Sagesse du pluvian
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Plumes et cornes
Je suis le bel Ange-Taureau,
Un vrai recordman de vitesse ;
Je vis ma vie dans l’allégresse,
Je suis plus léger qu’un oiseau.
J’aime aussi draguer, sous les eaux,
Une sirène enchanteresse ;
Nous échangeons quelques caresses,
Elle aime embrasser mon museau.
Je suis massif, elle est menue,
Elle est fragile et presque nue,
Mais ferme comme un bloc de fer.
Nous sommes d’égale noblesse,
Un ange avec une diablesse,
Noces du ciel et de l’enfer.
Poisson de la Pléiade
Poisson plus fort que les taureaux,
Lui qui n’a pas moindre vitesse ;
Cet ennemi de la mollesse
Peut chanter mieux que les oiseaux.
Maître du royaume des eaux,
Il en séduisit la princesse ;
Il la combla de ses largesses
Et lui fit un nid de roseaux.
Pour lui, la sorcière chenue
Redevint la jeune ingénue
Chantant de nostalgiques airs.
Puis il a choisi pour maîtresse
Une bizarre prophétesse,
La sauterelle du désert.
Seigneurs des océans
La nef arbore nos couleurs,
Poséidon se tient tranquille ;
Les manoeuvres nous sont faciles,
Nous sommes des gens de valeur.
L’aube rayonne de pâleur,
Les écoutes sont bien dociles ;
Notre barreur se montre habile,
Lui qui n’est pas un bricoleur.
Surgissent des palais de glace
Où démons et anges s’enlacent ;
Un tiède éclat baigne leurs corps.
Leur souverain nous offre à boire,
Nos verres sont pleins à ras bord ;
Vient encore un jour sans histoires.
Créquier de juin
Dryade, j’aime tes yeux verts,
J’aime ton sourire ineffable ;
C’est du lointain pays des fables
Que tu viens, d’un bel univers.
J’aime le faune, un peu pervers
Mais parfaitement respectable ;
J’aime aussi le loup redoutable
Et le mélomane pivert.
Je parle avec le vieil ermite,
Lequel jadis fut sybarite ;
En sagesse il est mon tuteur.
L’écosystème a ses mystères,
Le Ciel échange avec la Terre
Quelques clins d’oeil révélateurs.
Upupa
Je vais chasser parmi les fleurs,
Les insectes font mes délices ;
Que m’importe qu’ils me maudissent,
J’avale ces petits râleurs.
Des survivants j’entends les pleurs,
J’entends qu’ils réclament justice ;
Cela ne leur est pas propice,
C’est Dieu qui permit leur malheur.
En Éden il plaça la pomme
Pour mettre à l’épreuve les hommes ;
Notre sort est entre ses mains.
Huppe je suis, la bien nommée,
Vermine est par moi consommée ;
Applaudissez, frères humains !
L’écriture est magique
Vers enchantés, sorcière prose,
Savourez-les, frères humains ;
Celui qui de vin les arrose,
Je dis qu’il est en bon chemin.
Même quand l’auteur est morose,
À la plume il mettra la main ;
La vie n’est pas jonchée de roses,
Incertains sont les lendemains.
Les mots n’en font qu’à leur idée,
Parfois leur verve est débridée,
Mais il n’en ont aucun remords.
Amusette ou récit tragique,
Devinette, ou chant nostalgique
Ornant le chemin vers la mort.
Trois tours sur la colline
Bien loin d’ici, je ne sais où,
Trois vieux ermites se reposent ;
Leurs trois demeures sont debout
Sur un grand tertre de grès rose.
Sont-ils des sages ou des fous ?
Ils n’ont écrit ni vers ni prose ;
De la bière ils aiment le goût,
Ils n’y connaissent pas grand-chose.
Ils ne jouent d’aucun instrument,
Ils ne lisent aucun roman ;
Ce sont trois vieux messieurs sans charme.
Restez dans votre obscurité,
C’est tout ce que vous méritez ;
Votre indolence nous désarme.
Une voile
La belle nef porte un archange,
La barre est en de fermes mains ;
Sur son invisible chemin
Surgissent des récifs étranges.
Intangible est le pain qu’il mange,
Meilleur que celui des humains ;
Sur son atlas en parchemin
Les lignes et les formes changent.
Le vin qu’il boit te rendrait ivre,
Mais lui, ça l’aide juste à vivre ;
Il a déjà franchi sa mort.
Il s’endort sur un lit de flammes
Et rêve d’une voix de femme
Qui chante pour lui, pas trop fort.
Saint Jean-Claude Simon
Il fut chercheur, il fut prophète,
Ce fut un homme raffiné ;
En gai savoir enraciné,
Il nous parlait comme un poète.
Jamais il n’abusait des fêtes,
Lui, le travailleur obstiné ;
Bien loin d’être un illuminé,
Il était bien clair dans sa tête.
Cette figure magistrale
Fut une autorité morale
Pour plusieurs chercheurs de tout bord.
Pas de monuments à sa gloire,
Mais à sa santé je vais boire
Un doux breuvage aux reflets d’or.
Ange maritime
Soyez heureux, braves marins,
J’accompagne vos aventures ;
Je suis bon, telle est ma nature,
Chaque démon des mers me craint.
Beau capitaine, sois serein,
Car je te sers sans forfaiture ;
Tu liras dans les Écritures
De quoi te rendre ton entrain.
Si la sirène t’importune
En chantant sous la froide lune,
Je peux te rendre ton repos.
Or, toi dont l’âme est vertueuse,
Toi dont les muscles sont dispos,
Poursuis ta course fructueuse !
Le baron Renard
Je dévore perdrix et cailles,
Jamais rien de plus recherché ;
J’ai mon terrier sous un rocher,
Je m’y suis fait un lit de paille.
Jamais je ne livre bataille,
Je me garde bien des archers ;
Je prélève un peu de volaille,
Les campagnards en sont fâchés.
Je ne suis qu’un goupil sans gloire,
Je n’ai vraiment rien d’un héros ;
Pour seules armes, j’ai mes crocs.
De mes vers ne gardez mémoire,
Pas plus que du cri d’un perdreau ;
Je suis un être sans histoire.
Arbre tranquille
Cet arbre, c’est un bon vivant,
Un peu perdu dans ses pensées ;
Il songe à des saisons passées,
Il se les raconte en rêvant.
Dans l’éclat du soleil levant
Danse la dryade insensée ;
Joyeuse, elle s’est avancée
Vers le faune aux yeux émouvants.
L’arbre rit de cette folie ;
Ces créatures sont jolies,
Et qu’importe leur déraison…
La poésie nourrit leurs âmes ;
Ne dis pas que c’est un poison,
Car moi, j’en offre aux nobles dames.
Vagabond des limbes
Sur les noirs chemins, que de pierres !
Pour mes orteils, ce n’est pas bon.
Pourquoi donc suis-je vagabond ?
Mais si j’avais une chaumière…
Vraiment ce monde est sans lumière,
Ce sont les meilleurs qui s’en vont ;
Tout finit mal, nous le savons,
Chaque homme retourne en poussière.
Puisque les dieux ne sont pas tendres
Ni ne tentent de le prétendre,
Où sera notre réconfort ?
Les démons sont durs, et malins,
Chacun d’entre eux n’est qu’un vilain ;
Non, vraiment, ça ne va pas fort.
Manoir fermé
Que va cet endroit devenir,
Aux jours de mauvaise fortune ?
Vides sont les salles communes,:
Où nul ne pourra revenir.
Tant d’objets, tant de souvenirs,
Et le beau verger sous la lune…
Sur le gazon tombent les prunes
Sans à personne appartenir.
Ainsi va la force des choses,
En vain t’y opposeras-tu ;
Cette maison restera close.
De quoi servirent nos vertus ?
L’homme propose et Dieu dispose,
Qui ne veut être combattu.
Puits d’encre
Pour le scribe mal assuré,
De nombreux obstacles se dressent ;
Il craint sa propre maladresse,
Au point de s’autocensurer.
Au fond d’un encrier doré,
Mille vers non écrits se pressent ;
Cette encre n’est pas piperesse,
Elle va les élaborer.
Le plumitif enfin s’apaise,
Sa muse ne l’a pas déçu,
Ni non plus la langue française.
La plume trouve, à son insu,
Des mots rouges comme des braises ;
De ce puits d’encre ils sont issus.
Saint Bougrelas
Que signifie ma sainteté ?
Dis-moi, quelle en serait la cause ?
Je ne comprends rien à ces choses,
Obscure est la divinité.
Les vieux récits qu’on m’a contés,
Je ne dis pas qu’ils m’indisposent ;
Le paradis qu’on nous propose
Semble un lieu de toute beauté.
Mais je ne suis qu’un saint barbare,
Que je fasse du bien, c’est rare,
Je ne suis guère utile à Dieu.
Je veux garder les pieds sur terre,
Tout au moins, comme sursitaire,
Je veux faire attendre les cieux.
Lord Crab
Je ne fais pas dans la dentelle,
Un rocher me sert de palais ;
Ne me dis pas que je suis laid,
Fort belle est mon âme immortelle.
Je souris quand je me rappelle
Le mal d’amour qui me brûlait ;
J’offrais de ravissants galets
À la crabette la plus belle.
Les pêcheurs avec leur bateau
Pour nous prendre se lèvent tôt ;
C’est à l’aube qu’ils appareillent.
Mais il ne m’auront pas, c’est clair :
Ils iront, ça m’en a tout l’air,
Au port vider quelques bouteilles.
La mer est profonde
La nef tantôt plonge et s’élève,
Son équilibre est incertain ;
Le port est encore lointain,
Cette aventure semble un rêve.
Lointaines sont aussi les grèves
Dans la lumière qui s’éteint ;
Notre but n’est jamais atteint,
L’horizon s’éloigne sans trêve.
Le vieux Neptune se permet
Un jeu qui ne finit jamais ;
La chose lui est coutumière.
Marins, nous sommes sous sa loi ;
Notre coeur est de bon aloi,
Qui, la nuit, croit à la lumière.
Valets de l’ours
Tombe la neige à gros flocons,
Bientôt viendra la nuit polaire ;
Les démons sous la lune claire
Boiront le vin de leurs flacons.
Jamais nous ne les attaquons,
Le grand ours interdit la guerre ;
Les diables remplissent nos verres
Et joyeusement nous trinquons.
Fort débonnaire est notre maître,
Il n’agit jamais comme un traître ;
Même, c’est notre bienfaiteur.
Les morses au loin se rassemblent ;
Qu’ils s’en aillent où bon leur semble,
Ces errata du Créateur !
Tour du guérisseur
Vers ce lieu des mourants se traînent,
Des gens touchés par le malheur ;
Le sorcier calme leur douleur
Grâce à de merveilleuses graines.
Une fée, qui fut sa marraine,
En fit un savant bricoleur ;
Il est bon vivant, beau parleur,
Il a séduit des souveraines.
Il traite les chagrins d’amour,
Non seulement par ses discours,
Mais par les talents qu’il déploie.
Soigner les anciens combattants,
Il me dit que c’est important ;
Au long du jour il s’y emploie.
Saint Gambrinus
J’aime boire, et je parle peu,
Sauf, parfois, lors des grandes fêtes ;
J’ai des répliques toutes prêtes,
Je les place comme je peux.
Je vais bien, mais je me fais vieux,
« Neiges d’antan », dit un poète ;
Il dit ces mots que je répète,
Pourquoi chercher à faire mieux ?
J’ai bien bu, mais je bois encore ;
La bière en sa chope se dore,
Savoureuse en toute saison.
D’autres buveurs lèvent leur verre,
Qui le coude souvent levèrent ;
Les prochains sont pour la maison.
Oiseau de Spinoza
Je vis dans le juste milieu,
Jamais dans le vagabondage ;
J’étais savant dans mon jeune âge,
Moins, maintenant que je suis vieux.
Au matin je scrute les cieux,
Au soir je contemple l’herbage ;
Je ne suis pas entomophage,
La coccinelle a dit « Tant mieux ».
Un arbre me dit des légendes ;
Mais sa dryade rit de lui,
Car elle n’en est pas friande.
Je sens que s’approche la nuit,
Au nord, un étrange astre luit ;
Son noir éclat baigne la lande.
Arbor Felix
J’ai pour dryade un diable noir
Dont la fourche est toujours brandie ;
Il me garde des incendies,
Ayant un magique arrosoir.
Je crois qu’il a d’autres pouvoirs,
Car son âme est vraiment hardie ;
Sa bravoure est même applaudie
Par le rouge soleil du soir.
Certains soirs, j’entends qu’on l’appelle ;
Ce sont, dans la vieille chapelle,
Des saints de bois qui l’aiment bien.
Saints et diable ensemble parviennent
À la taverne très ancienne
Où la bière est pour presque rien.
Oies du Capitole
Ce sont gardiennes attitrées,
Qui nous furent d’un grand secours ;
Car elles veillent nuit et jour
Sur cette colline sacrée.
« Notre ville en est honorée »,
Dit le maire dans un discours ;
Il leur promit, pour faire court,
Leurs friandises préférées.
Cruels barbares sans merci,
C’est pour vous le temps des soucis ;
En vain priez-vous vos idoles.
Éloignez-vous donc, maraudeurs,
Vous vîntes pour votre malheur ;
Allez plutôt voir l’Acropole.
Bouc gyrovague
Je suis un bouc, loin d’être un veau,
Ma renommée n’est point surfaite ;
Je suis plus vaillant qu’un poète,
Et puis je n’ai pas peur de l’eau.
J’aime, cela n’est pas nouveau,
Que les chevrettes soient discrètes ;
Et que ma barbe de prophète
Leur confirme que je suis beau.
Ce que raconte La Fontaine
Provient d’une source incertaine ;
Brave lectrice, n’y crois pas.
Comme étalon, je fais merveille ;
Je tiens cela de mon papa,
Dont le fantôme sur moi veille.
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