Sagesse du pluvian
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Nef du porc
Nous avons pris la mer à la saison des pluies,
Après de brefs adieux, dans le petit matin ;
Le soir il a fallu débarquer trois mutins
Sur un îlot désert, au risque qu’ils s’ennuient.
Nous avons vu danser des pétrels en folie,
Sur le point de voler vers des pays lointains ;
Pterodroma Mollis était leur nom latin,
J’ai gardé deux ou trois de leurs plumes jolies.
Un ondin, par l’odeur du vieux rhum attiré,
Se hissa sur le pont qu’on venait de cirer ;
Il ne fut guère aimable, on l’a servi quand même.
Cet invité savait boire modérément,
De plus, il nous donna divers renseignements
Dont l’écrivain du bord tira plusieurs poèmes.
Stadtmusikanten
Aime notre musique, elle te réconforte,
Elle adoucit les moeurs, mais ça, tu le savais !
Comme si dans une eau ton âme tu lavais,
Ce qui la renouvelle et qui la rend plus forte.
Tu dois reconnaissance aux gens de notre sorte,
Ils sont pleins de vigueur et n’ont rien de mauvais ;
Ne tourne point le dos en disant « Je m’en vais »,
Car tu n’es point de ces amis que vent emporte.
Tu écoutes nos airs, tu n’es plus solitaire,
Tu goûtes l’harmonie du ciel et de la terre ;
Tu es rempli d’amour, n’en sois pas étonné.
Tu seras pour toujours notre auditeur joyeux,
Tu nous protègeras lorsque nous serons vieux ;
Tu ne perdras jamais l’envie de fredonner.
Arbre précurseur de la croix
L’âme des végétaux est au destin soumise,
Affrontant les tourments sans craindre la douleur ;
Les arbres abattus au pied des autres gisent,
Je ne sais pas s’ils ont le souvenir des fleurs.
Ce qu’ils pensent de nous, jamais ils ne le disent,
N’ayant point le souci de se mettre en valeur ;
L’un d’entre eux se souvient d’une antique traîtrise,
Il n’a pas oublié le reptile enjôleur.
La Dame fut tentée par la pomme vermeille
Dont les parfums valaient ceux du miel des abeilles ;
Alors survint pour nous le temps du désespoir.
De l’arbre, on fit la Croix, pire qu’une potence
Mais qui fut l’instrument de notre renaissance ;
Car ce jour a marqué la fin des siècles noirs.
Lune de sinople
J’ai rêvé d’une verte lune,
D’un globe métamorphosé ;
J’entendis, sans surprise aucune,
Un chant par elle composé.
Sous cet astre, une dame brune
Était venue se reposer ;
Mais une averse inopportune
A menacé de l’arroser.
Un dieu plein de délicatesse
A protégé cette princesse,
En un lieu sûr il l’installa.
J’ignorais le nom, moi, profane,
De cet immortel épiphane
Qui veillait dans le pâle éclat.
Poisson de Boulgakov
J’orne les océans, car je suis le plus beau,
Je suis d’une élégance à nulle autre seconde ;
Ma parole séduit les habitants de l”onde,
Elle est au sein du gouffre un lumineux flambeau.
Chantez pour moi, disait le renard au corbeau,
Mais pour le dépouiller, car il trompait son monde ;
Cela, je l’ai compris par sagesse profonde,
J’en suis accompagné de l’enfance au tombeau.
Dans le temps des amours je fais bonne figure,
Mes histoires font rire, et c’est de bon augure ;
Quand je lance un regard, Cupidon sort du bois.
Je me verse du vin pour fêter mes victoires,
La sirène souvent vient trinquer avec moi ;
Ensemble nous avons… (mais c’est une autre histoire).
Ambicochon serein
Je suis très populaire à trois lieues à la ronde,
Même la tavernière a dit qu’elle m’aimait ;
J’approuve cet aveu, mieux vaut tard que jamais,
J’irai voir plus souvent cette gentille blonde.
Son âme délicate émet de bonnes ondes,
Mon vieux coeur en ressent les rassurants effets ;
Il va de mieux en mieux, tous les jours que Dieu fait,
J’aime aussi son patron, le meilleur fils du monde.
Les gens de cette ville ont pitié des vieillards ;
Ceux qu’on prendrait parfois pour de rudes gaillards
Sont pleins de bon vouloir, ils sont gens de mérite.
Nous bavardons devant un verre de rosé ;
Notre corps est un arbre, il faut bien l’arroser,
Sans avoir, pour autant, des goûts de sybarite.
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https://paysdepoesie.wordpress.com/2013/08/01/notre-corps-est-un-arbre/
Presque lisible
La déontologie se lit
Dans le blason du pot de crème,
À pétrir comme un théorème
Sur une descente de lit.
Cela sera mis à profit
Par le crustacé monotrème,
Lui pour qui prend fin le carême,
Lui dont le lacet se défit.
Il est des lombrics qu’on adore,
Au moins chez les braves pandores,
Ils n’ont pas peur des physiciens.
Tout ce qu’un chacal veut connaître,
C’est le surnom d’un plasticien,
Dans mon abri le vent pénètre.
Pseudo-quark
Je suis très délicat, je fais dans la dentelle,
Je suis comme un photon qui jamais ne s’éteint ;
Je verse aux neutrinos leur café du du matin,
Ils bénissent mon nom de louange immortelle.
C’est grâce à mon éclat que la matière est belle,
Surtout quand elle adopte un aspect cristallin ;
J’ajuste les noyaux, car je suis très malin,
Ceux qui ont fait leur temps iront à la poubelle.
J’aime aussi, certains jours, me moquer des savants,
Surtout quand leurs idées ne sont plus dans le vent ;
Ma forme leur échappe et leur reste inconnue.
À mon pote Gluon je consacre un tanka,
Un texte plein de verve et plein de retenue ;
Je le fais illustrer par le maître Édika.
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https://paysdepoesie.wordpress.com/2019/02/01/le-seigneur-edika/
Structure inachevée
Le fameux bricoleur, à court de stratagèmes,
Cessa de découper et d’assembler le bois ;
Plusieurs points de détail lui posaient des problèmes,
Il se mit à penser, sans trop savoir à quoi.
Il refit ses calculs un grand nombre de fois,
Sans pouvoir s’empêcher d’énoncer des blasphèmes ;
Il épargna pourtant le charpentier en croix
Pour qui, depuis toujours, son respect fut extrême.
Il maudit cependant les papes et les saints,
Traitant l’apôtre Paul de cloporte malsain ;
Il ne recula point devant cette hérésie.
Nous le vîmes bientôt retrouver sa raison ;
Comme on était alors dans la belle saison,
Il s’en alla flâner selon sa fantaisie.
Quatre valets du goupil-paon
Par le Valet de Pique est ma jument sellée,
Et c’est à l’écurie que ce serviteur dort.
La crinière est par lui proprement démêlée,
Il parle à cette bête en patois de Belfort.
Par le Valet de Coeur est balayée l’allée
Quand les arbres sont veufs de leur feuillage d’or ;
Je lui donne du cidre, au moins quatre bolées,
Cette fraîche potion revigore son corps.
Le Valet de Carreau la voiture dépanne,
Il sait aussi régler la chaudière à propane ;
Je lui verse du vin, car il l’a mérité.
Quant au Valet de Trèfle, étrange personnage,
Il se repose au lieu de faire le ménage ;
En vain nous lui parlons de solidarité.
Fier hybride
À nul de mes cousins je ne suis comparable,
Mon esprit par chacune est jugé savoureux ;
Chacune se sent bien dans mes bras vigoureux,
Dans leur lit me trouvant à chacun préférable.
Je sais éliminer des rivaux redoutables,
N’ayant presque jamais d’indulgence pour eux ;
Dès qu’elle n’entend plus leurs discours amoureux,
La belle fait de moi son amant véritable.
Cependant, j’aime aussi boire avec mes amis
Dans un petit troquet de la rue Saint-Rémi ;
Je pense qu’il s’agit d’un plaisir légitime.
J’écris quelques sonnets, n’en soyez pas surpris,
Bien que ce soit un art que je n’ai pas appris ;
J’évite d’y mêler des choses trop intimes.
Prendre son envol
Le roi Minos est grand, mais ce n’est qu’un traître,
Lui qui nous enferma déloyalement ;
Mais cette lourde porte, en se refermant,
De monter vers le ciel nous a laissés maîtres.
Je me sens plus léger qu’un oiseau champêtre,
Je vais donc m’approcher du clair firmament ;
De mon père j’entends l’avertissement,
Mais j’en fais peu de cas, je me sens renaître.
Sa prudence est trop grande, elle est surannée ;
Puisque nous le pouvons, allons jusqu’aux cieux,
Car je voudrais bien, moi, tutoyer les dieux.
Je m’éloigne de vous, rivages sableux,
Déjà par le soleil est ma peau tannée ;
Je ne redoute rien sous ce beau ciel bleu.
Poisson de Leskov
J’habite un océan sans bords,
La vague n’atteint nulle grève ;
Les villes, je les vois en rêve,
Avec leur église et leur port.
En rêve, je rencontre un porc
Qui compose des chansons brèves ;
L’écho les répète sans trêve,
Assourdies par le vent du Nord.
Pour mes frères, poissons limpides,
Le temps n’est jamais insipide ;
La mer est un riche univers.
Nous ne lisons dans aucun livre,
Nous ne récitons pas de vers ;
Car nous nous contentons de vivre.
Re: Sagesse du pluvian
Superbe !
loofrg- Seigneur de la Métaphysique
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Identité métaphysique : Abeille
Humeur : Emeraude
Date d'inscription : 04/07/2018
Plante sans nom
Nature me créa par une fantaisie,
Je dois donc accepter ma singularité ;
Je ne déteste pas mon genre de beauté,
Trouvant que ma couleur est assez bien choisie.
Linné trouvait des noms chargés de poésie,
Mais dans son grand recueil, le mien n’est pas cité ;
Ça confère à mon charme un peu d’opacité,
Je manifeste ainsi mon idiosyncrasie.
Je n’eus jamais besoin de savoir le latin
Pour aimer le soleil, la rosée du matin
Et des oiseaux du ciel les mots pleins de sagesse.
Anonyme je suis, depuis la nuit des temps,
Nul ne parle de moi, mais j’existe, pourtant ;
Dans mon humble terroir,je suis une princesse.
Aigle-muse
De toute pesanteur peut triompher ma grâce,
J’ai trente soupirants, mais je n’en aime aucun ;
Il ne me déplaît pas d’être aimée de chacun,
Tout en décourageant quiconque me pourchasse.
J’écoute leurs propos, je les regarde en face,
Ils comprendront bientôt qu’ils me sont importuns ;
Les nobles héritiers, les hommes du commun,
Je sais parfaitement les remettre à leur place.
Les plus faibles d’entre eux perdent leur dignité ;
Doutant de ma sagesse et de ma chasteté,
Ils m’appellent perdante et pauvre malheureuse.
Un homme pourrait-il m’asservir à des liens ?
Cela ne sera point, lecteur, tu le sais bien,
Je n’ai rien à cirer de leurs offres douteuses.
Détacjement
Ce coeur, ce pauvre coeur que tout mal abandonne,
Dorénavant, va-t-il aux loisirs s’adonner ?
S’il tarde à te répondre, il faut lui pardonner,
Ses mots sont tout en vrac, attendons qu’ils s’ordonnent.
La lune le pétrit, la brume le façonne,
Il va comme un errant dans les champs moissonnés ;
Il entend, vers le soir, une cloche sonner,
Il se met à rêver d’un village en Essonne.
Comme un lecteur gourmand qui d’un livre s’empare,
À rêver d’un ailleurs voici qu’il se prépare,
Un coin de l’avenir ou du lointain passé.
Une muse il entend, une voix amicale,
Sa présence embellit la chambre monacale ;
Nulle amante jamais ne la put surpasser.
Planète Prozacandra
Notre faune est placide et n’est pas trop vilaine,
Même les grands félins se laissent apaiser ;
Aux noirs rhinocéros nous faisons des baisers,
Nous offrons du fromage aux corbeaux de la plaine.
Un prophète égaré chevauche une baleine,
Un poulpe en araignée se laisse déguiser ;
La paix règne entre nous, faut-il le préciser,
Bacchus est de la fête, et son cousin Silène.
D’agréables saisons se montrent tour à tour,
Quelques festivités célèbrent leur retour ;
Les roses des jardins se portent à merveille.
Nous prenons nos cachets, pour nous, c’est essentiel.
Vive le médecin qui sur notre humeur veille !
Ce bonheur, peu nous chaut qu(il soit artificiel.
Bélier du Seigneur Azazel
Les prêtres m’ont offert au démon solitaire,
Ils disent qu’ils l’ont fait pour agir saintement ;
Je risque de subir de mauvais traitements,
Lesquels, précisément ? cela reste un mystère.
Ils n’osent affronter ce cruel adversaire,
N’ayant aucune armée, ni même un régiment ;
Ils suivent donc leur Loi, l’étrange document
Qu’en cadeau de départ ils me dédicacèrent.
Oh ! J’aimerais m’enfuir à bord d’un grand vaisseau,
Et peu m’importeraient des vagues les assauts ;
Je voudrais m’éloigner du diable sanguinaire.
Victime de sa rage et de sa cruauté,
De mes brebis je vais regretter la beauté,
Elles par qui mes jours parfois s’illuminèrent…
Nous sommes de errants
En marche ou au repos, notre âme est agitée,
Cette fragile nef dérive au gré de flots,
Très instable, malgré le soin des matelots,
Irrésistiblement par Neptune emportée.
Elle fut vainement par Cupidon flattée ;
Le grand âge peut-il lui donner du repos ?
Sera-t-elle apaisée par de sages propos ?
Sans doute, la pauvrette en serait enchantée.
Ainsi rêve un penseur dans le jour finissant,
Ainsi va son esprit lentement mûrissant ;
Il voudrait soulager cette âme inassouvie.
Pas moyen de savoir s’il dit vrai, s’il a tort,
S’il a quelques lueurs quant au sens de sa vie :
S’il en a juste assez pour accueillir la mort.
Malédiction d’un fruit
La noirceur de la Faute était dans une pomme,
De quoi nous transformer en valets de l’Enfer ;
Ce reptile abrité par le feuillage vert
Il est de ces seigneurs qu’avec crainte l’on nomme.
Adam parfois l’avait rencontré, dans un somme,
Il tremblait à la vue de cet être pervers ;
Il t’avait imploré, Maître de l’Univers,
Afin de conjurer cet ennemi de l’homme.
Mais la pomme était belle, et ce fruit fut cueilli,
À nous en préserver les anges ont failli ;
C’en est fait de notre âme et de son innocence.
Cependant, nous avons épargné le serpent ;
Nous avons laissé fuir cet animal rampant,
Car déjà nous savons pardonner les offenses.
Sire Loup
Je suis le Seigneur Gris, le maître de ces bois,
Je règne dans le calme et dans la paix de l’âme ;
Mon coeur n’est plus baigné par trop de vives flammes,
Je ne suis nullement une bête aux abois.
J’ai deux ou trois copains qui sont de bon aloi,
Je suis assez fidèle et presque monogame.
Ma compagne, la Louve, est une noble dame,
Nous fûmes, sans église, unis par Saint Éloi.
Précaires sont mes jours, instables mes pensées,
Ma vie guère souvent ne fut bien agencée ;
Le destin de ce jour, je le laisse advenir.
Les richesses jamais ne me firent envie,
De modestes plaisirs mon âme est assouvie,
Ayant, pour seul trésor, deux ou trois souvenirs.
Chemins qui ne mènent nulle part
En la forêt déconcertante,
Trompeurs sont de nombreux sentiers ;
Se perdent des troupeaux entiers
Qui suivent ces voies déroutantes.
D’y pénétrer, cela te tente,
Pour suivre un parcours forestier ;
Guide, ce n’est pas mon métier,
D’être rimeur je me contente.
Tu veux donc partir à tout prix
Car de ces bois tu es épris ;
Je trouve la chose insensée.
Tu t’en iras, j’en suis d’accord,
Préserve ton âme et ton corps ;
Moi, je t’accompagne, en pensée.
Bois flotté
L’arbre qui me portait continue d’exister,
Mais vainement vers lui mon âme vagabonde ;
Je sais bien qu’il s’agit d’une quête inféconde
Et que je cherche en vain, dans cette immensité.
Sur la plage le flux pourrait me rejeter,
Comme il le fait parfois d’une nef moribonde ;
Il pourrait me porter aux terres qu’il inonde,
Aux lieux qu’il rafraîchit au plus fort de l’été.
Tout cela, c’est très clair pour mon esprit lucide,
Et cela ne saurait me pousser au suicide ;
Dans la sérénité tu me vois dérivant.
Je suis le bois flotté, le débris solitaire,
Guidé par les démons du ciel et de la terre ;
Ce vieux corps fatigué n’est ni mort, ni vivant.
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