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Message par mikael Lun 1 Oct 2012 - 10:11

Bible : problèmes de traduction

la recherche religieuse se heurte, dans la bible comme ailleurs quand il s’agit de traduire des textes anciens, à plusieurs difficultés.

La première est bien sûr de comprendre parfaitement le mot antique : J’ai tâché de montrer que c’était le cas avec nazôraios (ou nazarenos, moins fréquent), dont les rédacteurs des évangiles ont perdu le sens, la traduction par « de Nazareth » étant manifestement fausse, car dans ce cas il aurait fallu écrire « nazarethenos » ou « nazarethaios » ; il manque en grec un tau (t) ou un theta (th).

La seconde est de décoder un hapax, c’est à dire un mot n’apparaissant qu’une fois : c’est le cas, dans le Notre Père du NT du mot : épiousios, j’y reviendrai.

La troisième est de se demander en cas de polysémie quel est le terme à choisir : Ainsi, le seul mot basileia, en grec, peut être rendu par : « le royaume », « la royauté », « le règne », il n’y a d’ailleurs pas d’autre terme dans le NT pour ces mots. Le choix incombe donc au traducteur, et on devine que cela peut être lourd de conséquences.

La quatrième, pour l’hébreu, qui ne comportait que des consonnes, est de bien décoder ; ainsi, qaran, briller, a été confondu dans l’Exode avec qeren, la corne, donnant à Moïse descendant du Sinai un visage portant des cornes, quand il fallait comprendre qu’il rayonnait (raison pour laquelle Michel-Ange l’a représenté avec des cornes sur le front).

Dans le levitique 19,18, on lit l’essentiel du judaïsme et du message de Jésus : « tu aimeras ton prochain.. » ; la Septante traduit ensuite : « comme toi-même », formule reprise par Jésus. Mais l’hébreu est moins clair : il est dit « ..ton prochain, lui-toi, moi Dieu ». Martin Buber propose de comprendre : « car il est comme toi « Quel changement de perspective ! Débat non tranché.

La cinquième est le désir du traducteur d’atténuer un mot pour des raisons idéologiques ; ainsi, dans le NT, le mot grec « doulos » est-il traduit régulièrement par « le serviteur », alors qu’il signifie esclave. Quand on lit la parabole « un maître avait deux serviteurs », il s’agit en fait d’esclaves.

La sixième, la moins attendue, est que la traduction soit carrément fausse ; ainsi, en Isaïe 7,14, une erreur lourde de conséquences a été commise dans la Septante, traduction de la bible hébraïque en grec au IIIè siècle avJC. A propos du sauveur d’Israël à venir, les traducteurs (supposés être 70, d’où le nom de la traduction) ont traduit l’hébreu « almah » (la jeune femme) « par « parthenos » (la vierge). cette erreur fut rectifié les siècles suivants par les juifs lettrés de Jérusalem, mais c’est la Septante qui fut le modèle du christianisme, et il semble que cela ait pesé pour le dogme de la naissance virginale de Marie. La plupart des citations en grec de l’AT figurant dans le NT viennent de la Septante, elles ne sont pas une traduction originale des rédacteurs à partir de l’hébreu ou l’araméen.

Dans la prière du Notre Père, on se heurte à deux difficultés : la première est l’hapax « epiousios », qui n’apparaît qu’ici, en épithète du « pain « (donne-nous notre pain..). Il peut signifier : d’aujourd’hui, du lendemain, ou bien : super-essentiel, supra-naturel si on décompose en épi et ousios, ce qui fit d’ailleurs saint Jérôme dans sa traduction latine de la Vulgate, où il écrit « suprasubstantialem ». Les traductions modernes ont préféré en revenir à des mots plus prosaïques.

La seconde est de comprendre l’expression « pardonne-nous nos fautes comme nous pardonnons.. » ; doit-on comprendre : « de même que nous aussi » ou bien : « dans la même mesure où nous. « ? le grec os (Matth. ch. 6) n’est pas univoque, il est rendu par comme, mais n’est pas plus clair. heureusement, Luc au chap 11 nous éclaire, il écrit, au lieu du os, la conjonction gar : car : Pardonne-nous, car nous aussi nous pardonnons « ; ouf !

Tout cela n’est pas exhaustif. N’hésitez pas, si vous avez des problèmes de cette nature à exposer !

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Message par anahel Lun 1 Oct 2012 - 14:26

Bonjour Mikael,

il y a des erreurs qui peuvent aussi offrir une vérité

par exemple dans ceci
mikael a écrit:La quatrième, pour l’hébreu, qui ne comportait que des consonnes, est de bien décoder ; ainsi, qaran, briller, a été confondu dans l’Exode avec qeren, la corne, donnant à Moïse descendant du Sinai un visage portant des cornes, quand il fallait comprendre qu’il rayonnait (raison pour laquelle Michel-Ange l’a représenté avec des cornes sur le front).

Ce mot קרנ peut être traduit par "briller" ou par "corne" suivant les voyelles (le souffle) qui en font la prononciation. Comme vous le préciser vous-même il n'y a pas de voyelles dans l'écriture biblique, donc ce mot peut tout aussi bien être traduit par l'un ou par l'autre. Après on peut dire que l'on traduit selon le contexte comme nous le faisons en français, mais comme la bible est un livre qui offre justement plusieurs niveaux de lecture suivant le lecteur, et ce à l'image de ce lecteur, on peut difficilement choisir un sens plutôt qu'un autre. Par contre si on retient les deux possibilités de traduction du mot קרנ on peut découvrir ce qui relie ces deux traductions et découvrir ainsi ce que signifie vraiment "briller" et ce qu'est une corne dans son sens profond, et dans cette reliance il y a beaucoup à entendre ... Ailleurs dans la bible, il est aussi question de cornes, dans une des visions de Daniel par exemple, dans laquelle il est question d'un combat entre un bouc et un bélier, là il ne peut s'agir que de cornes mais tout autant de la puissance de la lumière ...Chaque traduction possible éclairant l'autre, les autres ... conduisant ainsi vers une nouvelle compréhension qui fera jour en nous-même ... Dénoncer l'erreur est une chose, comprendre ce qui différencie et ce qui relie tout autant en est une autre qui ne conduit pas au même endroit ...

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Message par anahel Lun 1 Oct 2012 - 14:53

pour compléter mon post ci-dessus voici une peinture présente au musée du Vatican
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Dans cette oeuvre d'art, il y a ce qui fait que les cornes se font lumière
Bonne lecture!

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Message par mikael Lun 1 Oct 2012 - 15:12

Merci pour votre explication sur ַקרנ.. qui convient à un talmudiste, mais il faut bien un jour traduire en français ?
Que pensez-vous de la traduction de Lev 19,18 par Martin Buber ? "Liebe deinen Nächsten, dir gleich" : aime ton prochain, car il est comme toi ?

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Message par anahel Lun 1 Oct 2012 - 19:18

Bien sûr Mikael qu'il nous est nécessaire de traduire dans la langue qui est la nôtre, mais il importe à mon sens de ne pas choisir une traduction plus qu'une autre, mais d'être toujours dans le traduire, dans ce mouvement capable de faire fleurir le bois mort de notre savoir. Je suppose que vous connaissez le premier logion de Thomas qui dit: " Celui qui se fera l'herméneute de ces paroles ne goûtera plus de mort". Se faire l'herméneute ce n'est pas pour moi, traduire ni trouver une interprétation d'un mot, d'une phrase, d'un livre ... mais devenir le lieu où le sens subtil, profond, voir même l'essence de ce qui est dit, se révèle. L'herméneute vit dans le mot qu'il cherche à rencontrer, le mot vit aussi en lui. C'est une grande histoire d'amour, toujours en mouvement, vers plus de lumière. Cela demande une écoute particulière dans laquelle le mental n'est là que pour faire ressurgir ce qui en lui, en sa mémoire a été déposé, sans avoir été vraiment ouvert, reconnu, et qui dans la rencontre d'une phrase hermétique vient éclairer et s'éclairer tout autant.

Qu'est-ce que je pense de cette traduction ?: "aime ton prochain car il est comme toi" ou comme toi-même
Ce n'est pas n'importe quelle phrase que celle là!!!! sourire
Je vais méditer sur ce que je peux vous offrir, selon ce que je peux en percevoir aujourd'hui. Vivez-vous une approche de l'écriture hébraïque, des lettres en particulier ?

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Message par mikael Lun 1 Oct 2012 - 22:07

je vous suis ; l'herméneute vit le mot en lui et en savoure les sucs ; malheureusement, le traducteur doit vivre le mot hors de lui, accessible à tous !

j'apprends l'hébreu, après le grec : ani hochev ché zé kaché ledaber ivrit.. aval: baruch ata adonai, amen !

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Message par orthon7 Mar 2 Oct 2012 - 0:10

Bon courage mikael

j'apprends l'hébreu okey

après tu pourra lire la Torah sourire
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Message par mikael Mar 2 Oct 2012 - 9:06

merci pour les liens !

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Message par libremax Mar 2 Oct 2012 - 10:21

Oui, je suis d'accord avec anahel : les langues sémites, dont l'hébreu, sont des langues plus "ouvertes" dans leur vocabulaire que le grec, (et le français).
Le langage abstrait s'y fonde souvent sur des termes très concrets (ainsi, si je ne me trompe, le mot rahanim qui désigne la miséricorde de Dieu, mais qui, à l'origine, désigne l'utérus!), qui peuvent avoir, du coup, un champ sémantique très large, c'est à dire des sens multiples, jusqu'à parfois aller dans un sens contraire.

Le grec a tendance à cerner les concepts le plus précisément possible, tandis que les langues orientales vont plutôt décrire les idées abstraites par facettes juxtaposées, par comparaisons successives, en utilisant davantage les analogies.

Il en résulte, du coup, lors des traductions de l'hébreu (ou de l'araméen) vers le grec ou le latin, un risque permanent de réduction du sens, de parti-pris.
almah siginifie bien "jeune femme" en hébreu. Mais il est très possible que son usage recouvre aussi l'idée de la jeune femme avant son mariage, donc vierge. Le traducteur de la Septante a choisi d'isoler cet aspect-là dans sa traduction ; il a réduit le champ sémantique du mot.
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Message par mikael Mar 2 Oct 2012 - 10:30

almah signifie bien "jeune femme" en hébreu. Mais il est très possible que son usage recouvre aussi l'idée de la jeune femme avant son mariage, donc vierge. Le traducteur de la Septante a choisi d'isoler cet aspect-là dans sa traduction ; il a réduit le champ sémantique du mot.
En tout cas, les lettrés de Jérusalem ont rectifié, et les traductions modernes aussi.
Car parthenos/virgo, c'est betulah, pas almah (si je ne m'abuse). Quand on sait le poids de la virginité de Marie dans la dogmatique catholique, qui s'appuie sur la Septante on comprend le problème.
Au passage, Paul, qui est le premier à écrire sur les fondements du christianisme, ignore le problème : Jésus est né de la chair d'une femme.. c'est tout. Il ne mentionne même pas le nom de Myriam/Marie.
Pour reprendre le propos de Loisy : "Jésus prêchait le Royaume, et c'est l'Eglise qui est venue". De la simplicité de la religion juive, enrichie par l'enseignement de Ieshoua, l'Eglise a fait une religion à mystères, lesquels ont été renommés en "dogmes", mais c'est pareil. Et de mon point de vue c'est regrettable.

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Message par libremax Mar 2 Oct 2012 - 10:43

Les "lettrés de Jérusalem" ont rectifié en réaction au christianisme : l'esprit du passage d'Isaïe pouvait peut-être tout à fait légitimer la traduction qu'en a fait la Septante, de sont temps. Pourquoi faudrait-il contester cette traduction, sous prétexte qu'elle a servi de préalable à la doctrine chrétienne? C'est l'Eglise qui a rédigé la Septante ? (en même temps que d'avoir empêché la venue du Royaume de Dieu ? sourire )

Quand Paul parle de la naissance du Christ de la chair de Jésus, c'est lorsqu'il insiste sur son appartenance juive, et sur son humanité... ce ne sont pas des passages où il allait en même temps parler de son origine divine? il y avait déjà fort à faire avec les tendances gnostiques dans les communautés grecques (mouvements où l'humanité de Jésus était bien remise en cause)...
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Message par Magnus Mar 2 Oct 2012 - 10:49

Libremax a écrit:Le langage abstrait s'y fonde souvent sur des termes très concrets (ainsi, si je ne me trompe, le mot rahanim qui désigne la miséricorde de Dieu, mais qui, à l'origine, désigne l'utérus!), qui peuvent avoir, du coup, un champ sémantique très large, c'est à dire des sens multiples, jusqu'à parfois aller dans un sens contraire.
D'où la traduction de Chouraqui : "Soyez matriciels comme votre Père des Cieux est matriciel."

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Message par libremax Mar 2 Oct 2012 - 10:52

Ben oui, mais... d'où le langage ampoulé et hermétique de Chouraqui !
L'affaire n'est pas simple.
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Message par mikael Mar 2 Oct 2012 - 11:00

Quand une traduction est inexacte, on la rectifie, ce qui fut le cas ; c'est le métier de traducteur, pas une question d'idéologie. Quand on est passé par un institut de traducteurs-interprètes (ce fut mon cas), on n'accepte pas les approximations — ou alors il faut changer de métier !

Ainsi, l'Eglise catholique s'est torturée longtemps pour expliquer que adelphos et adelpha (frère et soeur de Jésus) voulait dire cousin.. en dépit du fait que Jacques est "colonne" de la jeune Eglise parce qu'il est reconnu comme étant le frère du Seigneur, et que Paul, qui est bilingue, fait très bien la différence entre adelphos (frère) et anepsios (cousin), même en s'adressant à des juifs. Reconnaître des faits de langue n'empêche pas de croire que quelqu'un puisse se manifester après sa mort, en clair : qu'il survive à la mort.

Si l'on se situe sur le terrain de la dogmatique, tout est certes possible, mais on ne convainc alors que les convaincus.

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Message par libremax Mar 2 Oct 2012 - 11:26

Le problème est que c'est précisément le langage qui porte l'idéologie. Un langage est-il possible, d'ailleurs, en dehors de toute idéologie? c'est une autre question, mais je ne pense pas que ce soit possible.
Une traduction "neutre" est illusoire : soit elle est fidèle à l'idéologie du texte originel, soit elle en dévie.

Il y a, quelque soit la bonne volonté du traducteur, des termes qui sont intraduisibles, parce qu'issus d'une culture différente.
Le problème du mot adelphos tient de ce même genre de problème : l'usage araméen englobe tout le clan familial, souvent réuni dans la même maisonnée, sous le même terme. Même si Paul connaît la nuance précise, il peut choisir de faire une translittération. (ce qu'on peut toujours contester)
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Message par mikael Mar 2 Oct 2012 - 11:33

Un traducteur est capable de voir les incertitudes, d'avoir des doutes, et il les exprime, c'est normal. Quand on fait passer l'idéologie avant la recherche pure et simple, on finit par dire que Galilée a tort et que la terre est plate. On finit aussi par dire que les deux généalogies du Christ en Luc et Matthieu sont justes. L'exégèse libre ne supporte pas que sa recherche soit dépendante de la théologie. Raison pour laquelle le "Jésus" de Joseph Ratzinger est, d'un point de vue indépendant, une accumulation de lieux communs théologiques, appuyée sur un propos d'une grande force intellectuelle : "les exégètes ne sont jamais d'accord entre eux" !!

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Message par anahel Mer 3 Oct 2012 - 16:37

bonjour,
mikael a écrit:je vous suis ; l'herméneute vit le mot en lui et en savoure les sucs
oui et ce qu'il goûte c'est le vivant des mots, le souffle qui leur a donné vie

mikael a écrit: malheureusement, le traducteur doit vivre le mot hors de lui, accessible à tous !
alors dans ce cas, pour moi, le traducteur ne peut que trahir le mot, en l'enfermant dans une traduction dans laquelle il s'enferme lui-même!
La Bible ce n'est pas du tout cuit, du tout fait, du tout cueilli ... elle n'offre que des graines ... et ensemencer hors de soi ne donne selon moi, que ce qui ne dure qu'un temps et cela ne nourrit que l'avoir, le savoir ... alors qu'ensemencer en soi, cela nous fait entrer dans un processus qui concerne l'Être, la Connaissance, la Vie ... c'est ce que moi j'ai choisi de vivre même si je sais que les interprétations personnelles que je peux offrir ne peuvent pas être entendues par tous. Je n’apprends pas l’hébreu, j’aspire simplement à en découvrir sa profondeur, sa beauté, sa subtilité, à vivre sa rencontre. Je pars à la rencontre de cette écriture hébraïque, non pas pour la traduire, la remplacer par du français mais pour réussir à ce que se révèle le sens caché.
Pour ensemencer en soi les écrits bibliques, je ne ressens pas qu’il soit nécessaire de se contenter de traduire en français, à la limite même cela peut nous éloigner de ce qui appelle à être entendu. Par exemple, avec les noms d’Abraham et Sarah (pour lesquelles il n’y a pas vraiment d’erreurs possibles de traduction) on ne peut percevoir la métamorphose qu’ils ont connus qu’en tenant compte aussi de leur écriture hébraïque. Qu’est-ce qui fait qu'Abram devient Abraham et Saraï, Sarah ? et qu’entre le changement de nom d’Abraham et celui de son épouse il y ait la circoncision du sexe ? Je doute fort qu’il existe une traduction qui puise éclairer cela !!!
Un autre exemple : qu’est-ce qui fait qu’en hébreu un seul mot suffit pour dire je et nous, alors que pour tu, il/elle, vous, ils/elles il y en aient deux pour bien spécifier le genre qui lui correspond ? En traduisant on perd ce détail qui est à mes yeux signifiant.


libremax a écrit:Oui, je suis d'accord avec anahel : les langues sémites, dont l'hébreu, sont des langues plus "ouvertes" dans leur vocabulaire que le grec, (et le français).
Le langage abstrait s'y fonde souvent sur des termes très concrets (ainsi, si je ne me trompe, le mot rahanim qui désigne la miséricorde de Dieu, mais qui, à l'origine, désigne l'utérus!), qui peuvent avoir, du coup, un champ sémantique très large, c'est à dire des sens multiples, jusqu'à parfois aller dans un sens contraire.

Le grec a tendance à cerner les concepts le plus précisément possible, tandis que les langues orientales vont plutôt décrire les idées abstraites par facettes juxtaposées, par comparaisons successives, en utilisant davantage les analogies.

Il en résulte, du coup, lors des traductions de l'hébreu (ou de l'araméen) vers le grec ou le latin, un risque permanent de réduction du sens, de parti-pris.
almah siginifie bien "jeune femme" en hébreu. Mais il est très possible que son usage recouvre aussi l'idée de la jeune femme avant son mariage, donc vierge. Le traducteur de la Septante a choisi d'isoler cet aspect-là dans sa traduction ; il a réduit le champ sémantique du mot.

Je suis en accord avec ce regard que vous posez sur cela, Libremax.
Pas facile de percevoir ce qui relie l'utérus et la miséricorde divine, mais c'est justement parce que l'écart est (semble) immense que cela vaut la peine de creuser, d'éplucher pour trouver ce fil qui les relie et les unit, car le sens qui sera alors offert ne pourra selon moi, qu'éclairer nombre d'autres passages bibliques.

Pour ce qui est du mot almah, quels sont les passages dans lesquels c'est ce mot qui a été traduit par vierge? je viens de chercher mais je n'en ai point trouver. Je ne connais que le mot betulah בתולה qui correspond bien au mot pour désigner dans la langue actuelle, la puberté d'une personne (homme ou femme) qui pour moi n'est qu'un reflet d'une autre virginité qui s'offre plus particulièrement à être entendue dans le texte biblique. Ce qui différencie le genre c'est la dernière lettre ה le hé qui est mis lorsqu'il s'agit d'un féminin. Lorsqu'il s'agit de la Vierge par exemple dans Amos 5.2 nous retrouvons bien ce mot בתולת sauf que là il y a un Tav ת à la fin. Les deux lettres extérieures בת correspondent au mot bat la fille qui est aussi traduit par jeune fille, ce sont d'ailleurs les deux lettres qui cernent le premier mot de la Genèse Bereshit. Le mot au coeur de la fille est tel comme Tel Aviv qui signifie mot à mot "colline de printemps". Rien qu'avec cela on peut atteindre un tout nouveau sens de cette virginité. Il est des collines qui cachent d'anciennes pyramides (cf le post ailleurs de Cana) qui sont pour moi que reflet d'une autre édification et qui selon mon regard n'ont pu s'élever que parce qu'il y avait à chaque étage une virginité réalisé, là on entre obligatoirement dans un autre concept que celui qu'on entend ordinairement.

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Message par mikael Jeu 4 Oct 2012 - 9:29

pour almah, traduit par parthenos, il s'agit d'Isaïe 7,14 dans la traduction de la Septante, erreur rectifée plus tard dans la révision de la Septante par les autorités juives de Jérusalem. Cette erreur de compréhension/traduction a été lourde de conséquence pour la théologie chrétienne (et, de mon point de vue, jusqu'à l'absurde) ; elle a été entérinée par la traduction de saint Jérôme ; on lit dans la vulgate à Isaïe 7,14 :

"propter hoc dabit Dominus ipse vobis signum ecce virgo concipiet et pariet filium et vocabitis nomen eius Emmanuhel"

J'ai trouvé (merci google) ceci pour almah :

Genèse 24 : 43 voici, je me tiens près de la source d'eau, et que la jeune fille ('Almah) qui sortira pour puiser, à qui je dirai : Laisse-moi boire, je te prie, un peu d'eau de ta cruche,
Exode 2 : 8 Va, lui répondit la fille de Pharaon. Et la jeune fille ('Almah) alla chercher la mère de l'enfant.
Psaumes 68 : 25 En tête vont les chanteurs, puis ceux qui jouent des instruments, Au milieu de jeunes filles ('Almah) battant du tambourin.
Proverbes 30 : 19 La trace de l'aigle dans les cieux, La trace du serpent sur le rocher, La trace du navire au milieu de la mer, Et la trace de l'homme chez la jeune femme ('Almah).
Cantiques des cantiques 1 : 3 Tes parfums ont une odeur suave; Ton nom est un parfum qui se répand; C'est pourquoi les jeunes filles ('Almah) t'aiment.
Cantiques des cantiques 6 : 8 Il y a soixante reines, quatre-vingts concubines, Et des jeunes filles ('Almah) sans nombre.
Esaïe 7 : 14 C'est pourquoi le Seigneur lui-même vous donnera un signe, Voici, la jeune fille ('Almah) deviendra enceinte, elle enfantera un fils, Et elle lui donnera le nom d'Emmanuel.

Pour ceux qui voudraient approfondir les problèmes liés à la Septante, je recommande : "La Bible grecque des septante ; du judaïsme hellénistique au christianisme ancien", Marguerite Harl, ed. du Cerf.

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Message par anahel Jeu 4 Oct 2012 - 11:53

Merci Mikael!
L'écriture de ce mot almah העלמה m'inspire beaucoup et elle correspond aussi pour moi à ce que j'entends par virginité.
Je ne vois pas pourquoi dans ce passage Isaïe 7.14 cela pose problème de traduire par vierge, d'autant qu'en 24.16 il est bien précisé que Rebecca est vierge avec le mot betulah, il est même ajouté qu'elle ne connaît pas d'homme, comme cela est dit de Marie. Après c'est sûr si on prend cela au premier degré cela peut engendrer des dérives, personnellement je ne vois que des processus qui conduisent au Devenir, des principes qui concernent chacun et qu'on peut mettre en oeuvre au sein de toute rencontre.




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Message par mikael Jeu 4 Oct 2012 - 12:12

Aquila, disciple de rabbi Aqiba, au début du IIè siècle de notre ère a corrigé "parthenos" en "neanis" pour traduire correctement almah. L'antagonisme chrétien-juif a fait que les chrétiens n'en ont pas tenu compte, et en sont restés à parthenos et virgo latin...

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