bouleversants et concrets , qui démontrent une vision exacte du fond... mais une théorie philosophique qu'il faut admettre et ne se démontre pas, elle .
JO- Seigneur de la Métaphysique
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Date d'inscription : 23/08/2009
Re: Le corps et la conscience.
oui, en ce qui me concerne, ce qui m'a bloquée, c'est leur esprit "christique" (l'âme du Christ qui serait celui de la Terre, ça fait penser à Gaïa), mais pour le reste: très sympa.
Invité- Invité
Re: Le corps et la conscience.
Merci pour les réponses. Je suis allé chercher sur la toile et j'ai lu quelques passages...C'est effectivement, euh, assez, comment dire...ésotérique... Faut que j'approfondisse...
Thierry- Maître du Temps
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Date d'inscription : 03/06/2009
Re: Le corps et la conscience.
ésotérique = réservé aux initiés, parce que les connaissances acquises peuvent être mal utilisées. Mais actuellement, il n'y a plus d'enseignement ésotérique, tout est passé dans le domaine public, sauf certains enseignements oraux, comme chez les soufis.
Invité- Invité
Re: Le corps et la conscience.
nous avons sans doute plusieurs corps, qui s'interpénètrent comme l'eau, l'air, imprègnent une éponge. (Je le répète, c'est une théorie, mais que je trouve très cohérente). Ce qu'est notre conscience, je n'en sais rien.
Pour ce qui est des Vedas la conscience n'est pas réductible à un corps plus subtil qu'un autre, mais concerne le bénéficiaire des corps et de la nature matérielle.
Cette dernière est dite exister pour elle, en fait.
BG 7.5 '' Au-dela (de ces énergies), Ô Arjuna aux-bras-puissants, en existe une supérieure émanant de Ma Personne, qui comprends les êtres vivants (jiva) qui exploitent les ressources de cette nature matérielle, inférieure''.
La conscience revêt, pour ces enseignements, la forme d'atomes infinitésimaux à l'endroit du corps matériel. Située dans le corps, la conscience en est donc pourtant qualitativement distincte, de la même manière que tout les jivas participent de la Nature de l'Absolu qualitativement, en lui étant quantitativement distincts.
C'est ainsi que la conscience s'ouvre lors de certaines expériences mystiques, du Jiva au Paramatma de la même nature (esprit suprême, atman absolu)
La libération est un processus de la conscience.
Radha2- Maître du Temps
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Date d'inscription : 16/06/2009
Re: Le corps et la conscience.
Radha, je pense que nos anciens avaient beaucoup de sagesse et d' intelligence, mais ils ne pouvaient établir leurs enseignements que sur les connaissances de l' époque . Pour eux, la matière n' était que ...de la matière, même brisée en d' infinitésimaux morceaux.
La fameuse formule d' Einstein leur était inconnue.
S'ils avaient su que la matière est de l' énergie " en
bouteille ", ils auraient encore été...plus sages !
La fameuse formule d' Einstein leur était inconnue.
S'ils avaient su que la matière est de l' énergie " en
bouteille ", ils auraient encore été...plus sages !
bernard1933- Aka Tpat
- Nombre de messages : 10079
Localisation : Dijon
Identité métaphysique : agnostique
Humeur : serein
Date d'inscription : 23/03/2008
Re: Le corps et la conscience.
Qui est donc dans la pensée magique Bernard...
T. R. V. Murti Le passé et le futur ne sont rien que des noms, des formes de la pensée, des mots d'usage communs qui ne reflètent qu'une réalité superficielle
SV Upanishad Seule une disctinction arbitraire divise la forme de la substance de la forme de l'énergie. La matière s'exprime comme la manifestation d'une force inconnue
AV Upanishad D'ou viennent donc tout ces mondes ? Ils viennent de l'espace. Tout naît de l'espace, et à l'espace retourne. L'espace est donc leur début, et leur ultime fin.
K. Venkata Ramanan Il n'y a rien de tel qu'un temps absolu qui demeurre distinct de la succession de ces évènements.
Comment tous les citer
La conscience de l'époque.... la connaissance, mode de compréhension horizontale du monde récente, ce qu'explique la théorie des âges. Pour les traces de connaissance, mohendjo-daro est deja un manhattan antique, mais que dire des traces de vitrification... ? Il faut certes troquer une vision linéaire du temps contre un cyclisme de la conscience chez l'homme incarné, on y plonge...ou pas.
Mettre de l'énergie en bouteille et vider l'atlantique nord de 90% de ses espèces vivante, grande sagesse...
, oui, ils l'ont formulé eux-même tellement souvent que certains textes ressemblent à de la physique-fictionLa fameuse formule d' Einstein leur était inconnue.
T. R. V. Murti Le passé et le futur ne sont rien que des noms, des formes de la pensée, des mots d'usage communs qui ne reflètent qu'une réalité superficielle
SV Upanishad Seule une disctinction arbitraire divise la forme de la substance de la forme de l'énergie. La matière s'exprime comme la manifestation d'une force inconnue
AV Upanishad D'ou viennent donc tout ces mondes ? Ils viennent de l'espace. Tout naît de l'espace, et à l'espace retourne. L'espace est donc leur début, et leur ultime fin.
K. Venkata Ramanan Il n'y a rien de tel qu'un temps absolu qui demeurre distinct de la succession de ces évènements.
Comment tous les citer
ils ne pouvaient établir leurs enseignements que sur les connaissances de l' époque
La conscience de l'époque.... la connaissance, mode de compréhension horizontale du monde récente, ce qu'explique la théorie des âges. Pour les traces de connaissance, mohendjo-daro est deja un manhattan antique, mais que dire des traces de vitrification... ? Il faut certes troquer une vision linéaire du temps contre un cyclisme de la conscience chez l'homme incarné, on y plonge...ou pas.
Mettre de l'énergie en bouteille et vider l'atlantique nord de 90% de ses espèces vivante, grande sagesse...
Radha2- Maître du Temps
- Nombre de messages : 736
Date d'inscription : 16/06/2009
Re: Le corps et la conscience.
"Si la conscience n'est pas la mémoire c'est qu'elle est hors du temps." Gereve
C'est étonnant comme cette phrase me renvoie à des moments vécus en montagne (oui, je sais, j'y reviens souvent...)C'est difficile à exprimer mais j'ai connu des états de conscience dans lesquels je n'étais pas conscient d'y être...Pas avec les repères habituels liés à cette fameuse mémoire. C'était totalement inconnu, ça n'avait aucune commune mesure avec ce que j'avais pu éprouver auparavant. Dès lors, c'est comme si je n'avais pas été là...Compliqué à exprimer. Le fait de n'avoir aucun ancrage, aucun repère par rapport à ce que j'éprouvais me plaçait dans un état de lucidité incroyable, comme si tout tombait dans un endroit vierge de tout. Du coup, ça prenait une force incommensurable avec toujours cette indéfinissable impression que ça ne "me" concernait pas mais qu'il y avait quelque chose d'autre, un autre récepteur, pas le "moi", l'alpiniste, le premier de cordée, le copain ou l'amant ou quelque chose d'identifié mais une "conscience" totalement inconnue. C'était totalement bouleversant et l'énergie qui irradiait en moi était incontrôlable...Ca m'est arrivé dans d'autres circonstances, beaucoup plus douloureuses cette fois. Un détachement complet, une évaporation, un démantèlement...Ca fait des années que j'essaie de le traduire...C'était hors du temps, hors de toutes choses connues pour moi.
C'est étonnant comme cette phrase me renvoie à des moments vécus en montagne (oui, je sais, j'y reviens souvent...)C'est difficile à exprimer mais j'ai connu des états de conscience dans lesquels je n'étais pas conscient d'y être...Pas avec les repères habituels liés à cette fameuse mémoire. C'était totalement inconnu, ça n'avait aucune commune mesure avec ce que j'avais pu éprouver auparavant. Dès lors, c'est comme si je n'avais pas été là...Compliqué à exprimer. Le fait de n'avoir aucun ancrage, aucun repère par rapport à ce que j'éprouvais me plaçait dans un état de lucidité incroyable, comme si tout tombait dans un endroit vierge de tout. Du coup, ça prenait une force incommensurable avec toujours cette indéfinissable impression que ça ne "me" concernait pas mais qu'il y avait quelque chose d'autre, un autre récepteur, pas le "moi", l'alpiniste, le premier de cordée, le copain ou l'amant ou quelque chose d'identifié mais une "conscience" totalement inconnue. C'était totalement bouleversant et l'énergie qui irradiait en moi était incontrôlable...Ca m'est arrivé dans d'autres circonstances, beaucoup plus douloureuses cette fois. Un détachement complet, une évaporation, un démantèlement...Ca fait des années que j'essaie de le traduire...C'était hors du temps, hors de toutes choses connues pour moi.
Thierry- Maître du Temps
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Identité métaphysique : celle qui vous plaira
Humeur : celle qui me convient
Date d'inscription : 03/06/2009
Re: Le corps et la conscience.
Expérience -mystique -connue des anciens du moins, Thierry
Cela ressemble fortement à la dissociation du véhicule, corporel et du 'bénéficiaire' du corps,
Un symptôme de la montée de l'énergie vitale, il y a d'autres symptômes, ce sont les 'siddhis', interprétés comme des pouvoirs, dans les textes
Expérience qui tisse un pont, entre cette 'conscience' spirituelle appelée jivatman, et l'esprit suprême, conscience collective, brahman, paramatman, etc, permettant d'être illuminé par cette radiance
Cela ressemble fortement à la dissociation du véhicule, corporel et du 'bénéficiaire' du corps,
...décrits précédementun autre récepteur
Un symptôme de la montée de l'énergie vitale, il y a d'autres symptômes, ce sont les 'siddhis', interprétés comme des pouvoirs, dans les textes
serait ainsi l'ahamkara, les sentiments d'appartenance divers lié au faux-égo, cette illusion que toutes les traditions visent à effacer.
pas le "moi", l'alpiniste, le premier de cordée, le copain ou l'amant ou quelque chose d'identifié
Expérience qui tisse un pont, entre cette 'conscience' spirituelle appelée jivatman, et l'esprit suprême, conscience collective, brahman, paramatman, etc, permettant d'être illuminé par cette radiance
qui parfois se manifeste sous d'autres extrémités, les pleurs, les rires, la 'folie', ... tout cela est écrit dans les premiers textes et connu de beaucoup dans la théorie. De peu dans la pratiquel'énergie qui irradiait en moi était incontrôlable
Radha2- Maître du Temps
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Date d'inscription : 16/06/2009
Re: Le corps et la conscience.
Je n'ai pas toutes ces connaissances Radha, je n'ai pas les références, ça reste à l'état "brut", ça me dépasse, ça fait longtemps que ça dure, depuis mon adolescence en fait, les courses longues, à pied, à vélo, en montagne et même en mer.
Thierry- Maître du Temps
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Re: Le corps et la conscience.
La mort. Il l’avait souvent défiée. L’épuisement physique.
Les journées d’escalade. Ce besoin de sentir la solidité de la roche, comme les murs de la chambre contre lesquels ils s’étaient appuyés. Cette masse indestructible sous ses mains. Comme si le vide ne pouvait plus le saisir. S’accrocher de toutes ses forces, résister à la pesanteur, cette chute effroyable vers les noirceurs insondables, repousser les faiblesses, dépasser les limites, ne jamais s’avouer vaincu. Aller au bout de l’effort, approcher du noyau d’énergie qui rayonne dans les fibres, sentir palpiter la vie comme un cœur d’étoile, un clignotement infime mais constant, inaltérable, éternel. Se détruire pour vivre. Et entrer en communion avec l’infini. Ses sorties en vélo. Cent kilomètres, cent cinquante, deux cents. Trois cent soixante-quinze. C’était son record. Une journée entière à rouler. Il était parti sans savoir où il allait. Direction plein nord. Le bonheur de rouler. Juste engranger des kilomètres, découvrir des paysages puis la fatigue qui s’installe, plonger en soi et voyager à l’intérieur. Le ronronnement mécanique du dérailleur, la mélodie des respirations, l’euphorie de la vitesse, cette déraison qui le poussait à écraser les pédales, cette folie joyeuse qui consumait les forces, ce courant étrange qu’il sentait dans son corps, cette détermination irréfléchie, juste le besoin inexpliqué de plonger au cœur de ses entrailles, d’en extraire les éléments nutritifs, de les exploiter, jusqu’à la moelle, que chaque particule soit associée à cette découverte des horizons intimes, être en soi comme un aventurier infatigable, un guerrier indomptable, passionné, amoureux, émerveillé, ne jamais ralentir, ne jamais relâcher son étreinte, enlacer ses forces comme un amant respectueux, les honorer, les bénir et sentir le bonheur de la vie, une vie qui lutte, qui se bat, qui s’élève, cette certitude que cette vie ne pouvait pas s’éteindre. La sienne certainement. Mais pas la vie, pas ce souffle qui circulait en lui. Il n’était pas en vie. La vie était en lui. Il n’était qu’un convoyeur. Juste une enveloppe. Elle se servait de lui. Et il la remerciait infiniment de l’avoir choisi. Cette occupation n’était qu’épisodique mais il aurait eu cette chance. Il se devait d’en profiter. Cette palpitation le quitterait un jour. Elle irait voir ailleurs. L’enveloppe qui devient poussière. Et la vie investira une autre capsule, un autre fourreau, un écrin juvénile. L’épuisement le guidait infailliblement vers le cœur lumineux de la vie retranchée. Il finissait par ne plus entendre les voitures, ni les rumeurs des villages traversés, par ne plus percevoir les paysages. Il ne restait que des formes innommées, le parfum âcre de sa sueur. L’oxygène capturé inondant les abîmes affamés. Et le sourire délicat de son âme extasiée, la plénitude infinie de la vie en lui. Les derniers kilomètres. Il avait pleuré de bonheur. Vidé de tout. Les yeux fixant le goudron qui défilait. Les muscles liquéfiés. Incapable de savoir ce qui permettait encore aux jambes de tourner. Vidé de tout. Coupé de sa raison, un mental éteint, une absence corporelle, un état de grâce, l’impression d’être ailleurs, hors de ce corps épuisé, une légèreté sans nom sous la pesanteur immense de la fatigue souveraine, un néant de pensées, juste ce sentiment indéfinissable de la vie magnifiée.
Cette vision étrange d’un cycliste déambulant sur la Terre, il était dans les cieux, un regard plongeant, une élévation inexplicable, les arabesques des routes, les champs, les collines, quelques maisons, et ce garçon écrasant les pédales, ce sourire énigmatique, béatitude de l’épuisement, cet amour immense, cette étreinte spirituelle, il était dans les cieux, une échappée verticale. Comme emporté par les ailes d’un ange.
Les journées d’escalade. Ce besoin de sentir la solidité de la roche, comme les murs de la chambre contre lesquels ils s’étaient appuyés. Cette masse indestructible sous ses mains. Comme si le vide ne pouvait plus le saisir. S’accrocher de toutes ses forces, résister à la pesanteur, cette chute effroyable vers les noirceurs insondables, repousser les faiblesses, dépasser les limites, ne jamais s’avouer vaincu. Aller au bout de l’effort, approcher du noyau d’énergie qui rayonne dans les fibres, sentir palpiter la vie comme un cœur d’étoile, un clignotement infime mais constant, inaltérable, éternel. Se détruire pour vivre. Et entrer en communion avec l’infini. Ses sorties en vélo. Cent kilomètres, cent cinquante, deux cents. Trois cent soixante-quinze. C’était son record. Une journée entière à rouler. Il était parti sans savoir où il allait. Direction plein nord. Le bonheur de rouler. Juste engranger des kilomètres, découvrir des paysages puis la fatigue qui s’installe, plonger en soi et voyager à l’intérieur. Le ronronnement mécanique du dérailleur, la mélodie des respirations, l’euphorie de la vitesse, cette déraison qui le poussait à écraser les pédales, cette folie joyeuse qui consumait les forces, ce courant étrange qu’il sentait dans son corps, cette détermination irréfléchie, juste le besoin inexpliqué de plonger au cœur de ses entrailles, d’en extraire les éléments nutritifs, de les exploiter, jusqu’à la moelle, que chaque particule soit associée à cette découverte des horizons intimes, être en soi comme un aventurier infatigable, un guerrier indomptable, passionné, amoureux, émerveillé, ne jamais ralentir, ne jamais relâcher son étreinte, enlacer ses forces comme un amant respectueux, les honorer, les bénir et sentir le bonheur de la vie, une vie qui lutte, qui se bat, qui s’élève, cette certitude que cette vie ne pouvait pas s’éteindre. La sienne certainement. Mais pas la vie, pas ce souffle qui circulait en lui. Il n’était pas en vie. La vie était en lui. Il n’était qu’un convoyeur. Juste une enveloppe. Elle se servait de lui. Et il la remerciait infiniment de l’avoir choisi. Cette occupation n’était qu’épisodique mais il aurait eu cette chance. Il se devait d’en profiter. Cette palpitation le quitterait un jour. Elle irait voir ailleurs. L’enveloppe qui devient poussière. Et la vie investira une autre capsule, un autre fourreau, un écrin juvénile. L’épuisement le guidait infailliblement vers le cœur lumineux de la vie retranchée. Il finissait par ne plus entendre les voitures, ni les rumeurs des villages traversés, par ne plus percevoir les paysages. Il ne restait que des formes innommées, le parfum âcre de sa sueur. L’oxygène capturé inondant les abîmes affamés. Et le sourire délicat de son âme extasiée, la plénitude infinie de la vie en lui. Les derniers kilomètres. Il avait pleuré de bonheur. Vidé de tout. Les yeux fixant le goudron qui défilait. Les muscles liquéfiés. Incapable de savoir ce qui permettait encore aux jambes de tourner. Vidé de tout. Coupé de sa raison, un mental éteint, une absence corporelle, un état de grâce, l’impression d’être ailleurs, hors de ce corps épuisé, une légèreté sans nom sous la pesanteur immense de la fatigue souveraine, un néant de pensées, juste ce sentiment indéfinissable de la vie magnifiée.
Cette vision étrange d’un cycliste déambulant sur la Terre, il était dans les cieux, un regard plongeant, une élévation inexplicable, les arabesques des routes, les champs, les collines, quelques maisons, et ce garçon écrasant les pédales, ce sourire énigmatique, béatitude de l’épuisement, cet amour immense, cette étreinte spirituelle, il était dans les cieux, une échappée verticale. Comme emporté par les ailes d’un ange.
Thierry- Maître du Temps
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Identité métaphysique : celle qui vous plaira
Humeur : celle qui me convient
Date d'inscription : 03/06/2009
Re: Le corps et la conscience.
Humilier la Mort.
Cette journée de voile.
Ses parents lui avaient offert une semaine de stage dans un club près du Conquet. Ils s’occupaient des visites à l’hôpital. Inutile qu’il continue ses veilles.
« Tu en as déjà tellement fait, Yoann. Il faut que tu profites aussi de tes vacances d’été. »
Il avait déjà son diplôme de chef de bord. Une première sortie avait montré aux
responsables du club qu’il pouvait prendre en charge un voilier avec des débutants.
C’était le dernier jour. Un des deux bateaux à moteur chargé de l’assistance était tombé en panne. La sortie avait pourtant été maintenue. Un moniteur avait décidé d’accompagner les trois voiliers des stagiaires dans un autre dériveur. Des vieilles caravelles rénovées, lourdes, peu maniables. L’énervement de cette panne mécanique les avait détournés d’une autre priorité. La météo. Personne ne l’avait étudiée. C’était la première année du club. Des gérants sans expérience. Des jeunes étourdis de rêves.
Ils étaient partis. Sortie du goulet de Brest, direction sud-ouest. Ciel mitigé, des chapelets de cirrus étirés, beaucoup de vent en altitude, une houle croisée, assez délicate à manœuvrer. Les voiliers étaient suffisamment secoués pour que ses trois passagers ressentent rapidement les effets du mal de mer. Deux jeunes filles en vacances, une vingtaine d’année, un père de famille qui avait laissé sa tribu sur la plage. Tous les trois néophytes. Il avait essayé de les intéresser à la progression du bateau, leur passer les commandes, gérer la grand-voile puis le foc mais les deux filles avaient finalement décidé de se poser au fond de la coque et de ne plus s’occuper de rien. La nausée ne les lâchait plus. Elles préféraient discuter des garçons du camping pour refouler les remontées de bile. Le père de famille restait concentré sur le foc. Silencieux.
Le ciel s’était couvert à une vitesse affolante. Une barre noire gonflant sur l’horizon. Comme une avalanche sombre déboulant sur les flots, un concentré de forces vives. Il aurait voulu faire demi-tour mais le moniteur dans son voilier avait continué à les mener vers le large. Et puis le bateau à moteur s’était arrêté. Net. Cent mètre devant eux. Vraiment pas un bon jour. Il avait regardé les deux jeunes essayer de le redémarrer. Il était passé à leurs côtés.
« Saloperie de moteur. Et Jeannot, Jeannot !!! Fais demi-tour, le moteur est noyé !!! Jeannot !!! Putain, il entend rien ce con !!! »
Une intuition.
Il avait viré de bord, refusant de poursuivre le voilier de tête. Les deux autres caravelles avaient continué, préférant sans doute essayer de garder le contact avec la sécurité toute relative du moniteur.
Quelques minutes avaient suffi pour que le vent se renforce considérablement. La masse noire s’était rapprochée avec la furie d’un prédateur. Il se souvient très bien du regard inquiet du père de famille qui luttait avec le cordage de sa voile gonflée.
« On va rentrer, lui avait-il dit. On ne va pas les attendre. »
La houle, comme des collines en mouvance, le voilier ballotté sur les pentes. La remontée devenait délicate, la vitesse à peine suffisante pour franchir la crête, la descente prenait des allures de toboggan, le creux paraissait vouloir les engloutir. Les filles s’étaient tues, pétrifiées par le changement incroyable de l’Océan, la disparition quasi-totale de la côte, le claquement de la bordure des voiles, le sifflement aigu de l’air dans les drisses, rien à voir avec la balade tranquille qu’elles avaient imaginée.
Il leur avait demandé de se déplacer sur tribord pour équilibrer la gîte. A chaque descente dans les creux, elles recevaient des paquets d’eau froide, des embruns qui les fouettaient. Leurs visages angoissés, celui du père de famille. Il ne les a jamais oubliés. La prise de conscience brutale qu’il tenait leur survie dans ses mains. Plus de bateau de secours, le voilier du moniteur hors de vue, le vent qui ronflait comme une tuyère d’avion, le ciel ballonné de cumulus distendus, dégueulant des nuées grasses puis des flopées de grains serrés, des pluies épaisses, des rafales imprévisibles, le bateau qui partait en surf sur les pentes mobiles, le grondement des masses furieuses, l’adrénaline qui montait, cette impression de puissance, l’impossibilité de perdre le combat, la force dans son corps, la certitude que lui au moins s’en sortirait, aucune peur, un immense plaisir, une lutte qui irradiait dans ses muscles des frissons de bonheur, l’envie de rire, il se retenait, l’eau noire de l’Océan, des dentelles d’écume qui ourlaient les crêtes brisées, la puissance de la houle qui les soulevait, les projetait dans des vallons sombres, l’horizon disparu, puis l’ascension délicate vers le col devant eux, le bateau qui se dressait, il voyait le père de famille cramponné au pied du mat, les deux filles se serraient l’une contre l’autre, plus un mot, les yeux hagards, les corps pétrifiés, il pensait à tous les récits de marins dans les mers du Sud, les quarantièmes rugissants, le bonheur qu’ils devaient éprouver, cette confrontation avec soi-même, l’Océan comme témoin, le haut de la vague, l’étrave qui basculait, un instant au-dessus du vide, et le plongeon dans le gouffre liquide, il ne pensait pas que l’Océan puisse changer aussi rapidement, le vent devenait hurlement, les autres voiliers avaient disparu, même du haut des crêtes il ne les voyait pas, la force indomptable de la houle l’empêchait de virer à tribord, le voilier courait vers des falaises contre lesquelles il commençait à voir les rouleaux écumeux se briser, il fallait tourner, il ramenait la barre, il sentait dans le bois des vibrations sourdes, la coque frissonnait sous les efforts, des raideurs de squelette torturé, des craquements lugubres, cette puissance de l’Océan, il n’en revenait pas, et toujours cette joie étrange qui ne le lâchait pas, le danger comme une sève euphorisante, les falaises qui se rapprochaient, impossible de maintenir le cap vers la baie où se cachait le port, les vagues les repoussaient immanquablement vers la côte rocheuse, le regard de l’homme à l’avant, il s’était retourné, ses yeux effarés, remplis de cette angoisse de l’incertitude, de la projection effrayée vers une issue redoutable, l’imagination qui s’emballe, il ne tenait plus sa voile, l’accélération soudaine du voilier, une rafale incroyable, le bateau qui gîte, l’eau qui s’engouffre, les écoutes lâchées, la poulie de la bôme qui casse, la barre horizontale qui passe au-dessus des têtes comme une guillotine, l’étrave qui plonge au fond du creux, les filles qui hurlent, la vitesse, la vitesse, l’eau noire qui bouillonne, le sifflement aigu dans les drisses, les falaises à deux cents mètres, il lâche le gouvernail, à quatre pattes il avance vers le pied du mat, il passe le bout par-dessus la bôme et la fait coulisser vers l’arrière, des gestes sûrs, précis, rapides, il revient s’asseoir, il règle la voile, les filles qui hurlent, l’eau qui s’engouffre, le père tétanisé à l’avant, des paquets de mer qui l’assaillent, un creux, une crête, un creux, une crête, et la force en lui, cette énergie phénoménale, il ne comprenait pas cette absence de peur, juste ce désir de lutte et puis là, l’idée, la révélation, l’illumination.
Humilier la Mort.
Cette envie de crier sa force.
Cette joie incommensurable du défi, de l’ultime défi.
« Je fais une dernière tentative pour virer vers le port. Si ça ne marche pas, on saute à l’eau et chacun se débrouille. Vaut mieux ça que d’arriver sur les falaises. »
Les filles qui hurlent, le père qui se retourne.
« Je ne veux pas mourir. Ma famille. »
Les épaules tombantes, le corps assommé par l’abandon de l’esprit.
Lui, il savait qu’il ne mourrait pas, il savait que la Mort ne pouvait rien contre sa force, contre cette joie qui le propulsait au-dessus du drame, elle ne pouvait pas l’atteindre, il était au-delà de la Mort.
« Mettez-vous tous à gauche quand je vous le dirai. On va avaler plein de flotte mais en gîtant à fond, on arrivera peut-être à tourner. Si ça le fait, il faudra écoper, enlevez vos chaussures pour balancer le maximum d’eau le plus vite possible. »
Les filles qui hurlent.
« Et fermez-la !!! Si vous voulez que ça marche, il faut m’écouter !! »
Il avait attendu de franchir la crête et en profitant de l’accélération il avait déclenché le virement.
« Allez, tous à gauche !!! »
Un ordre.
Ils avaient obéi.
Le bateau qui gîte, qui résiste au mouvement de l’eau, la coque qui dérape, la barre qui vibre dans ses mains rivées au bois, les jambes assaillies par les flots qui se déversent, les voiles qui gémissent, l’écoute enroulée autour de son poignet, il sait qu’il doit la libérer s’il saute à l’eau, il réfléchit à une vitesse stupéfiante, une lucidité qui le bouleverse, le bateau qui tourne, les filles qui écopent, le père qui vomit sur ses genoux, la bouillie bileuse qui se répand dans l’eau avalée par la coque, les filles qui écopent, tête baissée, furieusement, en pleurant, le père qui s’y met, l’énergie, l’énergie, et sa force, ce magma qui le transporte au-dessus de la peur.
Humilier la Mort.
Ce bonheur inoubliable.
Le voilier qui remonte la houle, les filles qui rient nerveusement en sanglotant, le père qui regarde les falaises qui s’éloignent, l’étrave qui fend les crêtes, ses mains cramponnées à la barre, les embruns qui le giflent, le goût délicieux du sel sur ses lèvres, le ciel noir comme une nuit en avance, le bonheur, immense.
Illumination.
Le monde était là pour l’aider dans son combat. La Nature n’était pas qu’un terrain de jeu. Il ne l’avait jamais regardée correctement, il avait limité ses regards à l’apparence, juste un stade immense, l’erreur était flagrante, il avait besoin d’un partenaire, il venait de le trouver.
Un tel bonheur, toute cette chaleur dans son ventre, cette clairvoyance en lui, des frissons à en pleurer, l’impression d’être ouvert à la vérité, de tout comprendre, en quelques instants, de voir se dessiner l’intégralité du parcours à venir.
La Nature comme partenaire.
Un bateau de pêche les avait récupérés. Il rentrait avec deux collègues, des caseyeurs, ils tiraient déjà le moniteur, les deux autres voiliers, le bateau à moteur. Ils les avaient trouvés en perdition.
L’arrivée à la plage, ses parents qui l’attendent, leurs visages inquiets, ils tirent les bateaux sur le sable, les deux filles et le père, les jambes flageolantes, les moniteurs qui s’excusent, honteux, désemparés.
Il s’en moque, il n’est pas là, il a pris son envol, il le sait, l’essentiel s’est révélé.
Un regard vers le large.
Cette journée de voile.
Ses parents lui avaient offert une semaine de stage dans un club près du Conquet. Ils s’occupaient des visites à l’hôpital. Inutile qu’il continue ses veilles.
« Tu en as déjà tellement fait, Yoann. Il faut que tu profites aussi de tes vacances d’été. »
Il avait déjà son diplôme de chef de bord. Une première sortie avait montré aux
responsables du club qu’il pouvait prendre en charge un voilier avec des débutants.
C’était le dernier jour. Un des deux bateaux à moteur chargé de l’assistance était tombé en panne. La sortie avait pourtant été maintenue. Un moniteur avait décidé d’accompagner les trois voiliers des stagiaires dans un autre dériveur. Des vieilles caravelles rénovées, lourdes, peu maniables. L’énervement de cette panne mécanique les avait détournés d’une autre priorité. La météo. Personne ne l’avait étudiée. C’était la première année du club. Des gérants sans expérience. Des jeunes étourdis de rêves.
Ils étaient partis. Sortie du goulet de Brest, direction sud-ouest. Ciel mitigé, des chapelets de cirrus étirés, beaucoup de vent en altitude, une houle croisée, assez délicate à manœuvrer. Les voiliers étaient suffisamment secoués pour que ses trois passagers ressentent rapidement les effets du mal de mer. Deux jeunes filles en vacances, une vingtaine d’année, un père de famille qui avait laissé sa tribu sur la plage. Tous les trois néophytes. Il avait essayé de les intéresser à la progression du bateau, leur passer les commandes, gérer la grand-voile puis le foc mais les deux filles avaient finalement décidé de se poser au fond de la coque et de ne plus s’occuper de rien. La nausée ne les lâchait plus. Elles préféraient discuter des garçons du camping pour refouler les remontées de bile. Le père de famille restait concentré sur le foc. Silencieux.
Le ciel s’était couvert à une vitesse affolante. Une barre noire gonflant sur l’horizon. Comme une avalanche sombre déboulant sur les flots, un concentré de forces vives. Il aurait voulu faire demi-tour mais le moniteur dans son voilier avait continué à les mener vers le large. Et puis le bateau à moteur s’était arrêté. Net. Cent mètre devant eux. Vraiment pas un bon jour. Il avait regardé les deux jeunes essayer de le redémarrer. Il était passé à leurs côtés.
« Saloperie de moteur. Et Jeannot, Jeannot !!! Fais demi-tour, le moteur est noyé !!! Jeannot !!! Putain, il entend rien ce con !!! »
Une intuition.
Il avait viré de bord, refusant de poursuivre le voilier de tête. Les deux autres caravelles avaient continué, préférant sans doute essayer de garder le contact avec la sécurité toute relative du moniteur.
Quelques minutes avaient suffi pour que le vent se renforce considérablement. La masse noire s’était rapprochée avec la furie d’un prédateur. Il se souvient très bien du regard inquiet du père de famille qui luttait avec le cordage de sa voile gonflée.
« On va rentrer, lui avait-il dit. On ne va pas les attendre. »
La houle, comme des collines en mouvance, le voilier ballotté sur les pentes. La remontée devenait délicate, la vitesse à peine suffisante pour franchir la crête, la descente prenait des allures de toboggan, le creux paraissait vouloir les engloutir. Les filles s’étaient tues, pétrifiées par le changement incroyable de l’Océan, la disparition quasi-totale de la côte, le claquement de la bordure des voiles, le sifflement aigu de l’air dans les drisses, rien à voir avec la balade tranquille qu’elles avaient imaginée.
Il leur avait demandé de se déplacer sur tribord pour équilibrer la gîte. A chaque descente dans les creux, elles recevaient des paquets d’eau froide, des embruns qui les fouettaient. Leurs visages angoissés, celui du père de famille. Il ne les a jamais oubliés. La prise de conscience brutale qu’il tenait leur survie dans ses mains. Plus de bateau de secours, le voilier du moniteur hors de vue, le vent qui ronflait comme une tuyère d’avion, le ciel ballonné de cumulus distendus, dégueulant des nuées grasses puis des flopées de grains serrés, des pluies épaisses, des rafales imprévisibles, le bateau qui partait en surf sur les pentes mobiles, le grondement des masses furieuses, l’adrénaline qui montait, cette impression de puissance, l’impossibilité de perdre le combat, la force dans son corps, la certitude que lui au moins s’en sortirait, aucune peur, un immense plaisir, une lutte qui irradiait dans ses muscles des frissons de bonheur, l’envie de rire, il se retenait, l’eau noire de l’Océan, des dentelles d’écume qui ourlaient les crêtes brisées, la puissance de la houle qui les soulevait, les projetait dans des vallons sombres, l’horizon disparu, puis l’ascension délicate vers le col devant eux, le bateau qui se dressait, il voyait le père de famille cramponné au pied du mat, les deux filles se serraient l’une contre l’autre, plus un mot, les yeux hagards, les corps pétrifiés, il pensait à tous les récits de marins dans les mers du Sud, les quarantièmes rugissants, le bonheur qu’ils devaient éprouver, cette confrontation avec soi-même, l’Océan comme témoin, le haut de la vague, l’étrave qui basculait, un instant au-dessus du vide, et le plongeon dans le gouffre liquide, il ne pensait pas que l’Océan puisse changer aussi rapidement, le vent devenait hurlement, les autres voiliers avaient disparu, même du haut des crêtes il ne les voyait pas, la force indomptable de la houle l’empêchait de virer à tribord, le voilier courait vers des falaises contre lesquelles il commençait à voir les rouleaux écumeux se briser, il fallait tourner, il ramenait la barre, il sentait dans le bois des vibrations sourdes, la coque frissonnait sous les efforts, des raideurs de squelette torturé, des craquements lugubres, cette puissance de l’Océan, il n’en revenait pas, et toujours cette joie étrange qui ne le lâchait pas, le danger comme une sève euphorisante, les falaises qui se rapprochaient, impossible de maintenir le cap vers la baie où se cachait le port, les vagues les repoussaient immanquablement vers la côte rocheuse, le regard de l’homme à l’avant, il s’était retourné, ses yeux effarés, remplis de cette angoisse de l’incertitude, de la projection effrayée vers une issue redoutable, l’imagination qui s’emballe, il ne tenait plus sa voile, l’accélération soudaine du voilier, une rafale incroyable, le bateau qui gîte, l’eau qui s’engouffre, les écoutes lâchées, la poulie de la bôme qui casse, la barre horizontale qui passe au-dessus des têtes comme une guillotine, l’étrave qui plonge au fond du creux, les filles qui hurlent, la vitesse, la vitesse, l’eau noire qui bouillonne, le sifflement aigu dans les drisses, les falaises à deux cents mètres, il lâche le gouvernail, à quatre pattes il avance vers le pied du mat, il passe le bout par-dessus la bôme et la fait coulisser vers l’arrière, des gestes sûrs, précis, rapides, il revient s’asseoir, il règle la voile, les filles qui hurlent, l’eau qui s’engouffre, le père tétanisé à l’avant, des paquets de mer qui l’assaillent, un creux, une crête, un creux, une crête, et la force en lui, cette énergie phénoménale, il ne comprenait pas cette absence de peur, juste ce désir de lutte et puis là, l’idée, la révélation, l’illumination.
Humilier la Mort.
Cette envie de crier sa force.
Cette joie incommensurable du défi, de l’ultime défi.
« Je fais une dernière tentative pour virer vers le port. Si ça ne marche pas, on saute à l’eau et chacun se débrouille. Vaut mieux ça que d’arriver sur les falaises. »
Les filles qui hurlent, le père qui se retourne.
« Je ne veux pas mourir. Ma famille. »
Les épaules tombantes, le corps assommé par l’abandon de l’esprit.
Lui, il savait qu’il ne mourrait pas, il savait que la Mort ne pouvait rien contre sa force, contre cette joie qui le propulsait au-dessus du drame, elle ne pouvait pas l’atteindre, il était au-delà de la Mort.
« Mettez-vous tous à gauche quand je vous le dirai. On va avaler plein de flotte mais en gîtant à fond, on arrivera peut-être à tourner. Si ça le fait, il faudra écoper, enlevez vos chaussures pour balancer le maximum d’eau le plus vite possible. »
Les filles qui hurlent.
« Et fermez-la !!! Si vous voulez que ça marche, il faut m’écouter !! »
Il avait attendu de franchir la crête et en profitant de l’accélération il avait déclenché le virement.
« Allez, tous à gauche !!! »
Un ordre.
Ils avaient obéi.
Le bateau qui gîte, qui résiste au mouvement de l’eau, la coque qui dérape, la barre qui vibre dans ses mains rivées au bois, les jambes assaillies par les flots qui se déversent, les voiles qui gémissent, l’écoute enroulée autour de son poignet, il sait qu’il doit la libérer s’il saute à l’eau, il réfléchit à une vitesse stupéfiante, une lucidité qui le bouleverse, le bateau qui tourne, les filles qui écopent, le père qui vomit sur ses genoux, la bouillie bileuse qui se répand dans l’eau avalée par la coque, les filles qui écopent, tête baissée, furieusement, en pleurant, le père qui s’y met, l’énergie, l’énergie, et sa force, ce magma qui le transporte au-dessus de la peur.
Humilier la Mort.
Ce bonheur inoubliable.
Le voilier qui remonte la houle, les filles qui rient nerveusement en sanglotant, le père qui regarde les falaises qui s’éloignent, l’étrave qui fend les crêtes, ses mains cramponnées à la barre, les embruns qui le giflent, le goût délicieux du sel sur ses lèvres, le ciel noir comme une nuit en avance, le bonheur, immense.
Illumination.
Le monde était là pour l’aider dans son combat. La Nature n’était pas qu’un terrain de jeu. Il ne l’avait jamais regardée correctement, il avait limité ses regards à l’apparence, juste un stade immense, l’erreur était flagrante, il avait besoin d’un partenaire, il venait de le trouver.
Un tel bonheur, toute cette chaleur dans son ventre, cette clairvoyance en lui, des frissons à en pleurer, l’impression d’être ouvert à la vérité, de tout comprendre, en quelques instants, de voir se dessiner l’intégralité du parcours à venir.
La Nature comme partenaire.
Un bateau de pêche les avait récupérés. Il rentrait avec deux collègues, des caseyeurs, ils tiraient déjà le moniteur, les deux autres voiliers, le bateau à moteur. Ils les avaient trouvés en perdition.
L’arrivée à la plage, ses parents qui l’attendent, leurs visages inquiets, ils tirent les bateaux sur le sable, les deux filles et le père, les jambes flageolantes, les moniteurs qui s’excusent, honteux, désemparés.
Il s’en moque, il n’est pas là, il a pris son envol, il le sait, l’essentiel s’est révélé.
Un regard vers le large.
Thierry- Maître du Temps
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