Sainte Assurance …
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Sainte Assurance …
Ce doit être début février 1995.
Je viens de terminer un courrier que jamais je n’aurais cru possible d’écrire.
Un courrier destiné à Amarin Brand, archevêque de Strasbourg depuis la visite de Karol Wojtyla en 88 ; ce qui en cette terre concordataire d’Alsace veut dire quelque chose.
Un courrier destiné à un de ces hommes de pouvoir que j’exècre tant !...
Un courrier destiné à un loup !
Le texte est construit à partir de la traduction Segond de 1 Co 13,6 :
« [La charité] ne se réjouit point de l’injustice, mais elle se réjouit de la vérité »
Je n’ai pas conservé la copie de cette lettre.
(Gaillot en a reçue une ; parmi les 3 ou 400 000 de son courrier de ce début 95.)
De mémoire …
« La connaissance de ce qu’est une injustice est universellement répandue, au moins par ceux qui la subissent.
Il en est donc de même pour la vérité, car si, comme Pilate, on ne sait ce qu’est la vérité ; il est possible de savoir où elle ne peut être : là où il y a injustice.
Or la pire des injustices est le déni de vérité ; qui est la calomnie »
Le ton était donné.
J’y évoquais Gaillot ; disais que l’injustice ne résidait pas, pour lui, dans le fait d’être sanctionné en tant que mauvais évêque, ce qui au contraire l’honorait ;mais …
« d’être présenté à la catholicité vertueuse comme un mauvais chrétien ; ce qui est une calomnie »
Et de faire un parallèle entre l’engagement social de Jésus et celui de Gaillot !
La lettre se terminait par ces mots :
« Je ne souffre pas pour cet homme, car il témoigne ; ni pour les petits peinés et scandalisés de le voir ainsi condamné, car il est plus proche d’eux pour leur apporter l’Esprit consolateur.
Je souffre de vous savoir si sûr de vous. »
C’était la première fois de ma vie que je rédigeais un courrier à caractère … « religieux. »
J’étais là, ma lettre en main, je dirais presque … « bêtement » ; car je l’avais rédigée sans raison consciente.
Tout ceci me paraissait tellement incongru ; à moi qui suis viscéralement hostile aux « bondieuseries ».
Mais avant d’en faire des confettis, je voulais prendre la température d’un spécialiste.
À ma droite, près de chez moi, un presbytère catholique ; et à ma gauche un presbytère protestant.
Je ne connais ni le curé, ni le pasteur.
J’hésite un instant, car si la logique me commande d’aller à droite ; je ne veux pas placer le curé en porte-à-faux avec sa hiérarchie.
Mais de l’autre côté, pourquoi aller emmerder un pasteur protestant avec des histoires de cathos ?
Bref, après hésitations, j’opte pour le pasteur.
Nous sommes samedi, vers 16 h, la nuit tombe.
J’hésite encore un instant, le doigt sur la sonnette ; et bon … « Ding Dong »
Une femme ouvre ; son épouse.
Elle me fait rentrer dans le vestibule, car il fait froid, mais je sens que je n’irai pas plus loin : elle fait barrage.
« Mon mari travaille, il prépare son homélie de ce soir ! Revenez un autre jour »
J’insiste un peu en tentant de lui expliquer, mais je sens que c’est en vain. J’insiste encore mais cette femme est un vrai Cerbère !
« Désolé… Il n’a vraiment pas le temps ; je peux vous prendre rendez vous pour … »
Une porte s’ouvre brusquement sur un homme Rabelais, barbu, à la mine un peu bourrue : « Qu’est ce qu’il y a ? »
Je sens que j’ai droit à une phrase, mais pas deux...
« J’aimerais vous soumettre un courrier destiné à Mgr Brand au sujet de la révocation de Mgr Gaillot. »
Un silence…Me regarde … Me jauge … Puis s’approche … prend la lettre que je lui tends … puis lit … en silence.
Je guette les signaux de ses émotions, mais il est impassible.
Il lit lentement, longuement… Les minutes s’égrènent …
J’en suis à me dire que j’ai eu tort de venir chez lui, lorsqu’il tonne à me surprendre ; en me regardant dans les yeux.
« Ça c’est vrai !... Ah ça !... Bon sang, ça c’est vrai … Ça, ils sont sûrs d’eux … Ah, qu’ils sont sûrs d’eux !... »
Devant son épouse contrariée ; il m’invite dans son bureau, encombré d’ouvrages divers.
Il était effectivement en train de travailler, et je le dérange, c’est certain.
Par politesse, je lui propose de venir un autre jour.
« Mais non, mais non …
Il semble hésiter … Me demande si je connaissais Gaillot
« Non ? Vous verrez, il en vaut la peine », et sans s’attarder, me dit l’avoir reçu chez lui, lors d’un repas familial, lorsqu’il était pasteur à Tahiti.
Il hésite, je le sens … Il ne veut pas se livrer à un inconnu …
« Moi aussi j’ai écrit à l’archevêché !...
Il hésite en silence … Je hasarde une question
- Brand vous a répondu ?
Cette question stupide le fait réagir.
- Non ! Bien sûr que non ! Je n’ai pas écrit pour avoir une réponse, je l’ai fait pour exprimer mon émotion et ma solidarité … C’est autre chose …
Il hésite encore…
« On m’a reproché de l’avoir fait ! »
Très rapidement, sans entrer dans les détails, il m’informe des reproches que lui a adressés sa hiérarchie.
En langage ordinaire, je dirais qu’il s’est fait correctement souffler dans les bronches, et semble t’il par plusieurs pontes de l’ECAAL.
J’en suis pantois !...
Je lui parle de la réaction à la force surprenante de Jacques Stewart, de la Fédération Protestante, plus marquée encore que celle du Grand-Rabbin Joseph Sitruk.
Je ne comprends pas …
« Oh, mais on ne m’a pas reproché d’avoir écrit !... On m’a reproché de l’avoir fait avec le papier à en tête de la paroisse… À titre privé, il n’y aurait pas eu de problèmes !... »
(Je ne crois pas lui avoir dit ce que j'en pensais ; mais quelle bande de faux culs !)
Par contre, je lui ai parlé de Ratzinger, alors préfet de la congrégation pour la doctrine de la foi, et âme damnée de Wojtyla. Je me souviens de mes paroles …
« Mais Monsieur le Pasteur, ici, sur cette terre concordataire, une telle réaction est un gage donné au Saint Office.
Je ne comprends pas que les autorités protestantes puissent emboîter le pas de l’église catholique !
Ce que vous me dites là est catastrophique ! »
Et c’est avec de l’amertume dans la voix qu’il laisse tomber :
« Oh … Vous savez … Chez nous c’est pareil !... Chez nous c’est pareil !... Et c’est vrai qu’ils sont sûrs d’eux !...
… Bon sang, qu’est ce qu’ils sont sûrs d’eux ! »
______________________________________
L’élan de solidarité avec ce pasteur m’a déterminé à expédier mon courrier à Brand.
______________________________________
Brand ne m’a jamais répondu !
Pas même une image pieuse me recommandant le jeûne ou la prière !…
Sur ce point, il a eu raison ….
Car non seulement elle ne m’aurait inspiré ni jeûne, ni prière !...
Mais elle m’aurait surtout vexé.
Car pour être franc … les gens de grande piété m’emmerdent… et qu’on puisse me confondre avec eux me blesse.
Par contre, des explications auraient été les bien venues.
Jeter Gaillot comme une vieille chaussette, ou craquer une allumette sous le bûcher de Giordano Bruno…
L’intensité du drame change, mais le principe reste le même.
Cela restera toujours un grand mystère pour moi, que l’on puisse juger au nom du Christ…
Que l’on puisse rejeter au nom du Christ…
Que l’on puisse tuer au nom du Christ…
Et qu’après tout ça on puisse encore se satisfaire en allumant un cierge et chanter une ritournelle !
Comment peut on à ce point être si sûr de soi ?
Je viens de terminer un courrier que jamais je n’aurais cru possible d’écrire.
Un courrier destiné à Amarin Brand, archevêque de Strasbourg depuis la visite de Karol Wojtyla en 88 ; ce qui en cette terre concordataire d’Alsace veut dire quelque chose.
Un courrier destiné à un de ces hommes de pouvoir que j’exècre tant !...
Un courrier destiné à un loup !
Le texte est construit à partir de la traduction Segond de 1 Co 13,6 :
« [La charité] ne se réjouit point de l’injustice, mais elle se réjouit de la vérité »
Je n’ai pas conservé la copie de cette lettre.
(Gaillot en a reçue une ; parmi les 3 ou 400 000 de son courrier de ce début 95.)
De mémoire …
« La connaissance de ce qu’est une injustice est universellement répandue, au moins par ceux qui la subissent.
Il en est donc de même pour la vérité, car si, comme Pilate, on ne sait ce qu’est la vérité ; il est possible de savoir où elle ne peut être : là où il y a injustice.
Or la pire des injustices est le déni de vérité ; qui est la calomnie »
Le ton était donné.
J’y évoquais Gaillot ; disais que l’injustice ne résidait pas, pour lui, dans le fait d’être sanctionné en tant que mauvais évêque, ce qui au contraire l’honorait ;mais …
« d’être présenté à la catholicité vertueuse comme un mauvais chrétien ; ce qui est une calomnie »
Et de faire un parallèle entre l’engagement social de Jésus et celui de Gaillot !
La lettre se terminait par ces mots :
« Je ne souffre pas pour cet homme, car il témoigne ; ni pour les petits peinés et scandalisés de le voir ainsi condamné, car il est plus proche d’eux pour leur apporter l’Esprit consolateur.
Je souffre de vous savoir si sûr de vous. »
C’était la première fois de ma vie que je rédigeais un courrier à caractère … « religieux. »
J’étais là, ma lettre en main, je dirais presque … « bêtement » ; car je l’avais rédigée sans raison consciente.
Tout ceci me paraissait tellement incongru ; à moi qui suis viscéralement hostile aux « bondieuseries ».
Mais avant d’en faire des confettis, je voulais prendre la température d’un spécialiste.
À ma droite, près de chez moi, un presbytère catholique ; et à ma gauche un presbytère protestant.
Je ne connais ni le curé, ni le pasteur.
J’hésite un instant, car si la logique me commande d’aller à droite ; je ne veux pas placer le curé en porte-à-faux avec sa hiérarchie.
Mais de l’autre côté, pourquoi aller emmerder un pasteur protestant avec des histoires de cathos ?
Bref, après hésitations, j’opte pour le pasteur.
Nous sommes samedi, vers 16 h, la nuit tombe.
J’hésite encore un instant, le doigt sur la sonnette ; et bon … « Ding Dong »
Une femme ouvre ; son épouse.
Elle me fait rentrer dans le vestibule, car il fait froid, mais je sens que je n’irai pas plus loin : elle fait barrage.
« Mon mari travaille, il prépare son homélie de ce soir ! Revenez un autre jour »
J’insiste un peu en tentant de lui expliquer, mais je sens que c’est en vain. J’insiste encore mais cette femme est un vrai Cerbère !
« Désolé… Il n’a vraiment pas le temps ; je peux vous prendre rendez vous pour … »
Une porte s’ouvre brusquement sur un homme Rabelais, barbu, à la mine un peu bourrue : « Qu’est ce qu’il y a ? »
Je sens que j’ai droit à une phrase, mais pas deux...
« J’aimerais vous soumettre un courrier destiné à Mgr Brand au sujet de la révocation de Mgr Gaillot. »
Un silence…Me regarde … Me jauge … Puis s’approche … prend la lettre que je lui tends … puis lit … en silence.
Je guette les signaux de ses émotions, mais il est impassible.
Il lit lentement, longuement… Les minutes s’égrènent …
J’en suis à me dire que j’ai eu tort de venir chez lui, lorsqu’il tonne à me surprendre ; en me regardant dans les yeux.
« Ça c’est vrai !... Ah ça !... Bon sang, ça c’est vrai … Ça, ils sont sûrs d’eux … Ah, qu’ils sont sûrs d’eux !... »
Devant son épouse contrariée ; il m’invite dans son bureau, encombré d’ouvrages divers.
Il était effectivement en train de travailler, et je le dérange, c’est certain.
Par politesse, je lui propose de venir un autre jour.
« Mais non, mais non …
Il semble hésiter … Me demande si je connaissais Gaillot
« Non ? Vous verrez, il en vaut la peine », et sans s’attarder, me dit l’avoir reçu chez lui, lors d’un repas familial, lorsqu’il était pasteur à Tahiti.
Il hésite, je le sens … Il ne veut pas se livrer à un inconnu …
« Moi aussi j’ai écrit à l’archevêché !...
Il hésite en silence … Je hasarde une question
- Brand vous a répondu ?
Cette question stupide le fait réagir.
- Non ! Bien sûr que non ! Je n’ai pas écrit pour avoir une réponse, je l’ai fait pour exprimer mon émotion et ma solidarité … C’est autre chose …
Il hésite encore…
« On m’a reproché de l’avoir fait ! »
Très rapidement, sans entrer dans les détails, il m’informe des reproches que lui a adressés sa hiérarchie.
En langage ordinaire, je dirais qu’il s’est fait correctement souffler dans les bronches, et semble t’il par plusieurs pontes de l’ECAAL.
J’en suis pantois !...
Je lui parle de la réaction à la force surprenante de Jacques Stewart, de la Fédération Protestante, plus marquée encore que celle du Grand-Rabbin Joseph Sitruk.
Je ne comprends pas …
« Oh, mais on ne m’a pas reproché d’avoir écrit !... On m’a reproché de l’avoir fait avec le papier à en tête de la paroisse… À titre privé, il n’y aurait pas eu de problèmes !... »
(Je ne crois pas lui avoir dit ce que j'en pensais ; mais quelle bande de faux culs !)
Par contre, je lui ai parlé de Ratzinger, alors préfet de la congrégation pour la doctrine de la foi, et âme damnée de Wojtyla. Je me souviens de mes paroles …
« Mais Monsieur le Pasteur, ici, sur cette terre concordataire, une telle réaction est un gage donné au Saint Office.
Je ne comprends pas que les autorités protestantes puissent emboîter le pas de l’église catholique !
Ce que vous me dites là est catastrophique ! »
Et c’est avec de l’amertume dans la voix qu’il laisse tomber :
« Oh … Vous savez … Chez nous c’est pareil !... Chez nous c’est pareil !... Et c’est vrai qu’ils sont sûrs d’eux !...
… Bon sang, qu’est ce qu’ils sont sûrs d’eux ! »
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L’élan de solidarité avec ce pasteur m’a déterminé à expédier mon courrier à Brand.
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Brand ne m’a jamais répondu !
Pas même une image pieuse me recommandant le jeûne ou la prière !…
Sur ce point, il a eu raison ….
Car non seulement elle ne m’aurait inspiré ni jeûne, ni prière !...
Mais elle m’aurait surtout vexé.
Car pour être franc … les gens de grande piété m’emmerdent… et qu’on puisse me confondre avec eux me blesse.
Par contre, des explications auraient été les bien venues.
Jeter Gaillot comme une vieille chaussette, ou craquer une allumette sous le bûcher de Giordano Bruno…
L’intensité du drame change, mais le principe reste le même.
Cela restera toujours un grand mystère pour moi, que l’on puisse juger au nom du Christ…
Que l’on puisse rejeter au nom du Christ…
Que l’on puisse tuer au nom du Christ…
Et qu’après tout ça on puisse encore se satisfaire en allumant un cierge et chanter une ritournelle !
Comment peut on à ce point être si sûr de soi ?
Janus- Jeune Padawan
- Nombre de messages : 52
Localisation : France
Identité métaphysique : Mystique
Humeur : Attentif
Date d'inscription : 15/10/2010
Re: Sainte Assurance …
"la pire des injustices est le déni de vérité ; qui est la calomnie »
qui est le crime contre l'esprit , le seul sans rémission .
qui est le crime contre l'esprit , le seul sans rémission .
JO- Seigneur de la Métaphysique
- Nombre de messages : 22786
Localisation : france du sud
Identité métaphysique : ailleurs
Humeur : paisiblement réactive
Date d'inscription : 23/08/2009
Re: Sainte Assurance …
____________________________________
L’exclusion, sous toutes ses formes, m’apparaît comme un déni d’amour qui, à bien y regarder, n’affecte que ceux qui se croient dépositaires d’un acquis, dont, comme autant de Papes, ils s’imaginent pouvoir disposer à leur guise.
____________________________________
Souvenirs de Parténia …
Ce doit être dans l’après midi du 13 janvier 1996…
Pour ce premier anniversaire, il y a du monde à l’aumônerie universitaire de Strasbourg.
La salle principale est comble, et ça déborde dans le vestibule, où ça discute ferme.
Georges Federmann vient de remercier Jean-Paul II, non pas d’avoir révoqué Gaillot, mais ce faisant, de nous avoir offert une occasion de rencontre.
La salle exulte, on applaudit à tout rompre, on siffle d’enthousiasme : l’ambiance est à la fête ; ils sont tous là, les visiteurs épisodiques de cette année.
Les amis de Georges, bien sûr ; les déconsidérés, les ‘clandestins de la morale’, lesbiennes et gays ; mais pas seulement, les blessés de la vie, les sans droits de la rue, des squats ; nord-africains sans papiers, pour la plupart, sont également de la partie.
Ce ne sont pas les seuls musulmans de la salle, d’autres viennent d’apporter leur témoignage d’exclus du concordat.
Des kippas aussi, présentes en ce samedi.
L’association France/Israël pour la paix ? Pas seulement …
Gaillot était compris au-delà de sa chapelle.
Des catholiques, bien sûr en nombre.
Compagnons de chantier ?... Catholiques du parvis ? Pas tant que ça… Quelques prêtres … quelques compagnes … Mais surtout la ‘catholicité de l’attente’, qui pressent que le temps des messes basses est révolu.
Quelques pasteurs, hommes et femmes, qui ne sont pas venus seuls ; le ‘protestantisme du renouveau’, en attente d’un souffle que lui aussi pressent dans cet élan parténien, est là, dans l’assemblée.
D’autres ‘présences’ encore plus surprenantes, quelques frères trois points, pour une fois déclarés … Quelques bouddhistes …
Un carré de communistes de la CGT … Des prêtres-ouvriers de la même CGT …
Et quelques atypiques comme moi, qui, yeux et oreilles en surprise, se laissent aller à goûter cette fête inattendue.
Une fête ?!
J’ignore comment cet anniversaire se déroule ailleurs, mais à Strasbourg, c’est la fête.
Les orateurs sont vite passés.
Le brouhaha joyeux a gagné le public, qui se sent une vocation d’acteur.
On s’interpelle, on plaisante ?... Pour la forme, oui… On parle, on s’écoute, on échange ? Oui … Oui, mais c’est autre chose … Cette chaleur est bien plus que le fruit d’une agitation …
Mon regard est extérieur, en recul, silencieux.
Ici un juif, un musulman et un catholique, ici un protestant, une lesbienne et un prêtre-ouvrier, là un universitaire, un SDF et un cadre de l’industrie encore en costar/cravate.
Je parcours les groupes, en observateur passif ; les barrières … où sont les barrières ??
Des musulmans et des militantes féministes, des catholiques et des communistes, de jeunes anars et un prêtre, un étudiant homosexuel et un rabbin …
Où est le mur … où sont les bornes antiques ?
La tonalité est partout semblable : la joie … Tous se côtoient dans la joie …
Il m’a fallu des années pour en comprendre la nature profonde.
____________________________________
Près de 10 ans plus tard, en novembre 2005, je rencontre un des prêtres, non plus ouvrier, mais à la retraite.
Face à ce toujours prêtre, je me sens obligé de me rendre sur son terrain : je cite la parabole des noces, où l’on reçoit table ouverte, dans un lieu sans porte, sans linteau, sans murs ; revêtu de l’habit de noce de l’acceptation.
Son attention est impassible pendant que je lui remémore cette journée, et m’attarde en lui décrivant ce que j’avais compris de la joie du partage d’une victoire commune remportée sur la suspicion.
Il m’écoute, longuement et poliment, en souriant toutefois en coin de m’entendre raconter un bonheur que je n’avais fait que côtoyer en touriste, survoler en étranger ; et de conclure pour moi avec simplicité :
« Moi, c’est comme ça que je vois le monde de demain ! »
L’exclusion, sous toutes ses formes, m’apparaît comme un déni d’amour qui, à bien y regarder, n’affecte que ceux qui se croient dépositaires d’un acquis, dont, comme autant de Papes, ils s’imaginent pouvoir disposer à leur guise.
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Souvenirs de Parténia …
Ce doit être dans l’après midi du 13 janvier 1996…
Pour ce premier anniversaire, il y a du monde à l’aumônerie universitaire de Strasbourg.
La salle principale est comble, et ça déborde dans le vestibule, où ça discute ferme.
Georges Federmann vient de remercier Jean-Paul II, non pas d’avoir révoqué Gaillot, mais ce faisant, de nous avoir offert une occasion de rencontre.
La salle exulte, on applaudit à tout rompre, on siffle d’enthousiasme : l’ambiance est à la fête ; ils sont tous là, les visiteurs épisodiques de cette année.
Les amis de Georges, bien sûr ; les déconsidérés, les ‘clandestins de la morale’, lesbiennes et gays ; mais pas seulement, les blessés de la vie, les sans droits de la rue, des squats ; nord-africains sans papiers, pour la plupart, sont également de la partie.
Ce ne sont pas les seuls musulmans de la salle, d’autres viennent d’apporter leur témoignage d’exclus du concordat.
Des kippas aussi, présentes en ce samedi.
L’association France/Israël pour la paix ? Pas seulement …
Gaillot était compris au-delà de sa chapelle.
Des catholiques, bien sûr en nombre.
Compagnons de chantier ?... Catholiques du parvis ? Pas tant que ça… Quelques prêtres … quelques compagnes … Mais surtout la ‘catholicité de l’attente’, qui pressent que le temps des messes basses est révolu.
Quelques pasteurs, hommes et femmes, qui ne sont pas venus seuls ; le ‘protestantisme du renouveau’, en attente d’un souffle que lui aussi pressent dans cet élan parténien, est là, dans l’assemblée.
D’autres ‘présences’ encore plus surprenantes, quelques frères trois points, pour une fois déclarés … Quelques bouddhistes …
Un carré de communistes de la CGT … Des prêtres-ouvriers de la même CGT …
Et quelques atypiques comme moi, qui, yeux et oreilles en surprise, se laissent aller à goûter cette fête inattendue.
Une fête ?!
J’ignore comment cet anniversaire se déroule ailleurs, mais à Strasbourg, c’est la fête.
Les orateurs sont vite passés.
Le brouhaha joyeux a gagné le public, qui se sent une vocation d’acteur.
On s’interpelle, on plaisante ?... Pour la forme, oui… On parle, on s’écoute, on échange ? Oui … Oui, mais c’est autre chose … Cette chaleur est bien plus que le fruit d’une agitation …
Mon regard est extérieur, en recul, silencieux.
Ici un juif, un musulman et un catholique, ici un protestant, une lesbienne et un prêtre-ouvrier, là un universitaire, un SDF et un cadre de l’industrie encore en costar/cravate.
Je parcours les groupes, en observateur passif ; les barrières … où sont les barrières ??
Des musulmans et des militantes féministes, des catholiques et des communistes, de jeunes anars et un prêtre, un étudiant homosexuel et un rabbin …
Où est le mur … où sont les bornes antiques ?
La tonalité est partout semblable : la joie … Tous se côtoient dans la joie …
Il m’a fallu des années pour en comprendre la nature profonde.
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Près de 10 ans plus tard, en novembre 2005, je rencontre un des prêtres, non plus ouvrier, mais à la retraite.
Face à ce toujours prêtre, je me sens obligé de me rendre sur son terrain : je cite la parabole des noces, où l’on reçoit table ouverte, dans un lieu sans porte, sans linteau, sans murs ; revêtu de l’habit de noce de l’acceptation.
Son attention est impassible pendant que je lui remémore cette journée, et m’attarde en lui décrivant ce que j’avais compris de la joie du partage d’une victoire commune remportée sur la suspicion.
Il m’écoute, longuement et poliment, en souriant toutefois en coin de m’entendre raconter un bonheur que je n’avais fait que côtoyer en touriste, survoler en étranger ; et de conclure pour moi avec simplicité :
« Moi, c’est comme ça que je vois le monde de demain ! »
Janus- Jeune Padawan
- Nombre de messages : 52
Localisation : France
Identité métaphysique : Mystique
Humeur : Attentif
Date d'inscription : 15/10/2010
Re: Sainte Assurance …
Pour quelles raisons Jacques Gaillot a-t-il été non pas révoqué mais, disons-le carrément, bien plutôt exilé ?
Le trappiste- Affranchi des Paradoxes
- Nombre de messages : 211
Localisation : Chimay
Identité métaphysique : Catholique
Humeur : Heureux
Date d'inscription : 19/10/2010
Re: Sainte Assurance …
À la lecture de ces mots, je ne peux que m'émouvoir... Comprendre est une chose effroyable ; tout semble si inéluctable, quand on comprend.
Alors je trouve ça admirable de comprendre et d'agir quand même. Ça n'est pas en pure perte, quoiqu'ils s'emmurent dans leur surdité chérie, les puissants de tous bords.
La machine à broyer, la machine à baillonner qu'est toute institution ne pouvait pas répondre, bien sûr... tout comme Gaillot ne pouvait pas ne pas être éjecté - les infiltrés ne font jamais de vieux os, ou bien alors, c'est pire, ils sont récupérés et sanctifiés par ceux qui, hier encore, essayaient de les neutraliser.
Il n'empêche, il y a bel et bien une action produite ; en élevant une voix, avec la force de son émotion, on finit par symboliser quelque chose. Et ce symbole a la vie dure... Seule la sanctification la menace.
Merci de m'avoir rappelé que quand on voit, on a le devoir de dire. Cette flamme-là, ce devoir envers sa conscience, est à mon sens le seul remède contre la flemme envahissante, acédique. Puissent les chrétiens s'en souvenirs quand ils allument des cierges...
Alors je trouve ça admirable de comprendre et d'agir quand même. Ça n'est pas en pure perte, quoiqu'ils s'emmurent dans leur surdité chérie, les puissants de tous bords.
La machine à broyer, la machine à baillonner qu'est toute institution ne pouvait pas répondre, bien sûr... tout comme Gaillot ne pouvait pas ne pas être éjecté - les infiltrés ne font jamais de vieux os, ou bien alors, c'est pire, ils sont récupérés et sanctifiés par ceux qui, hier encore, essayaient de les neutraliser.
Il n'empêche, il y a bel et bien une action produite ; en élevant une voix, avec la force de son émotion, on finit par symboliser quelque chose. Et ce symbole a la vie dure... Seule la sanctification la menace.
Merci de m'avoir rappelé que quand on voit, on a le devoir de dire. Cette flamme-là, ce devoir envers sa conscience, est à mon sens le seul remède contre la flemme envahissante, acédique. Puissent les chrétiens s'en souvenirs quand ils allument des cierges...
Morphée- Jeune Padawan
- Nombre de messages : 75
Localisation : -
Identité métaphysique : -
Humeur : -
Date d'inscription : 27/10/2010
Re: Sainte Assurance …
… sainte pastorale d’un ange !...
____________________________________
Mes pensées vont à un compagnon de Christ …
Un absent aux yeux ouverts sur le monde.
Il est au centre du brouhaha surchauffé,
prisonnier de l’agitation de la salle encombrée.
Et pourtant il est loin … dans sa prière …
Des filles dénudées arrangent la soie de leur cache-sexe,
d’autres les plumes sur leurs seins.
La voix du régisseur … « 30 secondes !... » … Vite on se place …
.........
Quelle est-elle, sa prière ?... Peut-être … « Donne moi la force !... »
.........
Il s’avance, sourire aux lèvres … micro en main …. et chante …
« On ira tous au Paradis … Même moi … »
.........
Elle aura son prix, cette chanson…
Des litières de mépris ; évacuées par des tombereaux haineux …
… Chez ses ennemis …
Une désapprobation sourde ; évacuée dans un silence gêné …
… Chez ses amis …
Et une incommensurable gratitude ; reçue avec un respect à la mesure de la tendresse offerte …
… Chez des étrangers inconnus …
.........
Lorsqu’un homme accepte un message … il devient compagnon …
Lorsque le compagnon s’offre au message … il devient messager …
Lorsque le messager s’offre au vulgaire … il devient témoin …
Lorsque le vulgaire accueille le témoin … il reçoit l’amitié de Christ …
Or l’ami de Christ est déjà au Paradis !
**************************************************
Aucun maître ne peut témoigner … car aucun maître ne sait offrir …
Et le maître qui prend ; tôt ou tard s’attaquera au témoin qui s’offre.
De ce fait, accorder à un maître le même regard qu’au témoin ;
c’est déjà déchirer le message.
Comment alors ne pas se tromper de pierres …
Comment alors ne pas se tromper d’outils ?
Nul ne peut servir deux maîtres …est-il dit …
Deux ? ? ? ? …
Un !... Un serait déjà de trop !
Car le compagnon de Christ ; esclave de lui, est déjà son propre maître !
____________________________________
Mes pensées vont à un compagnon de Christ …
Un absent aux yeux ouverts sur le monde.
Il est au centre du brouhaha surchauffé,
prisonnier de l’agitation de la salle encombrée.
Et pourtant il est loin … dans sa prière …
Des filles dénudées arrangent la soie de leur cache-sexe,
d’autres les plumes sur leurs seins.
La voix du régisseur … « 30 secondes !... » … Vite on se place …
.........
Quelle est-elle, sa prière ?... Peut-être … « Donne moi la force !... »
.........
Il s’avance, sourire aux lèvres … micro en main …. et chante …
« On ira tous au Paradis … Même moi … »
.........
Elle aura son prix, cette chanson…
Des litières de mépris ; évacuées par des tombereaux haineux …
… Chez ses ennemis …
Une désapprobation sourde ; évacuée dans un silence gêné …
… Chez ses amis …
Et une incommensurable gratitude ; reçue avec un respect à la mesure de la tendresse offerte …
… Chez des étrangers inconnus …
.........
Lorsqu’un homme accepte un message … il devient compagnon …
Lorsque le compagnon s’offre au message … il devient messager …
Lorsque le messager s’offre au vulgaire … il devient témoin …
Lorsque le vulgaire accueille le témoin … il reçoit l’amitié de Christ …
Or l’ami de Christ est déjà au Paradis !
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Aucun maître ne peut témoigner … car aucun maître ne sait offrir …
Et le maître qui prend ; tôt ou tard s’attaquera au témoin qui s’offre.
De ce fait, accorder à un maître le même regard qu’au témoin ;
c’est déjà déchirer le message.
Comment alors ne pas se tromper de pierres …
Comment alors ne pas se tromper d’outils ?
Nul ne peut servir deux maîtres …est-il dit …
Deux ? ? ? ? …
Un !... Un serait déjà de trop !
Car le compagnon de Christ ; esclave de lui, est déjà son propre maître !
Anthyme- Maître du Temps
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Re: Sainte Assurance …
Paix, shalom,ترجمة عربية
JO- Seigneur de la Métaphysique
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Re: Sainte Assurance …
Matière à rêver ?…
… ou à lutter ?...
___________________________________
L’été, il fait encore jour ; je ne me laisse pas distraire.
Le travail se poursuit dans la normalité du quotidien.
L’hiver c’est différent ; vers 19 heures, je sais que je suis seul.
Les lampes individuelles sont éteintes ; et ne reste que l’éclairage cru du plafond, aux ombres croisées devant les rectangles de nuit des fenêtres.
L’atelier déserté est également masqué dans la pénombre des lumières de sécurité, derrière les vitrages des bureaux.
Jusqu’à cet instant, j’étais à pousser ma souris, en peaufinant un montage mécanique sur mon écran.
Mais dans cette ambiance particulière, son arrivée m’a stoppé net.
Je reste là ; à feindre la concentration, les yeux mi-clos.
Et elle ; elle s’applique à laver en silence, à cause de moi.
Un handicap supplémentaire, car sa charge de travail est importante.
C’est précisément parce que les bruits sont furtifs, dans ce silence nocturne, qu’ils m’émeuvent et m’envahissent avec cette force.
J’écoute sa progression, presque à la façon d’un amant …
… Sa caresse appliquée du sol …
… L’essorage pudique de la serpillère …
… Une approche dont je goûte la délicatesse avec sensualité …
… Elle est là …
« Bonsoir, Madame, ne vous attardez pas autour de mon bureau, ça ira comme ça »
« … »
« Je suis désolé, un dossier à finir … »
« Mais non … Il n’y a pas de problème … »
Et elle passe au poste suivant …
Cependant son regard en coin ne m’a pas échappé :
J’ai eu l’occasion un soir d’assister à la tournée d’inspection de l’imbécile qui gère la société chargée du nettoyage.
« Si on vous fait un problème, dites que je ne voulais pas être dérangé. »
Mes yeux parlent pour moi.
Un sourire fugace et pathétique me répond.
Brève victoire d’un non-dit complice …
… mais silence résigné d’une femme de bientôt trente ans …
___________________________________
Un autre visage, porté par un souvenir de 15 ans…
… Tournai, le 25 décembre 1995…
Ce doit être entre 16 et 17 heures, il fait presque nuit …
Les trottoirs sont glissants entre les tas de neige ; un givre porté par le blizzard qui me fouette les yeux, entre mon cache-nez et ma capuche.
Les rares passants ne trainent pas…
Je m’attarde un instant sur les enseignes des bistrots.
J’hésite … Je n’en aime pas l’ambiance.
De vieilles pierres à ma droite :
Au moins 600 ans d’âge ; ça me convient.
La porte se referme dans un grincement.
Il fait bon ici ; cependant l’éclairage de la Grand-Place fait défaut.
L’œil doit s’habituer.
Je me dépêche toutefois d’évacuer la porte, car je n’aime pas traîner à proximité d’un bénitier, avec cette manie qu’ont les catholiques de vous tendre la main, après l’avoir trempée dans l’eau.
Il fut un temps où leur regard m’amusait, après mon « Non merci. »
C’est maintenant différent, car j’aurais le sentiment de rejeter celle de Gaillot.
Cependant cette perspective m’incite au déplacement ; et tant pis pour le choc thermique qui devient indisposant.
C’est seulement devant un panneau explicatif que je prends le temps d’ouvrir mes vêtements.
Je me suis trompé de deux siècles :
Eglise Saint Quentin de Tournai : Nef romane du XII° ; Tour du XIII° ; un tombeau entre nef et transept … D’autres bidules du XVII° à voir …
Eh bien … Voyons …
J’évite la nef centrale et progresse lentement par le bas-côté gauche.
Mes semelles sont chargées de sel et craquent sur le dallage.
Je m’arrête à l’affût.
D’autres craquements similaires … Quelques ombres furtives …
Combien sommes-nous ? Cinq ou six, on dirait.
Je continue, mais sur la pointe des pieds.
J’arrive au dernier pilier avant le transept.
Des lumières, tout à fait à droite.
Une silhouette devant des cierges.
J’écoute à nouveau.
Pas très loin, devant moi, une chapelle orientée, comme souvent aux extrémités des transepts.
On semble y prier ; je n’aime pas déranger.
Je rebrousse donc chemin et traverse la nef entre deux rangées de bancs.
J’avais bien vu.
Un gigantesque candélabre circulaire se trouve dans le prolongement du déambulatoire.
Une petite de 13-14 ans y rallume des cierges éteints.
Je ne bouge plus, et profite de l’ombre d’un pilier pour la regarder faire.
Ses gestes sont d’une application qui me rappelle le jardinier de Saint-Exupéry.
Elle ne joue pas à allumer des cierges …
… elle cultive des flammes.
Prudence et méthode …
Un petit pas en arrière à chaque flamme éveillée.
Je la vois maintenant de face, parfaitement éclairée.
Un beau visage fin, les cheveux cachés dans un bonnet de laine.
Ma mère tricotait : je sais reconnaître l’ondulation caractéristique de la laine de récupération.
D’autres indices …
Un manteau étriqué, aux manches trop courtes et de fait généreusement entrouvert.
Un pull-over de la même laine que le bonnet.
Une jupe de toile trop fine pour ce temps.
Je ne vois pas ses chaussures, probablement trop fines également.
Cette petite vient d’une maison où l’on n’a rien à gaspiller !
La mélancolie me gagne tandis que je la regarde prier.
Car elle prie, à n’en pas douter.
Quelques instants encore … mais … Chierie de résignation !!!!
… mais je préfère la morsure du blizzard à celle des larmes …
___________________________________
Quel âge a-t-elle aujourd’hui, cette petite ?
Probablement celui de la femme de ménage.
Leurs attentes déçues se rejoignent dans ma mémoire.
Ne jamais se soumettre ! Ne jamais se résigner !
… ou à lutter ?...
___________________________________
L’été, il fait encore jour ; je ne me laisse pas distraire.
Le travail se poursuit dans la normalité du quotidien.
L’hiver c’est différent ; vers 19 heures, je sais que je suis seul.
Les lampes individuelles sont éteintes ; et ne reste que l’éclairage cru du plafond, aux ombres croisées devant les rectangles de nuit des fenêtres.
L’atelier déserté est également masqué dans la pénombre des lumières de sécurité, derrière les vitrages des bureaux.
Jusqu’à cet instant, j’étais à pousser ma souris, en peaufinant un montage mécanique sur mon écran.
Mais dans cette ambiance particulière, son arrivée m’a stoppé net.
Je reste là ; à feindre la concentration, les yeux mi-clos.
Et elle ; elle s’applique à laver en silence, à cause de moi.
Un handicap supplémentaire, car sa charge de travail est importante.
C’est précisément parce que les bruits sont furtifs, dans ce silence nocturne, qu’ils m’émeuvent et m’envahissent avec cette force.
J’écoute sa progression, presque à la façon d’un amant …
… Sa caresse appliquée du sol …
… L’essorage pudique de la serpillère …
… Une approche dont je goûte la délicatesse avec sensualité …
… Elle est là …
« Bonsoir, Madame, ne vous attardez pas autour de mon bureau, ça ira comme ça »
« … »
« Je suis désolé, un dossier à finir … »
« Mais non … Il n’y a pas de problème … »
Et elle passe au poste suivant …
Cependant son regard en coin ne m’a pas échappé :
J’ai eu l’occasion un soir d’assister à la tournée d’inspection de l’imbécile qui gère la société chargée du nettoyage.
« Si on vous fait un problème, dites que je ne voulais pas être dérangé. »
Mes yeux parlent pour moi.
Un sourire fugace et pathétique me répond.
Brève victoire d’un non-dit complice …
… mais silence résigné d’une femme de bientôt trente ans …
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Un autre visage, porté par un souvenir de 15 ans…
… Tournai, le 25 décembre 1995…
Ce doit être entre 16 et 17 heures, il fait presque nuit …
Les trottoirs sont glissants entre les tas de neige ; un givre porté par le blizzard qui me fouette les yeux, entre mon cache-nez et ma capuche.
Les rares passants ne trainent pas…
Je m’attarde un instant sur les enseignes des bistrots.
J’hésite … Je n’en aime pas l’ambiance.
De vieilles pierres à ma droite :
Au moins 600 ans d’âge ; ça me convient.
La porte se referme dans un grincement.
Il fait bon ici ; cependant l’éclairage de la Grand-Place fait défaut.
L’œil doit s’habituer.
Je me dépêche toutefois d’évacuer la porte, car je n’aime pas traîner à proximité d’un bénitier, avec cette manie qu’ont les catholiques de vous tendre la main, après l’avoir trempée dans l’eau.
Il fut un temps où leur regard m’amusait, après mon « Non merci. »
C’est maintenant différent, car j’aurais le sentiment de rejeter celle de Gaillot.
Cependant cette perspective m’incite au déplacement ; et tant pis pour le choc thermique qui devient indisposant.
C’est seulement devant un panneau explicatif que je prends le temps d’ouvrir mes vêtements.
Je me suis trompé de deux siècles :
Eglise Saint Quentin de Tournai : Nef romane du XII° ; Tour du XIII° ; un tombeau entre nef et transept … D’autres bidules du XVII° à voir …
Eh bien … Voyons …
J’évite la nef centrale et progresse lentement par le bas-côté gauche.
Mes semelles sont chargées de sel et craquent sur le dallage.
Je m’arrête à l’affût.
D’autres craquements similaires … Quelques ombres furtives …
Combien sommes-nous ? Cinq ou six, on dirait.
Je continue, mais sur la pointe des pieds.
J’arrive au dernier pilier avant le transept.
Des lumières, tout à fait à droite.
Une silhouette devant des cierges.
J’écoute à nouveau.
Pas très loin, devant moi, une chapelle orientée, comme souvent aux extrémités des transepts.
On semble y prier ; je n’aime pas déranger.
Je rebrousse donc chemin et traverse la nef entre deux rangées de bancs.
J’avais bien vu.
Un gigantesque candélabre circulaire se trouve dans le prolongement du déambulatoire.
Une petite de 13-14 ans y rallume des cierges éteints.
Je ne bouge plus, et profite de l’ombre d’un pilier pour la regarder faire.
Ses gestes sont d’une application qui me rappelle le jardinier de Saint-Exupéry.
Elle ne joue pas à allumer des cierges …
… elle cultive des flammes.
Prudence et méthode …
Un petit pas en arrière à chaque flamme éveillée.
Je la vois maintenant de face, parfaitement éclairée.
Un beau visage fin, les cheveux cachés dans un bonnet de laine.
Ma mère tricotait : je sais reconnaître l’ondulation caractéristique de la laine de récupération.
D’autres indices …
Un manteau étriqué, aux manches trop courtes et de fait généreusement entrouvert.
Un pull-over de la même laine que le bonnet.
Une jupe de toile trop fine pour ce temps.
Je ne vois pas ses chaussures, probablement trop fines également.
Cette petite vient d’une maison où l’on n’a rien à gaspiller !
La mélancolie me gagne tandis que je la regarde prier.
Car elle prie, à n’en pas douter.
Quelques instants encore … mais … Chierie de résignation !!!!
… mais je préfère la morsure du blizzard à celle des larmes …
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Quel âge a-t-elle aujourd’hui, cette petite ?
Probablement celui de la femme de ménage.
Leurs attentes déçues se rejoignent dans ma mémoire.
Ne jamais se soumettre ! Ne jamais se résigner !
Anthyme- Maître du Temps
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Re: Sainte Assurance …
mais se soumettre n'est pas forcément se résigner : la fleur attend le printemps , sous la neige . Monseigneur Gaillot est toujours actif et pas si loin . Il n'a pas rompu avec sa vocation, seulement avec les traitres à la leur . La petite pauvresse a une richesse spirituelle qui la tient droite . Il y a les combattants et puis les résistants... mieux : quelques résilients. A eux tous, ils changent le monde , lentement . Le pire, c'est l'indifférence, la collusion avec la médiocrité repue .
JO- Seigneur de la Métaphysique
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Re: Sainte Assurance …
Monseigneur Gaillot calmera les esprits en déclarant lors de sa messe d'adieu : « n'ayons pas de violence en nous. Ce jour est un jour de fête et de joie… l'événement qui s'est passé est révélateur des aspirations profondes qui sont en attente dans la société comme dans l'église. »
Etre de Partenia, c'est le suivre en ce sens ...
Etre de Partenia, c'est le suivre en ce sens ...
JO- Seigneur de la Métaphysique
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Date d'inscription : 23/08/2009
Re: Sainte Assurance …
Personnellement, pour reprendre votre formule, je ne « suis pas de Parténia ».
De plus, j’évite de trop écouter ce que Votreseigneur Gaillot peut dire ici ou là.
Ses opinions étant rarement les miennes ; cela m’épargne d’avoir à commenter :
Ses ennemis le font bien mieux que moi.
Pour ce qui concerne la citation sirupeuse de sa dernière homélie ; il eut été préférable de la chercher ailleurs que dans une source BCBG du catholicisme.
Pour info voir ci-dessous …
========================================
Homélie prononcée à la cathédrale d'Evreux le 22 janvier 1995.
J'ai bonheur de voir votre assemblée composée des femmes et des hommes les plus divers.
Par vos couleurs, par vos dons variés, vous enchantez ma vie.
Merci à toutes les personnes âgées et aux malades qui m'ont transmis l'assurance de leurs prières, merci aux enfants qui m'ont offert un dessin.
Merci aux prêtres et aux diacres d'Evreux qui m'ont assisté et supporté.
Merci aux évêques de leur présence.
Merci à ceux qui m'ont adressé souvent - et jusqu'à ces derniers jours - de multiples mots d'amitié.
Mon bureau déborde du fleuve de vos lettres.
Quelles grâces pour moi d'être accompagné de toutes ces bontés de votre cœur.
Quand je suis venu parmi vous il y a 12 ans, la cathédrale arrivait à contenir les chrétiens rassemblés.
Au moment de vous quitter, la cathédrale ne peut plus accueillir tous ceux qui viennent de loin.
La foule immense est dehors. Croyants ou non.
Merci aussi à ceux qui ne croient pas, d'être là.
La vigilance critique des non-croyants est vitale : elle tient en éveil la conscience évangélique des chrétiens.
Réjouissons-nous de la diversité de notre assemblée.
Nous avons besoin les uns des autres pour vivre de manière créatrice.
Nous voici rassemblés pour ouvrir le livre de la Vie.
La Parole de Dieu est lumière pour la route.
Parole qui guérit et libère les cœurs de ceux qui sont blessés.
N'ayons pas de haine, pas de violence en nous.
Notre cœur n'est pas fait pour haïr.
Que la terre tremble au Japon, que les hommes s'entre-déchirent en Tchétchénie, que des jeunes sans travail errent dans les nuits fauves des banlieues, suffit à la détresse de Dieu.
Ne pleurez pas. Ne prenez pas le deuil.
Ce jour est un jour de fête et de joie.
La vague de confiance et de solidarité surgie parmi les gens les plus divers est devenue une rumeur d'espérance.
L'événement qui s'est passé est révélateur des aspirations profondes qui sont en attente dans la société comme dans l'Eglise.
Aspiration à la liberté de parole, au droit à la différence, au respect de la dignité de chacun, à la démocratie.
Ce sont des valeurs que beaucoup réclament et attendent, car bien souvent les responsables agissent et décident sans tenir compte des gens.
L'Apôtre Paul invite chacun à prendre sa part de responsabilité.
Le Corps du Christ c'est le peuple de Dieu, ici, à Evreux et partout.
Ce sont tous les croyants, toutes les communautés venues de loin pour être à cette heure le Peuple de Dieu rassemblé pour l'Eucharistie, pour l'Action de grâce.
Le Corps du Christ, le peuple de Dieu forme un tout que rien ne doit rompre, ni personne, ni ici, ni ailleurs.
« Soyez un, nous redit Jésus, pour que le monde croie que tu m'as envoyé. » (Jean ch. 17 - V.21)
Le Corps du Christ n'existe pas encore dans sa plénitude tant qu'il subsiste des murs entre les hommes, et plus encore entre les chrétiens, tant que tous « désaltérés par l'Unique Esprit » ne bénéficieront pas d'une vraie reconnaissance dans l'amour fraternel.
Le Corps du Christ, le peuple de Dieu que vous représentez en ce moment est un lieu de compassion et de partage de toute chose.
Si un membre souffre, tous les membres partagent sa souffrance, si un membre est à l'honneur, tous se partagent sa joie.
Tous ici présents, donnez un avenir au Peuple de Dieu.
C'est vous le Corps du Christ.
Chacun pour notre part, nous sommes les membres de ce Corps.
Chacun à votre place, quelle qu'elle soit, nous en sommes responsables.
Et cette responsabilité du Peuple de Dieu c'est sa Mission.
L'Evangile de Luc nous rappelle que c'est la Mission du Christ lui-même et qu'elle lui vient de Dieu.
Cette mission n'appartient à personne.
Et nul ne peut l'accaparer et s'en dire propriétaire.
Chaque baptisé en est porteur, dans la communion de l'Esprit Saint.
Cette mission n'a pas changé depuis le jour où, s'appuyant sur la prophétie d'Isaïe, Jésus l'a définie une fois pour toutes :
« L'Esprit du Seigneur est sur moi
Parce que le Seigneur m'a consacré par l'Onction
Il m'a envoyé porter la Bonne Nouvelle aux pauvres
Il m'a envoyé annoncer aux prisonniers qu'ils sont libres
Il m'a envoyé annoncer aux aveugles qu'ils verront la lumière
Il m'a envoyé apporter aux opprimés la libération et annoncer une année de bienfaits accordés par le Seigneur. »
Cette parole de l'Ecriture, que vous venez d'entendre, c'est aujourd'hui qu'elle s'accomplit.
Elle s'accomplit si nous la proclamons au pluriel et au présent.
Le Seigneur nous envoie - vous et moi - sur les chemins différents qui sont et vont être les nôtres.
Le Seigneur nous envoie aujourd'hui partout à la rencontre des femmes et des hommes pour la même annonce du bonheur.
Ce que j'ai vécu avec vous ici dans ce diocèse d'Evreux, ce que j'ai vécu ailleurs dans toutes sortes de circonstances et d'occasions, me montre clairement que ces paroles du Christ sont le seul chemin de la Mission, que tout chrétien, toute communauté, toute Eglise qui ne prend pas, d'abord, avant tout, les chemins de la détresse des hommes n'a aucune chance d'être entendu comme porteur d'une Bonne Nouvelle.
Que tout homme, toute communauté, toute Eglise qui ne se fait pas d'abord, avant tout, fraternelle avec tout homme, ne pourra pas trouver le chemin de son cœur, l'endroit secret où peut être accueillie cette Bonne Nouvelle.
Pour ma part, en communion avec l'Eglise, je continuerai mon chemin pour porter la Bonne Nouvelle aux pauvres.
L'Evangile est un message de liberté et d'amour.
Annoncer Dieu aujourd'hui, c'est défendre la liberté de l'homme quel qu'il soit.
La liberté de devenir vraiment homme, c'est aussi vivre de solidarité, être en particulier la voix des sans-voix.
Le Corps du Christ n'est pas achevé, il se construit.
Donnons-lui un avenir, chacun à notre manière, dans le respect des personnes, dans la liberté de conscience et d'expression, dans l'ouverture au monde qui cherche lui-même les chemins de son avenir.
Chacun d'entre nous est une petite cellule : nécessaire à sa vie.
Qu'elle se sente meurtrie, abîmée, exclue et c'est le corps tout entier qui souffre.
Accompagnons le fraternellement, sans peur, sur ces chemins souvent nouveaux et inquiétants pour nous, mais tellement passionnants et porteurs d'Espérance.
La Mission continue.
Elle non plus n'est pas à son terme.
Donnons-lui un avenir, chacun selon sa vocation, selon les événements, chacun selon ses dons.
Mission de plus en plus fraternelle.
Mission fidèle à l'attention pour celui que Jésus accueille en priorité: le plus petit d'entre les siens.
Jésus est le pauvre, l'exclu dans lequel nous nous retrouvons.
C'est en lui paradoxalement que s'ouvre l'avenir, que s'enracine l'Espérance.
L'Eglise doit être l'Eglise des exclus et pas de l'exclusion.
Le Christ a connu, dans sa chair, ce chemin : Celui de l'abandon, de la condamnation injuste, de l'exclusion.
Celui de la résurrection où les portes de l'Espérance se sont ouvertes tout grand sur le monde pour des heures de joie, de tendresse, pour la paix possible, pour l'Espérance jamais vaincue.
Cette vague de confiance et de solidarité qui s'est formée aujourd'hui ne doit pas retomber.
On ne peut rester les bras croisés.
Quand un peuple prend la parole, des chemins nouveaux s'ouvrent.
Des initiatives se prennent.
Quand un peuple prend la parole, il n'y a plus de peur ni de crainte, mais des énergies neuves qui se déploient partout.
Jacques Gaillot.
========================================
Gaillot n’aime pas les murs.
Et moi je n’aime pas les serrures.
C’est ce qui me le rend proche et compréhensible …
De plus, j’évite de trop écouter ce que Votreseigneur Gaillot peut dire ici ou là.
Ses opinions étant rarement les miennes ; cela m’épargne d’avoir à commenter :
Ses ennemis le font bien mieux que moi.
Pour ce qui concerne la citation sirupeuse de sa dernière homélie ; il eut été préférable de la chercher ailleurs que dans une source BCBG du catholicisme.
Pour info voir ci-dessous …
========================================
Homélie prononcée à la cathédrale d'Evreux le 22 janvier 1995.
J'ai bonheur de voir votre assemblée composée des femmes et des hommes les plus divers.
Par vos couleurs, par vos dons variés, vous enchantez ma vie.
Merci à toutes les personnes âgées et aux malades qui m'ont transmis l'assurance de leurs prières, merci aux enfants qui m'ont offert un dessin.
Merci aux prêtres et aux diacres d'Evreux qui m'ont assisté et supporté.
Merci aux évêques de leur présence.
Merci à ceux qui m'ont adressé souvent - et jusqu'à ces derniers jours - de multiples mots d'amitié.
Mon bureau déborde du fleuve de vos lettres.
Quelles grâces pour moi d'être accompagné de toutes ces bontés de votre cœur.
Quand je suis venu parmi vous il y a 12 ans, la cathédrale arrivait à contenir les chrétiens rassemblés.
Au moment de vous quitter, la cathédrale ne peut plus accueillir tous ceux qui viennent de loin.
La foule immense est dehors. Croyants ou non.
Merci aussi à ceux qui ne croient pas, d'être là.
La vigilance critique des non-croyants est vitale : elle tient en éveil la conscience évangélique des chrétiens.
Réjouissons-nous de la diversité de notre assemblée.
Nous avons besoin les uns des autres pour vivre de manière créatrice.
Nous voici rassemblés pour ouvrir le livre de la Vie.
La Parole de Dieu est lumière pour la route.
Parole qui guérit et libère les cœurs de ceux qui sont blessés.
N'ayons pas de haine, pas de violence en nous.
Notre cœur n'est pas fait pour haïr.
Que la terre tremble au Japon, que les hommes s'entre-déchirent en Tchétchénie, que des jeunes sans travail errent dans les nuits fauves des banlieues, suffit à la détresse de Dieu.
Ne pleurez pas. Ne prenez pas le deuil.
Ce jour est un jour de fête et de joie.
La vague de confiance et de solidarité surgie parmi les gens les plus divers est devenue une rumeur d'espérance.
L'événement qui s'est passé est révélateur des aspirations profondes qui sont en attente dans la société comme dans l'Eglise.
Aspiration à la liberté de parole, au droit à la différence, au respect de la dignité de chacun, à la démocratie.
Ce sont des valeurs que beaucoup réclament et attendent, car bien souvent les responsables agissent et décident sans tenir compte des gens.
L'Apôtre Paul invite chacun à prendre sa part de responsabilité.
Le Corps du Christ c'est le peuple de Dieu, ici, à Evreux et partout.
Ce sont tous les croyants, toutes les communautés venues de loin pour être à cette heure le Peuple de Dieu rassemblé pour l'Eucharistie, pour l'Action de grâce.
Le Corps du Christ, le peuple de Dieu forme un tout que rien ne doit rompre, ni personne, ni ici, ni ailleurs.
« Soyez un, nous redit Jésus, pour que le monde croie que tu m'as envoyé. » (Jean ch. 17 - V.21)
Le Corps du Christ n'existe pas encore dans sa plénitude tant qu'il subsiste des murs entre les hommes, et plus encore entre les chrétiens, tant que tous « désaltérés par l'Unique Esprit » ne bénéficieront pas d'une vraie reconnaissance dans l'amour fraternel.
Le Corps du Christ, le peuple de Dieu que vous représentez en ce moment est un lieu de compassion et de partage de toute chose.
Si un membre souffre, tous les membres partagent sa souffrance, si un membre est à l'honneur, tous se partagent sa joie.
Tous ici présents, donnez un avenir au Peuple de Dieu.
C'est vous le Corps du Christ.
Chacun pour notre part, nous sommes les membres de ce Corps.
Chacun à votre place, quelle qu'elle soit, nous en sommes responsables.
Et cette responsabilité du Peuple de Dieu c'est sa Mission.
L'Evangile de Luc nous rappelle que c'est la Mission du Christ lui-même et qu'elle lui vient de Dieu.
Cette mission n'appartient à personne.
Et nul ne peut l'accaparer et s'en dire propriétaire.
Chaque baptisé en est porteur, dans la communion de l'Esprit Saint.
Cette mission n'a pas changé depuis le jour où, s'appuyant sur la prophétie d'Isaïe, Jésus l'a définie une fois pour toutes :
« L'Esprit du Seigneur est sur moi
Parce que le Seigneur m'a consacré par l'Onction
Il m'a envoyé porter la Bonne Nouvelle aux pauvres
Il m'a envoyé annoncer aux prisonniers qu'ils sont libres
Il m'a envoyé annoncer aux aveugles qu'ils verront la lumière
Il m'a envoyé apporter aux opprimés la libération et annoncer une année de bienfaits accordés par le Seigneur. »
Cette parole de l'Ecriture, que vous venez d'entendre, c'est aujourd'hui qu'elle s'accomplit.
Elle s'accomplit si nous la proclamons au pluriel et au présent.
Le Seigneur nous envoie - vous et moi - sur les chemins différents qui sont et vont être les nôtres.
Le Seigneur nous envoie aujourd'hui partout à la rencontre des femmes et des hommes pour la même annonce du bonheur.
Ce que j'ai vécu avec vous ici dans ce diocèse d'Evreux, ce que j'ai vécu ailleurs dans toutes sortes de circonstances et d'occasions, me montre clairement que ces paroles du Christ sont le seul chemin de la Mission, que tout chrétien, toute communauté, toute Eglise qui ne prend pas, d'abord, avant tout, les chemins de la détresse des hommes n'a aucune chance d'être entendu comme porteur d'une Bonne Nouvelle.
Que tout homme, toute communauté, toute Eglise qui ne se fait pas d'abord, avant tout, fraternelle avec tout homme, ne pourra pas trouver le chemin de son cœur, l'endroit secret où peut être accueillie cette Bonne Nouvelle.
Pour ma part, en communion avec l'Eglise, je continuerai mon chemin pour porter la Bonne Nouvelle aux pauvres.
L'Evangile est un message de liberté et d'amour.
Annoncer Dieu aujourd'hui, c'est défendre la liberté de l'homme quel qu'il soit.
La liberté de devenir vraiment homme, c'est aussi vivre de solidarité, être en particulier la voix des sans-voix.
Le Corps du Christ n'est pas achevé, il se construit.
Donnons-lui un avenir, chacun à notre manière, dans le respect des personnes, dans la liberté de conscience et d'expression, dans l'ouverture au monde qui cherche lui-même les chemins de son avenir.
Chacun d'entre nous est une petite cellule : nécessaire à sa vie.
Qu'elle se sente meurtrie, abîmée, exclue et c'est le corps tout entier qui souffre.
Accompagnons le fraternellement, sans peur, sur ces chemins souvent nouveaux et inquiétants pour nous, mais tellement passionnants et porteurs d'Espérance.
La Mission continue.
Elle non plus n'est pas à son terme.
Donnons-lui un avenir, chacun selon sa vocation, selon les événements, chacun selon ses dons.
Mission de plus en plus fraternelle.
Mission fidèle à l'attention pour celui que Jésus accueille en priorité: le plus petit d'entre les siens.
Jésus est le pauvre, l'exclu dans lequel nous nous retrouvons.
C'est en lui paradoxalement que s'ouvre l'avenir, que s'enracine l'Espérance.
L'Eglise doit être l'Eglise des exclus et pas de l'exclusion.
Le Christ a connu, dans sa chair, ce chemin : Celui de l'abandon, de la condamnation injuste, de l'exclusion.
Celui de la résurrection où les portes de l'Espérance se sont ouvertes tout grand sur le monde pour des heures de joie, de tendresse, pour la paix possible, pour l'Espérance jamais vaincue.
Cette vague de confiance et de solidarité qui s'est formée aujourd'hui ne doit pas retomber.
On ne peut rester les bras croisés.
Quand un peuple prend la parole, des chemins nouveaux s'ouvrent.
Des initiatives se prennent.
Quand un peuple prend la parole, il n'y a plus de peur ni de crainte, mais des énergies neuves qui se déploient partout.
Jacques Gaillot.
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Gaillot n’aime pas les murs.
Et moi je n’aime pas les serrures.
C’est ce qui me le rend proche et compréhensible …
Anthyme- Maître du Temps
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Localisation : Entre deux mondes
Identité métaphysique : Libre
Humeur : À l’écoute du silence …
Date d'inscription : 23/10/2010
Re: Sainte Assurance …
« … / … ma vie est sur le terrain.
J'essaie de vieillir sans devenir vieux.
Une chose ne vieillit pas en nous, c'est l'amour.
… / … Bonne lutte. »
Jacques Gaillot
=================================
Belle jeunesse de Jacques.
Tu aimes en actes …
… comme le jour de cette chanson …
Accepter de perdre la considération des hommes…
… en choisissant d’exprimer l’amour de Christ …
Éternelle jeunesse de Jacques …
……………………
Gratitude et respect …
Anthyme- Maître du Temps
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