l'Amour est-il encore d'actualité?

[ElBilqîs]

au 21^èmesiècle, aimer a-t-il encore un sens?
dans un monde où "on rejette toutes les valeurs, ma pauv' dame", y a-t-il encore une place pour l'Amour sincère, l'Amour Toujours?

une phrase de Calice m'interpelle:

Désirer n'est pas aimer car on peut désirer quelqu'un une soirée sans vouloir forcément faire sa vie avec .

aimer vraiment, cela engage-t-il ( encore) à vivre ensemble jusqu'à la mort? quitte à être hypocrite car peu de gens sont amoureux comme au premier jour après 30, 40 ou 50 ans de mariage!
l'Amour n'est-il plus qu'un CDD,* aujourd'hui?
ne peut-on s'aimer sans vivre ensemble?
peut-on aimer sans désirer? (je ne parle pas des relations parents/enfants ou entre amis)
qu'en pensez-vous?

* contrat à durée déterminée

[Invité]

Ah, il est bon de préciser que c'est de l'amour du couple à vie...

D'après des sondages en Belgique, 70% des jeunes l'ont comme idéal de vie ! J'ai été la première surprise.

Pour moi, c'est à la fois oui et non: ça reste ne beau rêve, mais la réalité, l'allongement de la durée de vie, le fait que les partenaires peuvent prendre des chemins différents, évoluer et devenir incompatibles, le fait aussi que rester avec quelqu'un qui ne convient pas ou plus est une souffrance inutile... tout cela fait que je trouve que "non".
Bien sûr qu'on peut s'aimer sans vivre ensemble !

[Magnus]

...les partenaires peuvent prendre des chemins différents, évoluer et devenir incompatibles...

...Exactement comme l'informatique et sa logique toute féminine. Windows, par ex, évolue et devient incompatible avec certains de ses anciens partenaires.
Que 70% des jeune l'aient comme idéal de vie ne prouve rien, sinon au niveau de l'idéal, justement. Un idéal peut se perdre en cours de route, lors du constat que la barre était décidément placée trop haut.
Mais c'est un très bel idéal de départ.
Donc si le CDD, le contrat à durée déterminée, peut être renouvelé tous les trois ans, c'est tout de même intéressant, même si, comme pour un appart', des lézardes aux murs peuvent apparaître à un moment donné.

S'aimer sans vivre ensemble ? Voilà qui est tout à fait possible, d'autant plus que les absences provisoires peuvent constituer une sorte appel d'air, un besoin plus vif de se retrouver.
Certains, cependant, peuvent se sentir dé-sécurisés sans la précieuse présence quotidienne de l'autre.

Peut-on aimer sans désirer ?
Oui, tout à fait. C'est le cas de certains vieux couples et c'est aussi le cas dans les amours platoniques.
Bien plus, infiniment plus qu'une simple amitié entre deux personnes de sexe différent, l'amour platonique, même entre personnes en pleine santé sexuelle, peut parfois relever de la véritable passion.
Les passions platoniques existent. Ces amours ont leurs raisons pour ne pas céder aux joies et aux pièges de la sexualité, une certaine antipathie physique aidant.

[Invité]

C'est quoi l'amour ? Je ne sais pas si cela existe, je connais le désir, l'affection, l'attachement ...

[raphael-rodolphe]

Les premières fois ou je côtoyais ma future femme, je la désirais. Le jour ou je l'ai aimé pleinement en mon coeur et que ce sentiment fut partagé, le désir perdit cette place sentimentale centrale pour devenir l'un des élans pour notre couple.

[Magnus]

C'est quoi l'amour ? Je ne sais pas si cela existe, je connais le désir, l'affection, l'attachement ...

Il semble que tu en aies donné une définition en disant que l'addition du désir, de l'affection et de l'attachement forme ce qu'on nomme l'amour.

[ElBilqîs]

pourtant, il me semble qu'il y a quelque chose en plus, peut-être ce que j'appelle l'harmonie?

[Geveil]

L'amour qui est centrifuge, est le contraire du désir, qui est centripète.

[ElBilqîs]

oui, c'est une façon de voir les choses! mais l'attirance charnelle, le désir mutuel fait aussi partie de l'amour.
le désir n'est pas toujours égoïste, il peut être réciproque!

[Geveil]

Lorsqu'un homme a envie de planter son dard, il y a une poussée intérieure, due à la testostérone, poussée qui aboutira à l'expulsion de sperme. Donc, à première vue, ça a quelque chose de centrifuge, donc de l'ordre de l'amour.
Mais en fait, il s'agit de mettre fin à une tension qui se fera avec volupté. C'est donc bel et bien tourné vers soi, donc centripète.
Le véritable amour fait que l'homme retardera l'issue de son désir pour satisfaire sa partenaire, c'est tourné vers l'autre, ça , c'est centrifuge.
Mais ce n'est pas aussi simple, il se peut que l'homme ne se retienne pas par amour, mais pour éprouver le pouvoir de faire jouir sa partenaire. Cela n'est pas de l'amour.
D'un autre côté, on peut dire que tous ce comportements sont de l'amour, en tant qu'amour de la vie.
Finalement, on peut dire ce qu'on veut, on peut aussi ne rien dire, ce que je devrais faire.

[bernard1933]

" Le plus grand amour est l'amour d'une mère, vient ensuite l'amour d'un chien, puis l'amour d'un amant ", dit un proverbe polonais. Où se place l'amour entre époux ? J'adore mon épagneul...

[Geveil]

Surtout l'amour des mères qui jettent leur bébé à la poubelle.

[Bulle]

Surtout l'amour des mères qui jettent leur bébé à la poubelle.

Ce n'est pas toi qui dit toujours "positivons" ?

[Calice]

C'est quoi l'amour ? Je ne sais pas si cela existe, je connais le désir, l'affection, l'attachement ...

Il semble que tu en aies donné une définition en disant que l'addition du désir, de l'affection et de l'attachement forme ce qu'on nomme l'amour.

Oui c'est ce qu'on appelle communément amour dans un couple mais ce n'est pas l'Amour car l'amour attachement n'est pas de l'amour mais un sentiment narcissique , un besoin de posséder l'autre .
La majorité des couples ne s'aiment pas , ils sont attachés névrotiquement l'un à l'autre.
Aimer dans l'absolu c'est vouloir le bien de l'autre , indépendamment du fait que l'autre fasse sa vie ailleurs.
Dans le terme désirer il y a une notion de possession , je veux l'autre pour moi , parce que j'ai besoin de lui , je ne cherche pas spécialement son bonheur .
Le véritable amour est oblatif et n'est pas dans le désir de l'autre .
Si beaucoup de couples se séparent c'est parce qu'ils confondent désir et amour et quand il n'y a plus de désir il ne reste plus rien parce que l'amour n'était pas là .Le véritable amour est éternel , car non conditionné , il n'est pas dépendant de l'autre ni de son évolution mais de la capacité intérieure à aimer .

[Thierry]

Les Eveillés.


Il s’approche du premier col. Il est heureux d’avoir pris de l’altitude. La lumière des montagnes est un baume apaisant. Durant toute la montée dans la forêt, puis la traversée des alpages, les pensées se sont entrechoquées follement dans son esprit troublé. Que font les enfants ? Où est Leslie ? Est-ce que son sac n’est pas trop lourd ? Que fait-il là ? Est-ce qu’il s’agit d’une certaine forme de rupture ? Est-ce que Leslie a cherché à lui montrer qu’elle avait besoin de distance, de liberté, de solitude ? Par rapport au monde en général ? Ou est-ce qu’elle avait surtout besoin de s’éloigner de lui ?

Il a cherché à retrouver toutes les paroles réconfortantes dont elle a usé, toutes les explications qu’elle a avancées. Elle avait toujours parlé d’amour. D’une autre façon de l’éprouver en cherchant à retrouver celui qui aime.

« Qui es-tu quand tu m’aimes ? Est-ce toi qui m’aimes ? Est-ce moi que tu aimes ? Qui suis-je quand je t’aime ?

Elle avait parlé de l’être réel qu’elle voulait tant rencontrer. L’expression lui avait montré qu’elle considérait donc leur vie de couple comme un obstacle. Il avait difficilement accepté l’idée qu’il pouvait être un frein à l’évolution de sa compagne puis il avait convenu que cette réaction n’était que la part narcissique de son égo et qu’il devait tout simplement être heureux de voir que Leslie le considérait capable d’entendre ce genre de remarque. Elle avait confiance en lui et l’estimait suffisamment pour lui faire part de ses intentions les plus intimes. C’était une preuve d’amour bien plus forte qu’un silence craintif. Qu’un non-dit protecteur.



« Qui suis-je quand je l’aime ? »



Il s’arrête au basculement de la pente. De l’autre côté du col s’ouvre un long plateau dénudé. Il pose son sac et prend la gourde.



« Est-ce moi ou juste celui qui tient le rôle de l’amant avec l’intention secrète d’obtenir en retour l’amour qu’il prodigue, de trouver un renforcement dans l’identification que la passion amoureuse favorise ? Mais si je ne suis pas moi quand je l’aime, elle peut aussi ne pas être elle puisqu’elle risque de répondre à des attentes projetées par celui qui l’aime et auxquelles elle veut s’adapter pour continuer à être aimée ? Le désir d’amour est-il si puissant que l’être réel succombe à ses stratégies machiavéliques ? Et s’agit-il d’amour ? Ou l’amour est-il ailleurs ? »

Les idées s’enchaînent. L’imbrication complexe révélée par les mots. Comment parler d’amour tant que le concept n’est pas clairement établi ? Mais comment l’établir s’il n’est pas ressenti, vécu, dévoré ? Comment savoir s’il s’agit bien de lui et pas d’une hallucination mentale, intellectualisée, un dérivé perverti, un conditionnement social, une représentation éducative, une copie conforme ? Ne conviendrait-il pas avant de prétendre vivre dans l’amour être certain que celui qui l’affirme sait déjà qui il est ? Car comment aimer quand on n’existe pas ? Qui aime ? Celui qui croit fermement être ce que la vie a fait de lui ou celui qui fait sa vie avec ce qu’il sait être ? L’état de conscience. Impossible de vivre réellement quoique ce soit en dehors de cette exigence. Il réalise soudainement en buvant une gorgée d’eau fraîche que Leslie ressent l’amour avec une force inimaginable parce qu’elle est sans doute pleinement ce qu’elle est, qu’elle est devenue totalement ce qu’elle porte, que s’est révélée en elle sa vérité la plus intime alors qu’il est enfermé dans des geôles aux murs si vastes que les horizons offerts par l’amour lui restent étrangers, inaccessibles, qu’il est un prisonnier juste concentré sur l’embellissement de son enceinte. Et que l’amour dont il parle n’est qu’une engeance malfaisante, une illusion entretenue par l’égo manipulateur. Il n’est pas dans l’amour parce qu’il n’est pas en lui-même.

Il range la gourde. Un nœud dans la gorge.

Une vague de frissons interminables. Il ne peut rien comprendre de l’amour tant qu’il n’aura pas atteint ce niveau de conscience. Tant qu’il n’aura pas épuré son être réel, arraché les vieilles peaux mortes qui l’enserrent. Il les sent depuis si longtemps, il étouffe depuis tant d’années.

Il s’assoit sur une grosse pierre plate. Les jambes molles.

La force des questionnements.

Il croyait avoir fondé sa vie sur la protection des êtres chers alors qu’il se protégeait lui-même. Et par ce subterfuge sournois se privait de toute évolution réelle.

La réalité. La vigilance. La lucidité. La conscience.



Ce col qu’il vient d’atteindre est une première étape, une brèche dans le mur arrogant de ses certitudes. C’est en lui surtout qu’il marche.

Avec Leslie et les enfants, ses absences provoquées dans la bulle accueillante de ses émotions éteintes n’étaient qu’une fuite édulcorée, une plongée hallucinogène dans les abysses de son égo manipulateur. Il pensait pouvoir découvrir dans ces confins hospitaliers des vérités supérieures alors qu’il succombait à la supercherie de son mental flatteur. L’égo, à l’abri de toutes intrusions barbares, contrôlait le psychisme endormi et l’encensait de prétentions futiles, le gavait de somnifères mielleux. Toxicomane de l’absence. Pas un être éveillé. Un dégoût rugueux, une nausée revêche alimentée par la nostalgie des somnolences brisées. Il sait que l’égo se défend, se révolte, redoute les prochaines avancées, que sa domination est ébranlée, qu’il doit imaginer de nouveaux stratagèmes, des mirages stupéfiants. Stupéfiants … Le mot le révulse. Toxicomane de l’absence.



Il se lève vigoureusement, remet son sac, reprend ses bâtons de randonnée et les yeux fixés sur les espaces offerts relance l’alternance hypnotique de ses pas. Un sourire irraisonné se dessine, une bouffée de chaleurs le submerge.

Il sait qu’il est à sa place et que ces frissonnements inconnus sont des réveils qui s’ébauchent.

La réalité ne s’acquiert que dans la lucidité. Celle-ci se nourrit de la vigilance et donne accès à la conscience. Son chemin. Il n’a pas de cartes détaillées, aucune balise à trouver, il doit défricher les reliefs, surmonter les obstacles, franchir des cols inexplorés, progresser avec discernement et attention dans le labyrinthe de ses propres défenses, au cœur de ses propres murailles, créer des brèches infimes, juste de quoi se glisser dans la lumière inconnue des azurs embrasés. Et au coeur de l'amour.

[Calice]

« Qui suis-je quand je l’aime ? »




« Est-ce moi ou juste celui qui tient le rôle de l’amant avec l’intention secrète d’obtenir en retour l’amour qu’il prodigue, de trouver un renforcement dans l’identification que la passion amoureuse favorise ? Mais si je ne suis pas moi quand je l’aime, elle peut aussi ne pas être elle puisqu’elle risque de répondre à des attentes projetées par celui qui l’aime et auxquelles elle veut s’adapter pour continuer à être aimée ? Le désir d’amour est-il si puissant que l’être réel succombe à ses stratégies machiavéliques ? Et s’agit-il d’amour ? Ou l’amour est-il ailleurs ? »

beau texte très bien écrits avec des questions existentielles très pertinentes .
Je dirais que c'est l'égo qui a un désir d'amour , c'est à dire de réciprocité dans la recherche amoureuse.
Celui qui aime réellement ne se préoccupe pas de qui aime , il est tout simplement.Il ne cherche ni à prendre ni à donner mais l'amour s'écoule librement sans se poser de questions.

[Thierry]

« Qui suis-je quand je l’aime ? »




« Est-ce moi ou juste celui qui tient le rôle de l’amant avec l’intention secrète d’obtenir en retour l’amour qu’il prodigue, de trouver un renforcement dans l’identification que la passion amoureuse favorise ? Mais si je ne suis pas moi quand je l’aime, elle peut aussi ne pas être elle puisqu’elle risque de répondre à des attentes projetées par celui qui l’aime et auxquelles elle veut s’adapter pour continuer à être aimée ? Le désir d’amour est-il si puissant que l’être réel succombe à ses stratégies machiavéliques ? Et s’agit-il d’amour ? Ou l’amour est-il ailleurs ? »

beau texte très bien écrits avec des questions existentielles très pertinentes .
Je dirais que c'est l'égo qui a un désir d'amour , c'est à dire de réciprocité dans la recherche amoureuse.
Celui qui aime réellement ne se préoccupe pas de qui aime , il est tout simplement.Il ne cherche ni à prendre ni à donner mais l'amour s'écoule librement sans se poser de questions.

Merci Calice.
A mon sens, l'amour n'est possible qu'à partir du moment où celui qui aime n'a pas besoin d'aimer ni d'être aimé. Il est dans l'amour sans aucune intention.

[Calice]

Exactement Thierry je suis d'accord , très belle définition ...
Chacun aime a son niveau , plus on développe son niveau de conscience plus on est capable d'aimer .
Ce qu'on appelle l'amour attachement dans les couples n'est pas de l'amour , c'est un amour besoin.