Sagesse du pluvian
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mikael
Cochonfucius
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Belette surnaturelle
La belette magique est compagne d’Orphée,
Sa petite chanson n’est pas pour les goujats :
Et la Grâce toujours, par son zèle échauffée,
Pénètre dans ce cœur que je ne connais pas.
J’ai vu le grand ballet de la belette-fée
Qu’elle dansait au loin, jadis, à petits pas,
J’ai vu qu’elle bravait les édits de Morphée
Et que d’un campagnol elle fit son repas.
La belette de Dieu n’est pas de la racaille,
Mais son coeur, quelquefois, se montre un peu canaille,
Et tout cela, malgré ses dons miraculeux :
Allons, nous l’aimons bien, c’est notre enchanteresse,
Ses deux ou trois défauts n’ont rien de scandaleux,
Elle qui fut nourrie par les dieux de la Grèce !
Ambicoq-hirondelle
L’ambicoq-hirondelle est l’oiseau de Narcisse ;
La flèche du chasseur ne saurait le toucher.
Au tiède poulailler, il n’est pas attaché,
Mais il peut méditer sur un arbre propice.
Sur lui fut un pinard benfaisant épanché
Dont il but un godet, ce n’était que justice.
Des insectes gloutons l’épargne le supplice ;
Il mange les poissons qu’il parvient à pêcher.
Ô qui pourra chanter ta valeur nonpareille,
Qui donc te décrira, fabuleuse merveille ?
Ceux qui l’ont déjà fait, que leur pouvoir est fort !
Par ta méditation, que mon âme a suivie,
Je sais que tu as su apprivoiser la mort :
Car même ta vieillesse est un trésor de vie.
Chimère de sable
Cette obscure chimère, où peut-elle habiter ?
Près d’elle n’acceptant nulle autre créature,
L’isolement convient à sa noble figure,
Elle veut conserver sa gloire et dignité.
Je la connais fort peu, j’ignore, en vérité,
Comment est son logis, quelle en est la structure,
Car, même étant curieux des faits de la nature,
Je ne puis accéder à la la Divinité.
Cette chimère ayant la raison pour partage
Est de son créateur une vivante image ;
Nul ne l’entend cracher, éternuer, vomir,
Je ne me souviens pas de l’avoir vue trop boire,
Animal fabuleux, chimère sans histoire :
Elle passe, il est vrai, tout son temps à dormir.
Transfiguration d’un petit lézard
Ce lézard s’illumine en une apothéose
Bleue et jaune, un habit qu’on dirait de gala.
Flamboyant , très heureux, il voit sa vie en rose,
Il trouve un paradis au jardin que voilà.
En bas, quelques fourmis rangeant diverses choses ;
Les tournesols dorés et les mauves lilas,
Se dressent gentiment. Le lézard se repose,
Savourant le trésor qu’un ange dévoila.
Nul hôte du jardin ne se montre féroce,
La citrouille jamais ne se change en carrosse,
Pas même un chant d’oiseau, le lézard reste coi...
Un bousier surgit, comme un soleil noir... — Au centre,
Un lombric rouge et blanc, très naïf, sur son ventre
S’avance et se tortille, il cherche, on ne sait quoi.
Ambilion de Prusse
Ce fauve se souvient d’une main de princesse
Qui de son corps flattait l’assemblage subtil ;
D’avoir senti les doigts froids comme du grésil
Et du rouge velours partagé la richesse.
De la fille du roi la translucide adresse
Porte une volupté, mais qui n’a rien de vil :
Comme d’un vin sucré le parfum volatil,
Comme le fruit très mûr, le raisin que l’on presse.
L’ambilion dans sa cage antique et fatiguée,
Regarde tendrement la princesse intriguée,
Puis médite à loisir, ses beaux yeux se fermant.
Alors il s’accroupit sur la toile azurée
Et rumine en son coeur ses amours mesurées,
Jamais il ne sera le vrai prince charmant.
Étoile de Hastings
La comète semble un dieu
À la rigueur absolue ;
On nous en offre une vue
Sur la toile de Bayeux.
Ce bolide est radieux !
Il brille au travers des nues
Et sa forme est inconnue
Mais son cours est gracieux.
Cet astre fait-il du mal ?
Il est comme un animal
Qui mettrait le ciel en crise.
Plane, météore clair :
Il est plus vif que l’éclair,
Ton corps qui se pulvérise.
Dame vêtue d'azur
Sa robe fut coupée sur un fruste modèle
Par un petit tailleur aux ruelles du port ;
Le tissu de coton, qu’il cousit bord sur bord,
Fut bleu comme le ciel où vont les hirondelles.
Cette dame d’azur est loin des bagatelles :
De la foi très antique elle est un contrefort,
Elle peut rassurer un enfant qui s’endort ;
Ça ne lui convient pas de s’orner de dentelles.
Le Temps impitoyable avec son balancier,
La Ville désolante aux cavernes d’acier :
Elle a souvent raison de ces deux adversaires,
Quant à nous, qui trouvons les dimanches bien courts,
Nous savons qu’elle est là, même les autres jours,
Surtout le huit septembre, à son anniversaire.
Le seigneur Bunnybird
Le lapin-piaf est sans histoire,
Il n’est jamais effarouché ;
Il a conquis, sans y toucher,
Un confortable territoire.
Sa conscience est aléatoire,
Elle se tient loin du péché ;
Bunnybird jamais n’a triché,
Dans sa douceur est sa victoire.
Près de lui, des corbeaux joyeux
Lissent leur plumage soyeux
Et la truite au ruisseau s’ébroue ;
Il a des souvenirs épars,
Il me les dit sans aucun art ;
De son karma tourne la roue.
Palais désert
Les gardes sont absents, les ministres ont fui ;
Et c’en est terminé de la cour rayonnante.
En vain dans le verger se détachent les fruits ;
Le lourd canon du fort n’a plus sa voix tonnante.
La défaite du roi, la révolte éclatante,
Le carrosse esseulé qui roule dans la nuit ;
Nul ne porte attention à sa présence errante,
Il ne sait pas où va son chemin, quant à lui.
Les noirs démons sont là, violents comme des houles,
C’est alors que sur l’herbe, un sanglier déboule :
Il regarde le roi, sans passer à l’assaut...
Le monarque s’approche et lui parle sans fièvre :
Ce sont des mots secrets qui tombent de ses lèvres,
Qu’entend, sous le ciel noir, le sauvage pourceau.
Prophète cruciforme
Il amusait les rois, il effrayait les dames,
Il avait quatre mains, et quatre pieds aussi,
Sa coordination fut un constant souci ;
Mais en son sang brûlait la prophétique flamme.
Prophète que jamais nulle crainte n’entame,
Sur un nuage, ainsi qu’un amoureux transi ;
Jamais contre un pécheur il ne fut endurci,
C’est le sens du pardon qui emplissait son âme.
Vainement les Romains le menacent, alors
Que son ardente foi fait vibrer tout son corps ;
Et de voir le bourreau, ça le laisse de glace ;
Ils ont trouvé du bois de la bonne longueur,
Ils y ont attaché ce héros dont le coeur
Animait bravement une double carcasse.
Lord Smiling Bull
C’est un seigneur taureau de bovine mémoire ;
Il surprend son troupeau par des rires soudains,
Il peut rire d’un rien, son coeur n’est pas hautain,
Jamais, dans sa carrière, il n’a voulu la gloire.
Il cherche, en ses loisirs, le sens du verbe «croire»,
Il consulta Littré, mais ce fut bien en vain,
Ce fut trop compliqué pour qu’il lui en souvînt,
Donc, sa grande paresse emporta la victoire.
Le Seigneur Smiling Bull a bien peu de rigueur,
Tu ne trouveras rien de sévère en son coeur :
Il ne se prend donc pas pour un être suprême.
Jamais, du personnage, on ne fit un roman,
Mais il dort, puis il veille, ainsi, tout simplement,
Quand l’existence est vide, on survit tout de même.
Moine qui lit
Le moine d’une bible enrichit son séjour,
Dont la tiède saveur patiemment il endure ;
Cela fait plusieurs fois qu’il fait cette lecture,
S’y plongeant chaque nuit, et parfois en plein jour.
Dans le sous-sol il va lire ces mots d’amour,
Des scribes découvrant l’ombrageuse nature ;
Il prend, dans sa cellule, un peu de nourriture
Et glisse, nonchalant, au texte sans retour.
Car lire en une bible est chose assez cruelle ;
Cette tâche, pour lui, peut-être habituelle,
Il en emplit son coeur, il ne s’en lasse point.
En déchiffrant ces mots, c’est chez lui qu’il retourne ;
Il est cousin du dieu qui toujours y séjourne,
Pris dans chaque virgule, aussi, dans chaque point.
Sirène poissonnière
Cette sirène est rose sans épines ;
Neptune aima la douceur de son teint.
L’esprit du dieu, qui jamais ne s’éteint,
Rendit plus vif son coeur en sa poitrine.
Te réchauffant sous ces deux mains divines,
T’en remettant à ce bras qui t’étreint,
Tu exposas, d’un rire non contraint,
Tes blanches dents, comme des perles fines.
Mais de ce dieu, dites-moi ce qu’il reste,
Ni l’océan, ni le monde céleste,
N’abritent plus ces éternels vainqueurs.
Bien prosaïque est devenue la Terre ;
Peu de démons font encore la guerre,
Et ceux-là n’ont aucun dieu dans le cœur.
Ambijumper
L’ambijumper est un touriste,
Il aime flâner dans les bois ;
Sa dulcinée joue du hautbois,
Instrument qu’il trouve un peu triste.
L’ambijumper est un artiste,
Son art peut inspirer l’effroi :
Il peint souvent des monstres froids
Sous des murailles d’améthyste.
Dans sa chambre, un bouquet de buis,
Un seau d’eau tiré de son puits,
Une chandelle sur la table.
Il a des yeux d’un bleu profond,
Sous des lunettes qui lui font
Un sombre masque impénétrable.
Ermites nautoniers
Ermites nautoniers, sur les eaux tout un jour,
Observant les poissons dans la fraîche lumière ;
Ils sont les serviteurs de la cause première ;
Ils nous font partager sa joie et son amour.
Jamais ils ne seront des ermites de cour,
Jamais ils ne seront des moines de carrière ;
Des portes du savoir ils passent la barrière,
Et visitent leur lac, en ramant tour à tour.
Ainsi, voguant toujours dans la vague amicale,
Ils trouvent devant eux la rive occidentale
Où l’automne répand son éclat sans pareil.
Je peux les comparer aux dieux de la nature
Dont ils sont, d’après moi, la vivante peinture :
Pour frère et soeur, ils ont la lune et le soleil.
Inconnu comme le loup bleu
Il n’est point un goupil dérobeur de chapons,
Ni, sur la vaste lande, un âne qui se cabre ;
Et ce n’est pas non plus un tigre à dents de sabre,
Moins encore un gorille amateur de jupons.
Ce n’est pas un dragon de laque et de crépon,
Pas plus qu’un singe orné de rouges fesses glabres ;
C’est le loup qui, jadis, dévorant du cinabre,
Donnait la répartie au blaireau du Japon.
Mais tel fut son destin, défini par les astres :
À l’abri du bonheur, à l’abri du désastre,
Jamais il ne sera un fameux loup de mer ;
Me fixant de ses yeux dont pas un cil ne bouge,
Il s’accroupit soudain sur ses jarrets de fer,
Pendant qu’à l’horizon se lève un soleil rouge.
Poissonnier volant
Pêchant depuis le temps du miracle au Thabor,
Il a bâti son nid sur l’argile rougie ;
Depuis bien des années, il voudrait, par magie,
Capturer dans ces eaux le petit poisson d’or.
Et ce poissonnier prend au matin son essor,
Plus fier que les démons de la mythologie
(Mais il n’a point de part à leurs sombres orgies).
Les poissons sous la pierre ont abrité leur corps.
Point ne veulent subir, des serres effilées,
La caresse cruelle à leur chair profilée ;
Ils vont donc se cacher tout au fond d’un lagon.
Ces beaux poissons marins ont le moral en berne ;
Le rapace porté par le vent de galerne
Les remplit de terreur, il leur semble un dragon.
Hache et souche
Hache du bûcheron, porteuse d’étincelles,
Ta redoutable lame, en captant le soleil
Apporte à ce sous-bois un éclat nonpareil,
Comme aux murs d’Orléans l’épée de la Pucelle.
Le grand arbre, en perdant sa substance charnelle,
Survit en une souche au paisible sommeil ;
De jeunes rejetons avril verra l’éveil,
En continuation d’une histoire éternelle.
La souche dort au bois, sans rancune des coups ;
Le bûcheron, n’ayant nulle crainte des loups,
Arpente les sentiers qu’il a plaisir à suivre :
Car la hache et la souche ont un lien, dans l’honneur,
L’arbre majestueux de son corps est donneur :
Quand il devient charpente, il lui semble revivre.
Fier canard de sinople
Le canard élégant partit chercher l’amour,
Nous l’avons vu nager comme une âme en détresse,
Sans songer aux poissons qui de le fuir s’empressent ;
Nous l’avons vu voguer, plus fier de jour en jour.
Qu’en dire, c’est la vie, c’est le sel de nos jours.
Même le roi David en eut de la faiblesse ;
Évariste Galois, en soudaine paresse,
De son ange matheux ne reçut nul secours.
Assez peu de canards ont vécu chastement ;
Aussi notre héros, dans ses vives pensées,
N’a jamais décompté les forces dépensées.
Mais sur un canard vert, qui ferait un roman ?
Que jamais ne m’en soit la requête adressée,
Car je ne saurais point noter ses sentiments.
Invisible écureuil d’azur
« Bon forestier, je te demande
Où sont les écureuils d’azur.
Tu sais mieux que moi, j’en suis sûr,
Où trouver leur joyeuse bande ;
Je leur apporte des amandes :
Sortiront-ils du bois obscur ? »
Posant sur moi son regard pur,
Le forestier me réprimande :
« Nos écureuils mangent des pignes,
De les nourrir tu n’es pas digne ;
Eux-mêmes choisissent leurs mets,
Car la Nature est généreuse ;
Ces hôtes des forêts ombreuses,
Sache qu’on ne les voit jamais. »
Bibliotaure
Taureau bibliophile, animal au coeur sombre,
Tu relis, ô penseur solitaire du seuil,
Le récit que te laisse un maître sans orgueil
Qui des terrestres biens nullement ne s’encombre.
Sans écouter Satan qui calcule un vain nombre,
L’Évangile t’exalte à ne pas fermer l’oeil,
Alors que le fermier somnole en son fauteuil ;
Un suprême tison vient éclairer ton ombre.
Qui veut vraiment aimer ce beau livre ne doit
Pas craindre que les gens ne le montrent du doigt,
Ni trop manquer d’espoir pour les âmes défuntes.
Auprès du clair foyer, nous te voyons t’asseoir,
Toujours dans ton bouquin, sauf si l’on te l’emprunte,
Le silence du Maître entendu tout un soir.
Licorne aux plumes de sinople
Licorne de sinople, indulgente maîtresse,
Tu n’as nulle vision trop stricte de l’amour ;
En ton doux coeur de monstre il fait de brefs séjours,
Tu as la liberté des dieux et des déesses.
Bienheureux animal, éprouvant la tendresse,
La flamme dans les yeux, l’innocence des jours,
Alors que le jardin verdoyant à l’entour
Incite tes amants à la sainte paresse.
Compte les madrigaux et les cierges brûlés,
Les heures sans sommeil et les vins écoulés,
Compte les chevaliers que tu mis en servage.
Or, de tous tes amants le plus aventureux
Fut Pierre de Ronsard, poète d’un autre âge,
Dont ton âme est jalouse, et ton coeur amoureux.
Abeilles aquitaines
Piaf-Tonnerre en a fait le sujet de sa thèse :
Il les laissa souvent se poser sur ses mains,
Il aime aussi les voir se former en essaim,
Ou, pendant tout l’hiver, vivre entre parenthèses.
Le soleil les ravit, la brise les apaise,
Je les entend chanter quand leurs greniers sont pleins;
L’abeille est un forçat qui jamais ne se plaint,
Car son labeur n’est point la source d’un malaise.
Abeilles et bourdons sont symboles d’Amour :
Ce sont signes parlants, créatures de jour
Menant avec les fleurs une danse galante.
La thèse, cependant, ne se termine pas ;
Piaf-Tonnerre a du mal à franchir un tel pas,
Il préfère observer un insecte, une plante.
Portecoq
Portecoq est seigneur des deux rives de Seine,
Il a, pour le servir, mille petits bergers
Qui doux trouvent leur sort et légères leurs chaînes,
Ayant un si bon maître, ils n’en veulent changer !
Mais lui de soumission ne se peut dégager,
Bien que noble, il connaît servitude certaine ;
Car il offensa Zeus, lequel, pour se venger,
Sur lui jeta le sort d’amour et de sa peine.
La louange d’un coq il devra réciter,
Ou la sorcière au bois nuitamment consulter,
Ne pouvant satisfaire une fatale envie.
Jalouser une poule est pire que la mort,
Or, de Seine il ne peut quitter l’aimable bord :
La ville tient son coeur, et le fleuve est sa vie.
Pour des prunes
Voici venir le temps des prunes ;
Voici le temps des sanglots longs.
Quand il ne pleut pas, nous allons
Voir le couchant, depuis la dune.
Le prunier danse sous la lune,
Les fruits nourrissent des frelons ;
Le feuillage qui devient blond
Semble un présage de fortune.
En ce verger, reposons-nous :
Le chat s’endort sur mes genoux,
Son lumineux regard se voile.
Le froid s’en vient, nous frémissons ;
La brise procure un frisson
À ce vieux coeur, sous les étoiles.
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