Sagesse du pluvian
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Armand Silvestre
Ceux sur qui, du trépas, passe la froide haleine,
Et qui sont amenés à quitter leurs pareils,
Ont-ils le souvenir de ce brillant soleil
Et des petits oiseaux picorant sur la plaine ?
Ont-ils le souvenir d'avoir, vêtus de laine,
Traversé la montagne aux feuillages vermeils,
D'avoir pris du café brûlant, à leur réveil,
Et d'avoir bavardé sous une lune pleine ?
Ils n'ont nul souvenir, n'entendent point nos pleurs,
Et n'éprouvent le chaud, le froid, ni la douleur.
Nous restons après eux, nous, pauvres créatures
Ayant accumulé l'inutile savoir,
Ne sachant point gérer ce pitoyable avoir,
Et contents, cependant, de la douce Nature.
Heredia voit un barde
J'ai rêvé que j'étais un monstre fier et lourd,
Un étrange animal, peut-être un minotaure,
Ou, dans une forêt, un perplexe centaure
Qui ne sait pour laquelle il se gonfle d'amour,
Ariane ou sa jument. Je suivais un parcours
Semblable au Labyrinthe, et même pire encore,
J'avais soif, à vider les plus vastes amphores,
Mais je n'en avais point. J'avais le souffle court
Et je cherchais en vain à rejoindre ma harde
Qui s'enfuyait au loin, apeurée par un barde
Dont les accents, toujours, dispersaient le bétail.
Soudain, à la sortie du piège inextricable,
Se dresse devant moi le barde-épouvantail :
Tous deux, nous éclatons d'un rire inexplicable.
Si les bouteilles buvaient
J'ai rêvé que j'errais au fond d'un souterrain,
Et que, l'obscurité n'étant pas la nuit noire,
On pouvait observer, toutes en train de boire,
Des bouteilles auprès des grands tonneaux de vin.
Des bouteilles buvant, quel sujet de chagrin !
Le vin est dangereux, et la chose est notoire.
Il donne à qui l'absorbe une force illusoire
Et fait s'aventurer sur de glissants terrains.
Bouteilles, cessez donc de vous intoxiquer !
La bouteille répond : Non, je vais t'expliquer,
Je ne bois nullement, car, comme tu t'en doutes,
Je n'ai pas de vrai corps, je suis un contenant
Portant un contenu toujours impermanent ;
Laisse-moi te verser un godet pour la route.
Théophile Gautier voit des statues
Les parcs et les châteaux peuvent ressusciter.
Sitôt que le passant les trouve sympathiques,
On en reconstitue les gazons, les portiques
Et les chemins bordés de beaux portraits sculptés.
Des visiteurs issus d'innombrables cités,
Les gens de l'Outre-Manche et de l'Outre-Atlantique,
Et ceux des bords du Rhin et de l'Adriatique
Viennent en rangs serrés pour voir et visiter.
Une foule joyeuse, à l'ombre de tes arbres
Écoute la chanson des fontaines de marbre ;
Plus d'une belle femme y conduit son amant.
Même si ce pays a d'autres monuments,
Ta gloire et ton renom toujours se perpétuent,
Et nous aimons flâner sous l'oeil de tes statues.
Re: Sagesse du pluvian
C'est super sympathique ton poème !
Nuage- Seigneur de la Métaphysique
- Nombre de messages : 13093
Localisation : Drôme du Nord (Rhône-Alpes-Auvergne - France)
Identité métaphysique : La mienne
Humeur : Fluctuante
Date d'inscription : 31/10/2011
Un curé voit une vache
Tout au long d’un chemin, on voit avancer Jeanne,
Une douce génisse allant à ses côtés.
Le soleil verse au monde une étrange beauté ;
Sur le sentier survient un vieux prêtre en soutane.
Ils échangent des mots dans le matin diaphane,
Jeanne au brave curé se met à raconter
Que la vache aujourd’hui doit se faire monter ;
Et le curé, pensif, regarde ses tatanes.
Un reproche lui vient, mais il n’ose le dire,
Car il voudrait le faire en gardant le sourire
Et sans se comporter comme un triste blaireau.
«Jeanne, j’ai, pour finir, un rappel à te faire,
Cette tâche devrait revenir à ton père.»
«La vache, cependant, préfère le taureau».
Nerval voit un dieu mort
La dentelle des mots sur la Toile est brodée
Et d’étranges concepts y construisent leur nid.
Un auteur, pour chercher ce qui les réunit,
S’efforce d’accrocher à chacun une idée,
Sans pouvoir avancer, même d’une coudée ;
Ce vieil auteur oublie ces mots mal définis
Pour exercer ailleurs son esprit démuni.
Vainement de sonnets la Toile est inondée :
Lorsque l’esprit divin s’avançait sur les eaux,
La poésie planait sur le moindre ruisseau
Et faisait scintiller les flots de l’Atlantique ;
Maintenant nul ne voit le visage vermeil
Du Dieu qui alluma la lune et le soleil ;
Nul ne parle avec lui, le soir, sous les portiques.
Saint Nicolas et le Diable
Saint Nicolas, ce jour, s'est montré matinal,
À tous ceux qu'il a vus, a fait joyeuse mine,
A loué leurs travaux, a goûté leur cuisine,
Qui mieux qu'un saint pourrait se montrer amical ?
Le diable en a parfois assez de l'animal.
Mais Nicolas n'est point de ceux qu'on élimine,
Ni de ces petits saints qu'un grand souffle extermine,
Donc le diable en patience a dû prendre son mal.
Tard le soir, ils seront tous les deux au café,
Diable et saint de décembre, ensemble réchauffés,
Partageant le plaisir sacro-saint de la piste.
Vieux qu'ils sont devenus, ne savent plus pourquoi
Un machin les sépare, aux couleurs de la loi,
Pas plus qu'ils n'ont noté depuis quand il existe.
Re: Sagesse du pluvian
Dieu lui-même se soucierait-il des qu'en-dira-t-on au regard de si belles créatures?gaston21 a écrit:Difficile de garder son coeur aussi pur que la neige...quand on aime les minets, y compris celui de la bergère !
Mes salutations fraternelles à l'amoureux de la femme en toi...
ronron- Seigneur de la Métaphysique
- Nombre de messages : 6672
Localisation : Canada
Identité métaphysique : agnostique ascendant ouvert
Humeur : ciel bleu
Date d'inscription : 07/03/2011
Hoc est somnium
J'ai rêvé que le monde était plein d'allégresse,
Ce dont ses habitants se montraient enchantés.
Rivalisant entre eux pour trouver la sagesse,
Ils soignaient les jardins qu'ils avaient enfantés.
Débordants de savoir (qu'aucun d'eux ne professe),
Leurs coeurs vers la lumière et l'amour orientés
Baignaient dans la douceur d'une éternelle ivresse
Que jamais le réel ne venait réfuter.
J'étais sous le pouvoir de ce rêve apaisant,
Mon esprit devenait limpide et complaisant,
Lorsqu'un fracas mit fin à cette nuit sereine :
Des camions du marché les rugissants moteurs
Ont accompagné l'aube au village enchanteur ;
Le jour va commencer, retournons à la peine.
Olivier de Magny voit une muse
D'inspiration, cette fureur divine,
Jamais ne peut un voyant s'abriter :
Au fond de lui, se prend à miroiter
Un univers que son coeur imagine.
De ces éclats que son esprit devine,
Il fait des mots qu'il veut expliciter ;
À les ouïr chacun est invité,
C'est à cela que l'auteur les destine.
Il les répand par les champs et la ville,
En palais noble et en demeure vile
Où l'on s'éjouit de l'entendre chanter.
Puis il retourne en sa sombre cambuse,
Car il attend la venue de la muse
Pour nouveaux chants en ce monde enfanter.
Charles Cros voit un tombeau
Avec quoi, beau rimeur, sinon avec ton âme,
Orneras-tu les murs de tes sombres milieux ?
Pour enchanter les mots, ce que l'on fait de mieux,
C'est le coeur palpitant d'un homme ou d'une femme.
Ainsi, tous les matins, tu entretiens la flamme ;
Tu vois l'alexandrin surgir devant tes yeux,
Cependant que ton front demeure insoucieux,
N'étant accoutumé à s'adresser un blâme.
Même si l'univers est parfois désolant,
Tu sais le célébrer, de ton verbe volant,
Ta langue n'étant point, dans ton bec, moribonde.
J'ai souri à tes vers lorsque je les ai lus,
Et rempli d'ambition, un beau jour, j'ai voulu
Devenir à mon tour un barde en ce bas monde.
Verhaeren voit une taverne
Vieux comptoir de Cluny, comptoir juste assez long
Où la bière-pression déverse sa pléthore,
Où le Côtes-du-Rhône est servi par ballons
Tandis que les buveurs ont des phrases sonores !
Sur un vieux tabouret j’use mon pantalon ;
Parfois la beuverie dure jusqu’à l’aurore,
Tant nous nous complaisons dans ce dernier salon
Où l’esprit parisien fleurit et rêve encore.
Les photos des clients se montrent sur les murs.
Chacun se reconnaît, déclarant "C’est ma pomme",
Même si le vivant est d’un âge plus mûr
Que, sur le vieux portrait, cet aimable jeune homme.
Puis, nous rentrons chez nous en longeant les ruisseaux,
Dans le petit matin qu’annoncent les oiseaux.
Baudelaire voit un ermite
29-12-2012 pour J. N.
Des pages d’un livre il s’abrite
Dans son bureau si bien rangé.
Le reste lui est étranger :
Il lit, il écrit, il médite.
Ceux qui un beau jour détiendront
Tous ses écrits mélancoliques
Y trouveront un sens oblique
Qu’à grand-peine ils établiront.
Il n’est pas de ceux qui enseignent,
Encore moins de ceux qui craignent.
Il vit presque sans mouvement,
Ce penseur, nuage qui passe,
Récompense ni châtiment
En son coeur ne trouvent de place.
Des pages d’un livre il s’abrite
Dans son bureau si bien rangé.
Le reste lui est étranger :
Il lit, il écrit, il médite.
Ceux qui un beau jour détiendront
Tous ses écrits mélancoliques
Y trouveront un sens oblique
Qu’à grand-peine ils établiront.
Il n’est pas de ceux qui enseignent,
Encore moins de ceux qui craignent.
Il vit presque sans mouvement,
Ce penseur, nuage qui passe,
Récompense ni châtiment
En son coeur ne trouvent de place.
À un compagnon de plume
Reçois ces quelques mots que j'écris aujourd'hui,
Un soir brumeux ou clair de cette année nouvelle.
Combien de mois déjà devant nos yeux ont fui,
Combien de nuits, de jours, de neiges à la pelle...
Merci pour tes chansons qui souvent m'interpellent
Comme la vérité au sortir de son puits,
Merci pour le clin d'oeil qui sur ces pages luit,
Pour les illustrations pertinentes et belles.
Et quoi de plus sacré que le geste d'écrire,
Que ce soit sur la mort, que ce soit sur le rire
Ou sur un mot auquel nous venons de penser.
Ainsi, nous poursuivrons un amical dialogue;
Chacun de ces sonnets n'en est que le prologue,
Le plaisir le plus grand, c'est bien de commencer.
Hommage à Paul Eluard
Sur Abel et sur Caïn
Sur Adam et sur Lilith
Sur le fils du charpentier
J'ai des sonnets
Sur les astres vagabonds
Sur les faits non résolus
Sur le long fleuve du temps
J'ai des sonnets
Sur l'archange Gabriel
Sur un horloger aveugle
Et sur Marie-Madeleine
J'ai des sonnets
Sur la vie du roi des arbres
Sur Sapiens et sur Faber
Sur Tartuffe en un couvent
J'ai des sonnets
Sur l'amitié des forums
Sur la joie et la tristesse
Sur le maître Chevillard
J'ai des sonnets
Sur le métier de chercheur
Sur le miroir déformant
Et sur Occam en vacances
J'ai des sonnets
Sur la peinture chinoise
Sur trois puissance quatorze
Sur la faim du prédateur
J'ai des sonnets
Sur le trouble ronsardien
Sur les deux cents éléphants
Sur Newton et Langevin
J'ai des sonnets
Sur la reine Pénélope
Sur la planète ignorée
Sur une vibration morte
J'ai des sonnets
Sur l'amour dans un coin sombre
Sur un campement rustique
Sur une nuit de juillet
J'ai des sonnets
Sur le regard de Saturne
Sur un rêve de voyage
Sur la rose et l'hirondelle
J'ai des sonnets
Sur le jardin et la croix
Sur la plume et l'encrier
Sur la salle et le comptoir
J'ai des sonnets
Et par le pouvoir des rimes
J'ai du soleil dans ma vie,
Je suis né pour te servir
Poésie.
Piaf-Tonnerre et la galette
Piaf-Tonnerre a mangé la galette. Il est roi.
Il fait donc apprêter pour le sacre un carrosse,
Mander que de Turpin l'on restaure la crosse,
Et que l'on sonne fort les cloches du beffroi.
L'archevêque, monté sur un noir palefroi,
Garde son fier maintien, malgré un temps atroce
Bousculant son surplis de rafales féroces;
Vers la ville de Reims il marche, dans le froid.
Le roi est accueilli par tous les pairs de France
Qui sont sur les genoux, en signe d'allégeance ;
L'archevêque Turpin demande posément :
« Sire, pour commencer, montrez-nous votre reine,
Point n'acclame le peuple un roi sans souveraine. »
Piaf-Tonnerre est songeur. Faut-il cela, vraiment ?
Toulet voit un coin de Paris
Un bouquiniste au regard terne,
Un vieux livre ouvert,
Cet homme lit des balivernes
Dans son noir magasin désert.
Dehors, dans la lumière crue,
Pas grand-chose à voir,
Une foule au boulot se rue
En pensant "Vivement ce soir"...
Paris, c'est quatre-vingts provinces,
Quatre-vingts hameaux.
Chaque boutiquier, c'est un prince,
Un seigneur, un drôle d'oiseau.
Mandelstam voit une ville
Je reviens en un lieu familier jusqu'aux larmes
Qui vit dans mes vaisseaux et dans mon coeur d'enfant.
Et la ville me dit : Mange donc, revenant,
Mes lumières du soir, si tu es sous leur charme.
Reconnais à présent ce jour sans grande alarme
Mêlant du jaune d'oeuf à du goudron fumant ;
Ma ville, je ne suis pas encore un mourant,
Je veux savoir où sont mes copains de vacarme.
Ma ville, je connais même ceux qui sont morts,
Je peux les évoquer sans honte et sans remords.
Dans les noirs escaliers sonne au creux de mes veines
La sonnette d'un gars qui ne m'ouvrira plus,
De ceux que, dans la nuit, j'ai longtemps attendus,
Rien ne me parlant d'eux, que le bruit de leurs chaînes.
Mallarmé voit un tombeau
Aux abords de la tombe, en rimeur je me change ;
Grâce à quelques sonnets, mon coeur se montre nu
Devant mes compagnons, devant des inconnus,
Devant tout un chacun, quelle démarche étrange !
Le but n’est certes point de devenir un ange,
Ni d’affranchir d’un sens les gens de la tribu,
Ni d’avertir du sort de ceux qui ont trop bu
(Ou qui ont un problème en termes de mélange) ;
Pas question, d’autre part, d’exhiber des griefs
Ni de mettre en ces vers une idée en relief ;
Gratuitement la Toile avec tous ces mots s’orne
Sans lesquels nous irions vers le côté obscur,
Et leur voix en ces lieux à résonner se borne
Un peu dans l’autrefois, un peu dans le futur.
Vin sur vin
Le fils du charpentier fit un geste magique
Aux noces de Cana, lorsqu'on manqua de vin.
Chacun but une coupe, et la joie en advint ;
Nul ne trouva le fait contraire à la logique.
Loin des graves propos, loin des discours tragiques,
La fête lui montrait qu'il n'avait pas en vain
Usé, pour ce beau jour, de ses pouvoirs divins
Et de son bienfaisant savoir oenologique.
Le vin qui étourdit les jolies demoiselles
Et qui donne aux vieillards une énergie nouvelle
Fait ressembler la noce au sacre d'un grand roi.
Le vin, trois ans plus tard, devient le sang de l'homme
Que devait condamner la justice de Rome ;
Du sang pour baptiser les planches de la croix.
Re: Sagesse du pluvian
Cochonfucius, ça veut dire quoi le petit bonhomme de neige en bas à droite de certaines images ?
Nuage- Seigneur de la Métaphysique
- Nombre de messages : 13093
Localisation : Drôme du Nord (Rhône-Alpes-Auvergne - France)
Identité métaphysique : La mienne
Humeur : Fluctuante
Date d'inscription : 31/10/2011
Baudelaire voit une sépulture
-- Baudelaire, es-tu un filou ?
(Ou peut-être, un vieillard lubrique).
-- Non, je suis rimeur famélique.
-- Aimes-tu donc le cri des loups
Glaçant les âmes condamnées
Pour les innombrables années ?
-- J’ai du chagrin pour les petits
Cadavres cousus dans la toile,
Et mon coeur est appesanti
De nostalgie, sous les étoiles.
-- Auprès de nous, tu es vanté
Pour tes sonnets pleins de décombres.
-- Tu me dis ça par charité,
Ma douleur n’en est pas moins sombre.
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